” (Photo : Joel Saget) |
[10/04/2012 11:42:35] PARIS (AFP) “La délocalisation, je l’ai toujours refusée !” Pascal Duflos, patron d’un petit atelier de confection en Vendée (ouest) se réjouit de la place du “Made in France” dans la présidentielle même si “ça vient 10 ans trop tard” pour un secteur qui a perdu de nombreux savoir-faire.
Ce 29 mars, le façonnier participe justement à Paris au salon “Made in France”, rendez-vous de la fine fleur des sous-traitants de l’habillement, afin de voir des clients pour son atelier de prêt-à-porter féminin de Belleville-sur-Vie qui n’a que “trois semaines de visibilité” de travail.
En 2009, sa robe de soirée aux tons mauve faisait l’affiche du salon. Mais la crise est passée par là, avec un dépôt de bilan fin 2010 pour ses 45 salariés et un redémarrage avec trois d’entre eux début 2011 sous un nouveau nom “P3C”.
“Aujourd’hui, on est onze mais on a perdu des savoir-faire. On ne fait plus ni robe de mariée ni de robe de soirée”, regrette-t-il.
A 62 ans, Pascal Duflos a vécu 40 ans de déclin du secteur et cherche maintenant à pérenniser sa société pour la céder ensuite à un repreneur convaincu comme lui de l’avenir du haut de gamme en France.
“Des opportunités de délocalisation, j’en ai eu pendant ma carrière mais je suis une vieille tête de cochon +made in France+. On a la qualité, la réactivité, il faut juste un peu de chauvinisme”, plaide-t-il.
“La grosse problématique en France, c’est la perte des filières. Les ateliers de confection, on devient une denrée rare. Des jeunes créateurs ne peuvent plus faire produire en France”, explique-t-il.
Cette perte de savoir-faire s’accélère avec le départ à la retraite massif des ouvrières. “Les jeunes veulent bien être stylistes mais pas travailler sur les machines”.
Malgré tout, le secteur de la haute-façon emploie encore quelque 10.000 personnes dans 200 petites et moyennes entreprises. Et l’ambiance au salon est un peu moins morose cette année.
“On avait perdu 30% du chiffre d’affaires en 2009 avec la crise. On en a regagné 15% depuis”, résume Tony Herblot, président du groupement Ouest Mode Industrie.
Le climat politique est également porteur, le spectre d’un pays désindustrialisé ayant poussé les candidats à mettre le “produire en France” au coeur de leur campagne pour l’élection présidentielle (22 avril et 6 mai).
“On a vraiment une carte à jouer. Il faut en profiter pour imposer certaines choses”, juge Gilles Attaf, à la tête de Smuggler, dernier producteur de costumes pour homme en France.
Ces industriels réclament un soutien politique face aux maisons de luxe dont ils sont dépendants et qui s’accaparent l’essentiel de la marge.
“On imposerait aux donneurs d’ordre de passer 10% de leurs commandes en France, on remettrait des outils en route”, estime Pascal Duflos.
Gilles Attaf croit lui à l’effet des labels, comme “Origine France Garantie”, mis en place en 2011. En guidant les consommateurs, il doit leur permettre de faire pression sur les distributeurs et les grandes entreprises françaises pour qu’elles proposent des produits français.
Mais ce label, encore peu répandu, est un peu trompeur car il suffit que la moitié de la valeur ajoutée du produit soit française. Aussi d’autres ont-ils décidé d’aller plus loin en lançant des sites web garantissant au consommateur du “made in France”.
C’est le cas d’Arnaud Verheyde, qui arbore un maillot de rugby blanc au coq rouge fabriqué dans les Pyrénées (“le premier à avoir porté un coq, un modèle France-Irlande 1905”), une des 1.300 références de son site internet “acheter-français.org”.
“Toutes les opérations de coupe et de montage sont faites en France. Il manque juste les champs de coton”, sourit-il.
Pour l’instant son site est surtout un “hobby” au “chiffre d’affaires anecdotique”. Mais il se voit comme un précurseur. “On est comme le bio il y a quelques années. On parie sur l’intelligence du consommateur, c’est une forme de patriotisme économique, pas du protectionnisme”.