Quels moyens pour rebondir après la panne économique? Les voies et les moyens.
A l’occasion de la sortie de son étude d’impact sur les perspectives de relance de l’économie tunisienne, la Banque africaine de développement (BAD) a réuni un séminaire pour débattre de la question avec le concours de personnalités tunisiennes. La composition du panel est bien structurée. Sont représentées l’économie, la finance, l’université et le monde des affaires ainsi que l’administration. Large spectre, sans doute. Les sensibilités individuelles sont bien connues.
Fadhel Abdelkefi dira ou rappellera que la Bourse, en dépit d’un standing technologique et réglementaire de niveau international, ne participe au financement de l’économie qu’à hauteur de 5% au lieu de l’objectif de 20% qui lui était assigné, dès avant la révolution. Le Conseil de la Bourse a fait son travail de lobbying institutionnel en accueillant les principaux dirigeants politiques d’après le 23 octobre. Et il constate, avec un certain dépit, que la volonté politique de booster le financement direct de l’économie, comme par le passé, fait encore défaut.
Habib Karaouli, PDG de la BAT, considère que les composantes du carré magique, à savoir l’export ainsi que l’inflation, de même que l’investissement et l’emploi ne pouvaient être assurés ensemble dans la conjoncture actuelle. Il soutient que c’est à l’investissement public de donner l’étincelle. Cette composante est entre les mains du pouvoir politique et c’est la première à pouvoir faire revenir la confiance dans le système et l’espoir chez les demandeurs d’emploi. L’obstacle des procédures d’octroi de marchés publics doit être levé. Il appelle à faire du gré à gré. Il faut trouver les moyens pour faire court et …transparent. Car au motif d’aller vite, il faut que l’opinion puisse voir que l’on ne verse pas dans les pratiques d’avant la révolution.
C’est autour de Slim Zeghal, PDG d’Altea Packaging, de relayer l’idée de H. Karaouli. Le seul moyen de relancer l’activité réside dans l’engagement rapide de l’investissement public dans les régions et en faveur de l’infrastructure. Il dira que tous les avis s’accordent sur la question confirmant son propos par la recommandation de Georges Soros. Le célèbre financier, de visite en Tunisie, a bien confirmé que dans l’immédiat post révolution, le pays ne peut compter que sur ses propres ressources. Comprenez que les IDE ne viendront que plus tard.
Mohamed Haddar, un peu en pointe par rapport aux autres membres du panel, soutient qu’il faut mettre les bouchées doubles et que pour œuvrer à la refondation de l’économie nationale, en mal d’un modèle nouveau, les calculs des argentiers nationaux étaient trop étriqués. Il appelle à plus d’audace en matière budgétaire et davantage d’inventivité dans la manière de planifier et de réformer les structures de l’économie.
Ikbel Bédoui, DG de Fitch Rating, pense que 2012 et la suivante seront des années difficiles. L’économie du pays affronte deux défis majeurs, la refondation économique et le déficit de ressources. En somme, tout est à réinventer au moment où l’intendance, selon l’expression du Général de Gaulle, fait cruellement défaut.
Slim Besbés, SE aux Finances, a présenté l’étendue de la loi de finances complémentaire et a présenté les cadres de les grandes lignes du plan économique du gouvernement.
Le plan intérimaire de la BAD
L’horizon retenu pour la BAD pour son étude qu’elle a intitulée «Document de Stratégie Pays Intérimaires 2012-2013» ne laisse pas de doute sur l’urgence de la réforme à entreprendre.
Les experts qui ont mené l’étude l’ont séquencée sur deux phases majeures. La première est de faire repartir la croissance tout en œuvrant à achever la transition économique. Par transition économique, il s’agit en toute vraisemblance de refondation car la transition, c’est-à-dire l’ouverture des frontières et la libération des prix, est bien entamée.
Et pour ce qui est de la libéralisation des services, qui est le stade ultime de la transition, nous pensons que l’agenda n’est pas national, uniquement, mais qu’il dépend des rounds de négociations de l’OMC.
Dans sa deuxième partie, le rapport évoque l’inclusion sociale et la réduction des disparités régionales. Le tempo est donné et la BAD a déjà contribué au financement de la reprise.
Un sommet national pour l’économie
De même qu’il y a eu une Assemblée constituante de société civile, nous souhaitons voir la création d’un Conseil économique et social (CES) de même nature pour l’examen de toutes les études élaborées par les institutions internationales.
L’étude de la BAD, avec celle précédemment préparée par la BERD et toutes les autres propositions fragmentées émises par les personnalités nationales méritent d’être présentées à l’opinion publique.
Nous regrettons toutefois que dans les panels constitués on ne fasse pas place aux partenaires sociaux. Les syndicats et les associations patronales ont leur mot à dire. Les institutions de statistiques et les autres think tank qui se penchent sur la prospective et la productivité pourront certainement apporter des contributions précieuses qu’il faudra insérer à cette réflexion d’ensemble.
Nous déplorons également que l’agriculture soit oubliée de ces réflexions et que le monde agricole soit complètement absent de ces joutes nationales.