Coup de froid dans les relations Espagne-Argentine autour du dossier Repsol

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à Madrid (Photo : Dominique Faget)

[13/04/2012 13:08:52] MADRID (AFP) Les tensions entre l’Espagne et l’Argentine, nées de rumeurs sur une possible nationalisation d’YPF, filiale du géant pétrolier hispano-argentin Repsol YPF, se sont brusquement aggravées vendredi avec la convocation de l’ambassadeur argentin à Madrid.

Le malaise qui couvait depuis des semaines, entre deux pays aux relations traditionnellement cordiales, a dégénéré en crise diplomatique, poussant la Commission européenne à intervenir pour appeler l’Argentine à “protéger les investissements étrangers sur son sol”.

En cause: l’éventualité d’une prise de contrôle par l’Etat argentin d’YPF, filiale encore détenue par Repsol à 57,4% malgré une stratégie de désinvestissement ces dernières années.

Un geste par avance interprété à Madrid comme une manifestation “d’hostilité”.

Jeudi, le ministre espagnol de l’Industrie, Jose Manuel Soria, avait le premier haussé le ton.

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Une enseigne de Repsol, le 13 avril 2012 dans une rue de Madrid (Photo : Dominique Faget)

Filmé depuis Varsovie, face à la caméra dans une vidéo diffusée par les médias, le ministre a lancé une mise en garde solennelle à l’Argentine.

“S’il y a quelque part dans le monde des gestes d’hostilité envers les intérêts d’entreprises espagnoles, le gouvernement les interprète comme une hostilité envers l’Espagne”, a-t-il dit.

Vendredi, nouveau coup de semonce, cette fois du secrétaire d’Etat espagnol à l’Union européenne, Inigo Mendez de Vigo: “L’Argentine va se transformer en un pestiféré international”.

“Si cela se produit, ce serait une très mauvaise nouvelle pour tout le monde, mais aussi pour l’Argentine, parce qu’au sein de la communauté internationale, briser les règles a un prix”, a menacé le secrétaire d’Etat.

“Nous faisons tout ce que qui est possible au niveau national, européen et international parce qu’il y a aussi dans le capital de Repsol des fonds américains et d’autres types d’investisseurs”, a-t-il dit.

Pour transmettre à Buenos Aires la “préoccupation” de l’Espagne, le ministre des Affaires étrangères José Manuel Garcia Margallo a convoqué vendredi l’ambassadeur argentin à Madrid, Carlos Bettini.

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ésidente argentine, Cristina Kirchner,le 13 juillet 2010 à Pékin (Photo : Liu Jin)

Détonateur de cette brusque poussée de fièvre, la réunion jeudi entre la présidente argentine, Cristina Kirchner, et les gouverneurs provinciaux, qui devait examiner la possibilité de faire d’YPF une entreprise mixte.

La filiale argentine pèse pour deux tiers dans la production de brut de Repsol (62%) et pour près de la moitié de ses réserves avérées (un milliard de barils sur un total de 2,2 milliards).

Vendredi matin à Madrid, le groupe assurait n’avoir “aucune information” sur une possible prise de participation de l’Etat argentin dans sa filiale, tandis que la presse évoquait une “confusion absolue”.

Le journal catalan La Vanguardia affirmait ainsi que la présidente argentine avait “refusé” de recevoir le président de Repsol Antoni Brufau, en visite à Buenos Aires.

“Il n’échappe à personne que l’attaque de Cristina Kirchner contre YPF se produit à un moment très délicat pour l’Espagne, où sa dramatique situation économique non seulement absorbe presque tous les efforts du gouvernement, mais lui a fait perdre aussi de la crédibilité”, commentait le quotidien économique Expansion.

Depuis des semaines, le gouvernement argentin fait pression sur les compagnies pétrolières pour qu’elles augmentent leur production nationale, la facture pétrolière du pays ayant bondi l’an dernier de 110%, pour atteindre 9,4 milliards de dollars.

Accusé de ne pas assez investir, Repsol YPF s’est vu retirer ces dernières semaines 16 concessions pétrolières par une demi-douzaine de provinces.

Repsol YPF est le leader sur le marché des combustibles en Argentine. Sa filiale YPF, privatisée dans les années 1990, contrôle 52% des capacités de raffinage du pays et dispose d’un réseau de 1.600 stations-service.