à Paris (Photo : Dylan Calves) |
[17/04/2012 07:11:05] ZURICH (Suisse) (AFP) Taxation des exilés fiscaux, super-impôts pour les hauts revenus, les propositions des candidats à l’élection présidentielle incitent de plus en plus de Français à lorgner vers la Suisse, considérée comme un havre de paix fiscal et politique, estiment les spécialistes.
“Il y a beaucoup d’entrepreneurs qui viennent en Suisse et qui sont écoeurés par la France, où ils subissent régulièrement des contrôles fiscaux. Ils ne supportent plus le climat qui règne en France”, explique Thierry Henry.
Pour ce gérant associé de la société lausannoise HTI, spécialisée dans le conseil fiscal et la domiciliation dans la Confédération, ces “clients préfèrent venir en Suisse et ne retournent pas en France en raison de l’instabilité politique et sociale”.
“Les gens qui ont de gros revenus en ont assez”, abonde François Micheloud, propriétaire du cabinet de conseil fiscal du même nom.
Selon les spécialistes de l’exil fiscal, les demandes de Français désireux de s’installer en Suisse augmentent depuis plusieurs mois, non seulement en raison des incertitudes soulevées par l’élection présidentielle, mais aussi depuis la fin du bouclier fiscal et l’aggravation de la crise dans la zone euro.
“Il y a un grand intérêt pour la Suisse romande”, la partie francophone du pays, souligne le président du Cercle d’affaires franco-suisse Martin Herb, précisant que les Français y retrouvent une culture similaire avec une même langue.
L’intérêt actuel pour la Suisse n’est cependant pas comparable à celui observé lors de la victoire de François Mitterand à la présidentielle, une vague de Français ayant alors franchi la frontière, nuance M. Micheloud.
“En 1981, il y avait une peur liée au nouveau gouvernement” socialiste comprenant des ministres communistes et en raison des nationalisations, rappelle-t-il.
Selon ce spécialiste du conseil fiscal, “aujourd’hui, c’est un peu différent. Beaucoup de gens hésitent encore et regardent ce qui va se passer après les élections”.
Depuis plusieurs années, le petit voisin helvétique est néanmoins devenu une terre de prédilection pour les candidats à l’exil, à côté de destinations comme la Belgique ou les îles anglo-normandes.
Patrie d’accueil pour sportifs, artistes et patrons
L’attrait de la Suisse aux yeux des étrangers tient surtout au forfait fiscal négocié directement avec le fisc et qui n’est pas calculé sur la fortune ou les revenus, mais sur les dépenses et le train de vie. Ce système permet aux grosses fortunes de faire des économies substantielles comparé à la fiscalité française.
La Suisse a ainsi réussi à attirer de grandes fortunes familiales comme la famille Peugeot et Taittinger, des sportifs dont Alain Prost et Amélie Mauresmo, ainsi que des artistes comme le chanteur Johnny Hallyday, selon le magazine helvétique Bilan.
Le patrimoine des 37 familles françaises les plus riches établies en Suisse a été évalué à 31,3 milliards de francs suisses (26 milliards d’euros) par le bimensuel Bilan, qui établit chaque année un classement des grandes fortunes.
Actuellement 5.445 étrangers, toutes nationalités confondues profitent du forfait fiscal. Sur ce nombre, il faut compter entre 1.500 et 2.000 Français, selon un avocat genevois, qui estime par expérience qu’il faut un patrimoine de 5 à 6 millions d’euros minimum, pour que le déménagement en vaille la peine.
Ce qui compte, pour la majorités des exilés, c’est la stabilité fiscale et politique, soulignent les spécialistes.
Pour les revenus moyens, “on paie plus d’impôts en Suisse qu’en France”, prévient M. Henry.
Plus que la couleur politique du prochain locataire de l’Elysée, la situation économique de la France est au coeur des préoccupations et motive les candidats à l’exil. “Que le gouvernement soit de gauche ou de droite, la France a des problèmes financiers et mes clients pensent que les charges vont augmenter”, souligne le patron de HTI.
Un avis partagé par son homologue François Micheloud, selon lequel “l’Etat français devra trouver une solution pour résoudre le déficit et tous (ses clients) concluent que les riches vont payer”.