3) La nécessaire réforme de la fiscalité du travail
On reconnait de plus en plus que l’économie tunisienne
bute aujourd’hui sur un
vrai problème fiscal en témoigne les distorsions liées à l’impôt sur le revenu.
En effet, les salariés ont vu leur charge fiscale aggravée du fait que les
tranches du barème des impôts sur le revenu des personnes physiques n’ont pas
été actualisées depuis 1989 et que les montants des déductions pour salaire
unique, enfants et parents à charge n’ont pas été révisés depuis 1983. Or, la
prise en considération de l’inflation aurait élargi les tranches de revenu et
aurait permis l’exonération de l’impôt sur le revenu de certaines catégories
sociales et en aurait fait bénéficier d’autres de réductions.
Concrètement, la non actualisation des tranches et des déductions et les
augmentations annuelles au niveau des salaires a conduit à l’imposition des
personnes touchant le
SMIG alors qu’ils étaient non imposables en 1990 (On
notera que pour neutraliser les effets de cette mesure, il a été décidé
d’accorder une déduction supplémentaire de 500 dinars aux salariés payés au
SMIG.).
Tableau 2 : Indexation des tranches du barème sur l’inflation
Ainsi, en 1990, un salarié touchant le SMIG ne payait pas d’impôts sur le revenu
car il se plaçait dans la première tranche du barème. Or, l’inflation fait que
1500 dinars perçus en 1990 sont équivalents à environ 3.500 dinars perçus en
2010. De ce fait, la prise en considération de l’inflation aurait élargi la
première tranche de 0-1500 D à 0- 3500 D et aurait évité à ces salariés de payer
des impôts en les faisant sortir des tranches imposables.
D’autre part, l’indexation des montants des réductions pour salaire unique et
enfants à charge, en vigueur depuis 1983, aurait également permis d’obtenir
d’importantes baisses des impôts payés.
Tableau 3 : Indexation des déductions sur l’inflation
Le tableau ci-dessus montre que l’indexation de ces montants sur l’inflation
aurait permis de déduire 600 et 360 dinars, au lieu de 150 et 90 dinars, de la
base imposable d’un contribuable avec salaire unique et un enfant à charge.
De même, si on prend comme exemple un ménage tunisien type, mono-actif ayant
deux enfants, dont le revenu annuel brut, est de 9500 D, par exemple, celui-ci
paie, selon le barème actuel, un impôt sur la base de 15% sur la tranche
1500-5000 D et de 20% sur la tranche 5000-10000 D, soit l’équivalent de 1115D.
Une indexation des tranches d’impôt et des montants des réductions pour salaire
unique et enfants à charge sur l’inflation l’aurait placé dans la tranche allant
de 3500 à 10000 D. Il en résulterait un impôt de 582 D seulement (15% sur la
tranche 3500-10000), soit un gain annuel d’environ 533D ou encore l’équivalent
d’environ 45 D/mois. Ceci permettrait donc de faire baisser la pression fiscale
d’environ 6 points de pourcentage.
Tableau 4 : Simulation pour un couple salarié mono-actif ayant deux enfants
Partant donc du principe que l’imposition ne peut toucher que l’excédent du
revenu par rapport au minimum vital, il en résulte, qu’à moins de risque de
création de tensions sociales, toute personne dont le revenu est en dessous de
ce minimum ne devrait pas subir une imposition au titre de son revenu. Dans
cette perspective, nous pouvons avancer les recommandations suivantes:
– Dans la mesure où le barème et les déductions n’ont pas été révisés, il est
recommandé de procéder d’une manière périodique à l’actualisation du barème et
des déductions. Ceux-ci doivent être indexés sur l’inflation. Dans ce même
contexte on pourrait imaginer une augmentation du nombre de tranches et donc des
taux d’imposition par palier de 5%.