Le verdict du premier tour pourrait bien tomber avant le traditionnel JT de 20H00

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ée (Photo : Boris Horvat)

[19/04/2012 06:09:00] PARIS (AFP) Le sacro-saint rendez-vous de 20H00 devant les télévisions pour connaître les estimations des résultats de la présidentielle risque d’avoir du plomb dans l’aile: à l’heure d’internet et des réseaux sociaux, des médias envisagent de violer la loi et de tirer dès 18H30.

Jusqu’à présent, aux précédents scrutins, les médias français ont tous respecté la loi qui, sous peine d’amende, interdit de faire mention avant 20H00, quand les derniers bureaux ferment, de tout sondage sortie des urnes ou des estimations compilées après la fermeture des premiers bureaux à 18H00.

Bien sûr, avec l’avènement d’internet dans les années 2000, des sites étrangers ainsi que des blogs plus ou moins confidentiels avaient “fuité” en 2007 quelques estimations ou fait allusion à des tendances.

Mais l’arrivée des réseaux sociaux, avec les millions de comptes Twitter et Facebook, a bouleversé la donne et, pour la première fois, un journal français, Libération, a clairement annoncé qu’il n’hésiterait pas à violer cet embargo “de plus en plus archaïque”.

Libération “se réserve le droit” de publier sur son site internet les estimations dès 18H30, “si l’écart est net et les sources fiables”, a déclaré à l’AFP Nicolas Demorand, directeur de la rédaction.

Pour lui, la loi représente “un vrai problème démocratique” dans la mesure où “le monde des médias, de la politique et leurs amis sont informés avant” les électeurs.

Beaucoup de journaux et sites français s’interrogent encore sur la politique à tenir. L’Agence France-Presse “se pose les mêmes questions que beaucoup d’autres médias et fera connaître sa position vendredi”, a indiqué son directeur de l’Information Philippe Massonnet.

C’est aussi vendredi que la Commission des Sondages dévoilera son “dispositif” anti-fraude.

-“brise-glace”-

Mais Nicolas Demorand assure que la décision de son journal ne dépendra pas de l’attitude des autres : “S’il faut que Libé ait le rôle de brise-glace, on le fera. Tous les scénarios restent possibles (…) Ce qui fera qu’on publie ou pas (ces estimations) dépendra uniquement de la qualité de ce qu’on aura”, dit-il.

Jusqu’à présent, les autres rédactions des médias généralistes grand public interrogées par l’AFP ont toutes assuré qu’elles entendaient respecter le code électoral et attendre 20H00.

Beaucoup de chaînes ou radios y sont d’autant plus enclines qu’elles ont souvent conclu à grands frais des accords avec des instituts de sondage pour des estimations exclusives.

Et les spots publicitaires qui précèdent le fameux 20H00, suivis par des millions de Français attendant les résultats, sont de précieuses pépites.

Cette attitude vertueuse affichée par les grands médias résistera-t-elle dimanche à l’épreuve de la réalité ?

D’ores et déjà, la Radio-télé francophone publique belge RTBF, le journal Le Soir de Bruxelles, mais aussi la Radio-Télévision suisse (RTS) ou le site de Lausanne 20minutes.ch, hors d’atteinte des foudres de la loi française, ont annoncé qu’ils publieraient les estimations avant 20H00, prévoyant même un afflux de visiteurs français sur leurs sites.

Et Twitter, inexistant en 2007, aura vite fait d’inonder la toile: comment contrôler les comptes de tous les journalistes, des membres des états-majors des partis, etc ?

Cela risque de ne pas être facile non plus pour les hommes politiques : impossible théoriquement pour eux de commenter des résultats illégaux.

Pourtant, si l’on en croit un récent sondage, les Français restent attachés à ce rendez-vous du 20H00, souvent l’occasion de soirées entre amis ou famille pour commenter et zapper: 64% d’entre eux considèrent comme “une mauvaise chose” une éventuelle rupture de l’embargo.