Le ciel se couvre sur le secteur de l’énergie solaire

photo_1335249766843-1-1.jpg
ère, le 12 janvier 2012 (Photo : Jean-Philippe Ksiazek)

[24/04/2012 06:53:58] PARIS (AFP) De Photowatt en France à First Solar en Allemagne, l’industrie de l’énergie solaire accumule les déboires, surtout en Europe où les fabricants de panneaux subissent des surcapacités criantes, conjuguées à une révision à la baisse des aides gouvernementales.

“Le marché a explosé au cours des trois dernières années d’une manière qui était difficilement soutenable sur le long terme”, explique à l’AFP Gaëtan Masson, chef économiste de l’EPIA, l’Association européenne des industriels du photovoltaïque.

Ainsi, l’an dernier, près de 28 gigawatts de panneaux solaires ont été installés dans le monde, dont près de 22 gigawatts en Europe (près du double de l’année précédente), l’Italie et l’Allemagne se taillant la part du lion.

Mais les gouvernements européens, qui avaient largement alimenté cette croissance effrénée en accordant des tarifs de rachat très favorables pour l’électricité produite à partir du soleil, dans un but environnemental, sont en train de briser tour à tour cet emballement, débordés par le succès de leurs régimes d’aide.

L’Italie a ainsi revu à la baisse ce-mois ci son dispositif de soutien au solaire, après la France, l’Allemagne, l’Espagne et au Royaume-Uni, qui ont déjà raboté ou suspendu leurs mesures incitatives.

Parallèlement, la capacité mondiale de fabrication de panneaux solaire a atteint 55 gigawatts en 2011, soit près du double de la demande totale, faisant chuter les prix de vente.

Résultat, “cela conduit un certain nombre d’acteurs à se demander s’ils peuvent continuer à produire”, et “on commence à assister à une série de fermetures, de faillites, et de gels de capacités de production”, résume M. Masson.

“Une phase normale et salutaire”

“Le marché est entré dans une phase de maturation à la fois normale et salutaire, sachant qu’il ne peut continuer à croître de manière exponentielle”, et à dépendre éternellement de régimes d’aide, abonde Jean-Yves Lindheimer, qui dirige les activités françaises du géant chinois Suntech, premier fabricant mondial de panneaux solaires.

Selon lui, “la baisse plus brutale qu’attendu des tarifs de rachat en Europe pose des problèmes de stratégie et de financement à certaines entreprises, mais cela va permettre un assainissement global du secteur, et faire ressortir les sociétés qui font des efforts de recherche et développement, qui leur permettent ensuite d’abaisser leurs coûts de production”.

Le coup de frein brutal en Europe commence à avoir des répercussions mondiales. La semaine dernière, SunPower, filiale de Total basée aux Etats-Unis, a annoncé la fermeture d’une usine aux Philippines, dans le cadre d’un programme de réduction de ses coûts. Et l’américain First Solar, en plus de fermer son usine allemande de Francfort, va suspendre quatre lignes de production à Kulim, en Malaisie.

Dans ce contexte, les fabricants asiatiques sont souvent accusés de faire du dumping au détriment de leurs rivaux occidentaux. Des reproches rejetés en bloc par le patron de Suntech France.

Selon lui, les industriels chinois sont financés à des taux comparables à ceux pratiqués en Europe (4 à 5% par an), bien au-dessus des à 1 à 2% dont avait bénéficié le groupe américain Solyndra grâce au soutien de Washington. Au final, les bas prix des industriels asiatiques sont liés, assure-t-il, à des innovations technologiques et des “effets de taille”, qui leur permettent de produire à moindre coût.

“Si toutes nos lignes de fabrication sont en Chine (excepté pour les Etats-Unis), l’essentiel de l’équipement de production et certaines matières premières utilisées (silicium, verre…) sont européens”, relève-t-il également, ajoutant que la conception, l’installation et la maintenance des panneaux créent au bout du compte plus d’emplois dans les pays de destination que leur fabrication, elle-même très automatisée.