L’Autorité de la concurrence très active sur les produits de grande consommation

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endives (Photo : MICHAEL URBAN)

[24/04/2012 07:50:25] PARIS (AFP) Sanctions pour ententes sur les endives, les farines ou les croquettes animales, enquêtes sur de possibles cartels dans les yaourts ou le porc: depuis le début 2012, l’Autorité de la concurrence multiplie les actions sur les produits de grande consommation.

En mars, elle a infligé plusieurs amendes pour des ententes sur les prix: 3,6 millions d’euros pour dix organisations de producteurs d’endives, 35,3 millions d’euros pour les trois principaux fabricants de croquettes pour chiens et chats, 242,4 millions d’euros pour les principaux producteurs de farine français et allemands.

En décembre 2011, elle avait déjà sanctionné trois membres d’un cartel des lessives à une amende de 361 millions, tandis que le quatrième fabricant a échappé à la sanction en dénonçant l’entente, via une procédure de clémence.

Au-delà de ces sanctions publiques, des fuites sont intervenues sur des enquêtes en cours, que l’Autorité ne commente pas, sur de possibles ententes sur les yaourts et le porc.

“C’est forcément le signe d’une vigilance accrue, un signal extrêmement fort vis-à-vis du marché”, estime Yves Marin, consultant à Kurt Salmon.

Le président “Bruno Lasserre a introduit beaucoup de dynamique dans le fonctionnement de l’Autorité”, relève Alain Bazot, président de l’association de consommateurs UFC-Que Choisir, évoquant une “volonté d’aller sur les terrains qui auront un impact peut-être sur le pouvoir d’achat”.

“La concomitance de ces décisions tient effectivement plus au hasard du calendrier”, explique Bruno Lasserre à l’AFP. “Nous avons ouvert des enquêtes dans le secteur agro-alimentaire et pour des raisons tout simplement de délais (…) nous avons rendu ces décisions dans une période assez rapprochée”.

“Ce qui n’est pas le fruit du hasard, c’est, de manière plus générale, la forte activité de l’Autorité de la concurrence”, souligne-t-il.

Procédure de clémence

Car la transformation du Conseil de la concurrence en Autorité en 2009, lui a donné de nouveaux outils. “Nous pouvons beaucoup plus qu’avant choisir nos sujets, et investir sur les sujets qui nous paraissent importants pour le pouvoir d’achat des Français, pour la compétitivité de notre économie”, explique-t-il. L’Autorité s’est ainsi auto-saisie sur l’entretien automobile et les pièces détachées, ou encore sur l’e-commerce.

Par ailleurs, les entreprises savent maintenant utiliser la procédure de clémence, et il y a “un effet boule de neige”, confirme-t-il. “Quand elles voient des entreprises échapper à des sanctions” pouvant atteindre des centaines de millions d’euros, “elles se disent: +Pourquoi pas moi ?+”

L’Autorité accède ainsi à des informations secrètes, que les entreprises protègent de plus en plus, par exemple en fournissant à des cadres des téléphones mobiles pour communiquer avec leurs concurrents, stockés à leur domicile.

La clémence a aussi un rôle dissuasif, les entreprises qui envisageraient un cartel se sachant à la merci de la trahison d’un concurrent.

Certaines procédures sont “initiées lors de changements d’actionnaires ou de dirigeants”, précise M. Lasserre.

“Pas mal” d’autres procédures sont en cours, indique-t-il. “Nous sommes actifs et nous continuerons de l’être. Et donc nous sortirons des décisions cette année et l’année prochaine”, prévient-t-il.

Le Conseil, ancêtre de l’Autorité, avait déjà “tapé un grand coup sur la table” en 2005 en sanctionnant une entente dans la téléphonie mobile par des amendes de 534 millions d’euros, rappelle Alain Bazot.

Cette politique “rend le droit de le concurrence un peu plus effectif en termes de dissuasion, mais on est encore loin du compte, d’autant que les consommateurs ne peuvent pas être indemnisés” pour le préjudice subi, en l’absence d’action de groupe, déplore le président de l’UFC-Que Choisir.