I- Contexte et problématique
Le déclenchement de la
révolution du 14 janvier et l’incapacité des pouvoirs
publics à atténuer les pressions sur le marché du travail ont remis sur la
sellette la problématique de l’efficacité des politiques déployées par l’Etat en
vue de promouvoir l’entrepreneuriat, l’auto-emploi et la création des microentreprises dans les régions défavorisées.
Des mécanismes de financement idoines, à l’instar de la BTS (Banque tunisienne
de solidarité) et de la BFPME (Banque de financement des PME) ont été mis en
place, outre le rôle joué par les structures d’appui au niveau des régions dans
l’accompagnement et le suivi des jeunes promoteurs.
Toutefois, les politiques d’incitation en oeuvre, la panoplie des mesures prises
dans le cadre des politiques actives d’emploi et la multitude d’instruments de
financement disponibles se sont avérées relativement inefficaces. L’intensité
entrepreneuriale demeure toujours faible notamment dans les régions de
l’intérieur contrairement aux niveaux enregistrés dans les zones littorales, et
le chômage continue de pointer à des niveaux sans précédent.
Ce constat devient d’autant plus préoccupant que la répartition du tissu
industriel à travers les différents gouvernorats démontre une quasi-absence
d’industrie formelle structurante dans certains gouvernorats défavorisés,
particulièrement Le Kef, Tataouine, Siliana, Kébili, Sidi Bouzid et Kasserine.
Les taux de densité économique jugés faibles sont le plus souvent corollaires de
territoires à court de capacités de développement autonome, et c’est le cas de
la majeure partie des gouvernorats défavorisés en Tunisie dont les économies
résidentielles se trouvent amputées de véritables leviers de développement.
Dans ce contexte, il convient d’évaluer l’efficacité du dispositif de promotion
de l’entrepreneuriat en partant du constat de l’hétérogénéité des taux de survie
des
microentreprises au niveau des gouvernorats.
En effet, l’idée centrale de cette recherche consiste à analyser l’impact des
spécificités structurelles du territoire d’implantation sur la démographie des
microentreprises.
Il s’agit aussi d’explorer dans quelle mesure l’existence d’un tissu consistant
de moyennes et de grandes entreprises dans un espace économique déterminé permet
de solvabiliser la demande au niveau local et de favoriser, par conséquent,
l’entrepreneuriat et notamment la survie des microentreprises.
A vrai dire, les déterminants structurels de la démographie des microentreprises
et de surcroît leur propension à la croissance sont des éléments d’une
importance cruciale pour l’appréhension de l’impact à moyen et long termes de la
création des microentreprises sur l’emploi. Les disparités dans les trajectoires
de croissance des microentreprises renvoient à des déterminants multiples:
taille du marché local, tissu industriel local, compétitivité des entreprises,
spécialisation régionale ou locale, main-d’œuvre locale et qualifications…
C’est sur la base de ce diagnostic qu’on essayera de ressortir les raisons
profondes de l’échec des politiques actuelles à impulser une dynamique vertueuse
de création de microentreprises et de
PME pérennes, locomotives de la croissance
et de l’emploi dans les régions de l’intérieur.
Cette recherche se propose aussi d’apporter des éclairages et des
recommandations pratiques sur la nécessaire territorialisation des politiques de
soutien au secteur privé (Promotion de la création des entreprises, financement
bancaire et capital risque, politique d’incitation…), politiques actives de
l’emploi et de la mise en place d’une stratégie d’émergence industrielle dans
certains gouvernorats défavorisés.
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*Etude IACE
(A suivre : II- Caractéristiques des tissus productifs locaux : Un dualisme
horizontal/vertical et des écarts saillants entre deux groupes de gouvernorats)