Le chômage revient comme un boomerang dans la campagne

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à Paris (Photo : Kenzo Tribouillard)

[25/04/2012 10:11:35] PARIS (AFP) Avec un Front national arbitre du second tour, qui a dragué les votes populaires et précaires, l’emploi et le chômage sont revenus au premier plan dans la course présidentielle, dont l’entre-deux tours sera marqué jeudi par la publication des chiffres des demandeurs d’emploi.

Depuis dimanche, les thèmes sociaux se sont imposés. François Hollande a promis de nouveau mardi qu’il “inversera la courbe du chômage” et répète que son rival UMP est “le candidat du vrai chômage”.

Une réponse à Nicolas Sarkozy qui a appelé lundi “ceux qui travaillent dur” et “ne veulent plus que quand on ne travaille pas, on puisse gagner plus que quand on travaille” à se rassembler le 1er mai pour fêter “le vrai travail”.

Le président-candidat provoque les syndicats sur leur terrain et “attaque les chômeurs qui seraient des assistés”, s’est indignée mercredi l’association de chômeurs Apeis en renvoyant à Nicolas Sarkozy son “bilan”: “5 années de casse et de recul sociaux”.

Cinq ans et une crise plus tard, le taux de chômage devrait frôler les 10% au premier semestre 2012, à 9,7% en France métropolitaine, selon les prévisions de l’Insee. Près de 730.000 demandeurs d’emploi supplémentaires y sont d’ores et déjà dénombrés.

A moins d’un boom des emplois aidés, les derniers chiffres du quinquennat, ceux de mars, ne devraient pas inverser la tendance, selon des économistes interrogés par l’AFP.

En février, 2,867 millions de demandeurs d’emploi sans aucune activité pointaient à Pôle emploi, 4,278 millions de personnes si on inclut les travailleurs précaires. A ce niveau, inégalé depuis douze ans, la lutte contre le chômage a été le premier déterminant du choix des électeurs en général, 50% d’entre eux plaçant cette thématique en tête, selon un sondage TNS-Sofres réalisé dimanche.

Même si l’électorat frontiste place la lutte contre l’immigration clandestine (50%) juste devant celle contre le chômage (46%), les scores du FN montrent une corrélation.

Ainsi, dans 34 des 55 départements où Marine Le Pen a réalisé un score supérieur à 17,9% (moyenne du FN), le taux de chômage était supérieur à sa moyenne (9,4%) du 4e trimestre 2011, en métropole.

En proposant notamment un coup de pouce aux bas-salaires et la priorité des offres d’emploi aux Français, “Marine Le Pen a su s’adresser aux gens de la précarité — chômeurs, personnes aux minima sociaux, ouvriers et employés au bas de l’échelle — avec un langage accessible”, observe Janine Mossuz-Lavau, directrice de recherche au Cevipof (centre de recherche de Sciences-Po).

Elle a séduit 35% des ouvriers, contre 25% pour François Hollande, 15% pour Nicolas Sarkozy, selon TNS-Sofres. La politologue souligne que “pour la première fois, les femmes ont presque autant voté que les hommes pour le Front national”, rappelant qu’elles “représentent 80% des travailleurs pauvres et à temps partiel”.

La question des précaires “a été particulièrement mal traitée ou inaudible”, phagocytée par des “sujets de diversion”, comme “halal, permis de conduire”, observe Michel Abhervé, économiste, professeur à Marne-la-Vallée. “On comprend parfaitement pourquoi Nicolas Sarkozy, avec son bilan, en a si peu parlé”, observe l’économiste, “mais François Hollande lui-même n’en a pas fait le coeur de son combat”, poursuit M. Abhervé, “sans doute par prudence compte tenu des marges financières” du prochain président.

Pour lui, le leader du Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon, est également passé à côté “en centrant son discours sur un relèvement du Smic mensuel alors que le vrai problème est la masse de gens qui n’ont pas la possibilité de travailler 35 heures par semaine pour avoir un salaire plein”.