à Toulouse, le 3 mai 2012 (Photo : Eric Cabanis) |
[06/05/2012 18:10:29] PARIS (AFP) Le nouveau président élu français, François Hollande, va vite devoir engager d’âpres négociations avec ses partenaires européens, Allemagne en tête, s’il veut atteindre son objectif de “renégocier” le pacte de discipline budgétaire pour y ajouter un “volet croissance”.
La passation de pouvoirs avec Nicolas Sarkozy aura lieu au plus tard le 15 mai. Sans attendre, M. Hollande devrait avoir dès dimanche soir un échange avec la chancelière Angela Merkel, selon son conseiller spécial Jean-Marc Ayrault.
“Il y a là la clé du redressement de l’Europe, de la réorientation de l’Europe dans le sens de la croissance, dans le sens de la compétitivité, de la protection”, a déclaré le député-maire socialiste de Nantes, dont le nom est pressenti pour Matignon.
Berlin s’est de son côté dit dès dimanche prêt à agir en ce sens. “Nous allons nous mettre rapidement au travail pour ajouter au traité budgétaire un pacte de croissance pour plus de compétitivité”, a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, à la presse allemande.
L’équipe de François Hollande entend mettre en musique dans les prochains jours la promesse emblématique du nouvel élu, via des “consultations” avec les capitales. Objectif: parachever le “mémorandum” sur un “pacte de croissance” pour le transmettre aux partenaires avant la fin du mois.
Dès son entrée en fonction, François Hollande ira rencontrer Mme Merkel pour préparer la réunion informelle des dirigeants de l’Union européenne prévue fin mai ou début juin, puis le sommet des 28 et 29 juin, consacré à la croissance.
Pour Angela Merkel, il n’est pas question de remettre sur le métier le traité budgétaire, signé début mars par 25 Etats de l’UE et déjà ratifié par certains d’entre eux.
C’est toute l’ambiguïté de François Hollande, qui a tour à tour promis de “renégocier” ou de “compléter” ce traité par des mesures censées doper la croissance. Reste à savoir sur lequel de ces termes l’accent sera mis.
“En réalité, les règles de discipline budgétaire nous conviennent globalement”, assure à l’AFP un proche du futur chef de l’Etat. “On ratifiera le traité, à condition de l’inclure dans un paquet équilibré avec un vrai volet croissance”, ajoute-t-il.
Selon un autre proche, Berlin sait à quoi s’en tenir: à défaut de contacts directs avec la chancellerie, “l’ambassade d’Allemagne à Paris a fait le travail pour comprendre nos positions”.
François Hollande se montre confiant d’avoir déjà fait bouger les lignes: les uns après les autres, les dirigeants européens font désormais de la croissance une priorité, même si leurs recettes diffèrent parfois des siennes.
“L’impression générale c’est que, malgré des désaccords, il est possible de discuter” avec les Allemands, affirme à l’AFP Karine Berger, membre de l’équipe de l’ex-candidat socialiste qui s’est rendue récemment auprès des milieux économiques et financiers outre-Rhin. Pour elle, “les points avancés par François Hollande sont très pragmatiques, il s’agit de lancer des projets favorisant la croissance”.
De fait, les quatre axes de son “mémorandum” semblent avoir été retenus dans un esprit de compromis. Il s’agit de financer des investissements dans les infrastructures, les énergies nouvelles ou l’industrie, par plusieurs biais: emprunts européens ad hoc, capacité de financement renforcée de la Banque européenne d’investissement, mobilisation des fonds structurels inutilisés et taxe européenne sur les transactions financières.
Ces propositions, en souffrance à Bruxelles, “pourraient bénéficier d’un nouvel élan avec l’élection de Hollande”, estime un diplomate européen.
“Le problème le plus complexe, c’est la forme juridique que devront prendre ces projets”, estime-t-on dans l’entourage du président élu. Difficile pour lui de se contenter d’une déclaration d’intentions ou d’un protocole non contraignant. “Les incertitudes devront être levées le plus rapidement possible, y compris pour rassurer les marchés”, glisse-t-on de même source.
D’autres points controversés pourront ressurgir par la suite. François Hollande n’a pas totalement écarté l’idée de conférer un rôle accru à la Banque centrale européenne ou de mutualiser les dettes via des euro-obligations, deux projets dont Berlin refuse d’entendre parler.