Tunisie : Une quarantaine de dossiers de corruption inspectés au ministère de l’Agriculture

m-agriculture-050512.jpgPour Mohamed Ben Salem, ministre de l’Agriculture, le dossier de la corruption est une priorité absolue pour son département afin de l’assainir et lui rendre son rôle primordiale dans l’économie nationale. Etant donné qu’une quarantaine de dossiers ont été recensés jusque-là, et concernent des dépassements administratifs, financiers et techniques.

Depuis janvier 2012 jusqu’à fin avril 2012, 27 dossiers ont été identifiés et sont actuellement traités par l’Inspection générale de l’agriculture. Le ministre affirme que des dispositions administratives ont été prises dans une quinzaine de dossiers moins graves, et ayant trait à des cessations de fonction, à la transmission au conseil de discipline, la permutation d’une région à une autre, etc. Quant aux dossiers lourds, ils ont été transmis à la Cour de discipline financière ou aux tribunaux (une dizaine).

Plusieurs requêtes…

Selon Rabeh Bou Askar, inspecteur général au ministère de l’Agriculture, les dossiers parviennent sous forme de requêtes et pour certains par le biais de lettres anonymes. «Notre rôle, en tant qu’Inspection générale de l’agriculture, est de faire les investigations nécessaires sur la véracité de ces requêtes et de prendre les dispositions nécessaires. Il y a des personnes qui ont été acquittées parce que nous n’avons pas trouvé des preuves sur des dépassements», affirme-t-il. Certains ont également été transmis par la Commission d’investigation sur les abus et les violations…

M. Ben Salem a également fait état de gaspillage de l’argent public. La Société tunisienne d’amélioration des chevaux a subi des pertes de 12.000 dinars, avec des dettes qui s’élèvent à 62.000e dinars qui n’ont pas été couvertes. On indique aussi qu’elle n’adopte pas le principe de la concurrence et traite avec un seul fournisseur. Son dossier a été transmis à la Cour de discipline financière.

Un autre exemple: la Direction générale des forêts, dont la mauvaise gestion a concerné 6,5 million de dinars. De même, il y a eu l’achat d’équipements qui n’ont pas bénéficié à cette direction mais à des personnalités de l’ancien pouvoir. La secrétaire de l’ancien directeur général disposait d’une voiture de service avec chauffeur et effectuait des missions à l’étranger. Pour la même direction, il y a eu un prélèvement de 2,5 millions de dinars du budget d’un projet japonais à Kasserine, Siliana et Le Kef, qui ont é été transmis à la présidence de la République.

Faillite financière…

Pour la Société de la coopérative centrale des grandes agricultures, elle a connu la faillite financière à plus d’une reprise, mais son personnel bénéficie d’avantages financiers très importants (17ème et 18ème mois, 500 mille dinars pour les membres du conseil d’administration). Du coup, le ministre a indiqué que plusieurs décisions ont été prises, à savoir la dissolution du conseil d’administration, la mise en place d’un comité administratif provisoire et «une purification sociale» à travers la réduction du nombre des employés qui constituent une charge lourde pour l’entreprise.

La Direction générale de protection et de contrôle de la qualité des produits agricoles a, elle aussi, connu des dérives, notamment le détournement de 81.000 dinars par un magasinier. Une affaire qui n’a pas été relevée par le staff administratif. L’Inspection générale est en train d’effectuer des investigations sur les parties concernées par cette affaire.

Mais encore ! Une autre affaire, qu’on peut qualifier de drôle, est celle de la Société Tunisienne des Poulaillers. La directrice général de cette entreprise s’est attribuée à elle seule une augmentation de salaire de mille dinars, sous prétexte que le ministère n’a pas répondu positivement à sa demande. Ajoutons à cela que la société a des dettes à la charge d’un responsable à l’Union Tunisienne de l’Agriculture et de la Pêche.

La corruption financière a concerné également le cabinet du ministre lui-même, des secrétaires bénéficiaient d’heures supplémentaires de 500 dinars par mois, payés non pas par le ministère de l’Agriculture, mais par la SONEDE et l’Office Nationale de l’Huile. Et même un chauffeur bénéficiait de 895 dinars mensuels d’heures supplémentaires.

Décisions…

Des voitures de services ont également été exploitées à des fins personnelles. La décision a été prise de réduire leur nombre à quatre contre huit auparavant ainsi que de garder toutes les voitures au parc du ministère. Ceci a permis, selon le ministre, de réduire la consommation de carburant de 2.160 litres à 540 litres par mois. «Cette décision sera généralisée à toutes les administrations centrales», promet-il.

Il faut dire que la tâche est énorme. Le ministère de l’Agriculture compte environ 170 administrations qui relèvent de sa tutelle. Ce qui fait que le nombre de requêtes qui parviennent, quotidiennement, à l’Inspection générale est très nombreux.

On estime le volume total des dépassements financiers à près de 10 millions de dinars. Pourtant, M. Bou Askar indique que ce qui compte ce n’est pas la valeur de la corruption mais son volume. «Il faudra que les gens sachent que la corruption a touché tous les domaines et qu’il faut la combattre à tous les niveaux», ajoute-t-il. C’est qui fait à M. Bou Askar que le traitement des dossiers de corruption prendra des années pour être réglé.