La bourse de Madrid (Photo : Dominique Faget) |
[11/05/2012 04:32:13] MADRID (AFP) Le gouvernement espagnol dévoile vendredi une nouvelle réforme du secteur bancaire, qui devra enfin faire toute la lumière sur son patrimoine immobilier, avec l’espoir d’apaiser les marchés, deux jours après avoir dû voler au secours de Bankia.
En chahutant la Bourse madrilène cette semaine, la faisant retomber à des niveaux jamais vus depuis neuf ans, les investisseurs ont transmis un message clair: ils ne croient toujours pas aux chiffres présentés par les banques espagnoles et craignent que les actifs immobiliers qu’elles ont accumulés pendant la bulle ne valent désormais plus grand-chose.
Celles-ci croulent sous 184 milliards d’euros d’actifs “problématiques”, car à la valeur incertaine (logements saisis, crédits difficilement remboursables), soit 60% de leur portefeuille.
“Le sentiment général est que la situation des banques espagnoles est pire que ce que l’on croyait auparavant”, explique Edward Hugh, économiste indépendant installé à Barcelone, “et nous sommes encore loin de reconnaître la vraie ampleur des pertes” causées par l’immobilier.
D’où le premier volet de la réforme: séparer ces actifs des bilans des banques, pour plus de clarté et pour les valoriser correctement, en tenant compte du marché espagnol sinistré.
“Ce que nous voulons, c’est que l’on fixe le prix réel des logements (détenus par les banques), même si tout le monde perd de l’argent, les promoteurs comme les banques, et qu’on les mette en vente”, a expliqué lundi le chef du gouvernement conservateur, Mariano Rajoy.
Ce qui amène au second volet: “il y aura de nouvelles provisions” que le secteur devra effectuer pour se protéger face aux possibles pertes, a indiqué le ministère de l’Economie.
Selon la presse, celles-ci devraient atteindre 35 milliards d’euros, qui s’ajouteront aux 53,8 milliards déjà imposées au secteur.
Cette réforme survient deux jours après une nouvelle intervention publique dans une banque, la huitième depuis l’éclatement de la bulle en 2008: cette fois, il s’agissait de sauver Bankia, plus grande union de caisses d’épargne et quatrième banque cotée du pays, qui croule sous les actifs immobiliers risqués (31,8 milliards d’euros).
L’opération consiste à transformer en participation les 4,465 milliards de dette contractée en 2010 auprès du fonds d’aide public au secteur financier (Frob) par l’actionnaire qui chapeaute Bankia, Banco Financiero y de Ahorros (BFA).
Ainsi, “le Frob détiendra indirectement 45% du capital de Bankia, c’est-à-dire qu’il en prendra le contrôle”, a précisé le ministère de l’Economie, tandis que, selon les médias, d’autres fonds publics seront ajoutés, ce qui fera une aide de 7 à 10 milliards au total.
La banque doit désormais “présenter dans les plus brefs délais un plan renforcé d’assainissement qui mettra BFA-Bankia en position d’affronter son avenir avec une garantie totale” de solvabilité, a ajouté la Banque d’Espagne.
Madrid, qui a déjà prêté au secteur bancaire plus de 15 milliards d’euros, refusait jusque-là de remettre la main à la poche, mais a dû s’y résoudre devant les tensions croissantes sur les marchés.
Le FMI lui-même avait mis en garde le pays, l’appelant à aller plus loin dans l’assainissement des banques pour “remédier aux faiblesses qui demeurent”.
Standard and Poor’s, en dégradant de deux crans la note souveraine le 26 avril, avait de son côté prédit “une probabilité croissante que l’Etat espagnol doive fournir un soutien budgétaire supplémentaire au secteur bancaire”, craignant que cela ne menace le déficit public du pays.
Mariano Rajoy promet lui que cela ne menacera pas la rigueur budgétaire qu’il défend: “cela n’affectera pas le déficit public”, qui doit passer de 8,51% du PIB en 2011 à 5,3% cette année.