Une information a circulé sur les réseaux et dans certains journaux tunisiens qui prétend que des touristes ont été pris à parti par des salafistes à Sejnane. Après vérification, il s’avère que ce ne sont que des «touristes tunisiens»! A part se réjouir sur le coup de cette information, cela ne pousse-t-il pas à se poser de véritables questions? Et si cela venait à arriver? Et si des touristes étaient vraiment pris à parti par des fous de Dieu créant un tors incommensurable au tourisme tunisien et au pays?
Si des touristes étaient attaqués par ce qu’on désigne comme “salafistes“, selon certains des délinquants, des fous qui insultent les femmes dans les marchés et quartiers et y sèment la violence au nom de Dieu, la destination serait-elle prête à gérer? Saura-t-elle affronter une crise pareille et répondre avec efficacité et doigté faute de ne pas être a priori capable de l’empêcher? Faut-il se contenter de se réjouir du fait que ce ne soient «que» des étudiantes tunisiennes qui ont été agressées à Sejnane en fin de la semaine écoulée pendant qu’un guide et deux ressortissants étrangers se faisaient agresser au Kef? La destination Tunisie serait-elle prête à répondre pour rassurer? Dispose-t-elle d’un plan de communication si pareils incidents venaient malencontreusement à produire?
Le gouvernement provisoire a des déboires avec sa propre communication. A-t-il les ressources et le réflexe de réfléchir, anticiper et arrêter des stratégies de communication précises en cas de “crise”? Il n’existe certes pas de modèle absolu pour gérer une crise, mais il est nécessaire de s’y préparer via des échanges d’expériences pour mettre en commun les enseignements tirés de situations vécues ailleurs.
Les crises sont souvent, par leur nature, imprévisibles. Il n’est donc pas possible de tout anticiper, mais il ne faut pas non plus adopter l’attitude inverse qui consisterait, au nom de l’imprévisible, à verser dans l’irrationnel, le «laisser faire». Ce serait adopter une stratégie de fuite.
Ne serait-il pas impératif de créer une cellule de réflexion sur le sujet? Tous les indicateurs tendent vers la forte probabilité de pareils incidents. La violence verbale autant que physique est de tous les jours et discours. Les médias, les politiques et les membres du gouvernement ne parlent que de violences, d’insultes, de guerre civile, de meurtre, de confrontation… Autant d’indicateurs annonciateurs de violences à venir? Ne faut-il pas en prendre de la bonne graine?
Avec les beaux jours qui viennent, les jupes vont se raccourcir, l’appel de la grande bleue va devenir insistant et le rythme de l’été avec ses balades et soirées va s’installer. Au delà des Tunisiens qui veulent vivre leur été de la manière qui leur semble, quel accueil sera fait aux touristes qui oseront quitter les circuits balisés que sont les zones touristiques où de toute manière des «yeux» agressifs scrutent n’importe quel «kofr» ou tabarej»?
La saison touristique pointe du nez et d’ores et déjà les terrasses des cafés, les «Beach clubs» et les discothèques se préparent à une saison qu’ils espèrent meilleure que celle de l’année écoulée. Ereintés par la crise qui frappe le tourisme tunisien, les opérateurs autant que les commençants et les citoyens qui louent leurs biens immobiliers, le temps d’une saison, aux Algériens notamment, se posent des questions: les touristes mitoyens viendront-ils ou pas? Comment se passera l’été? Si la sécurité est assurée, rien n’empêche un incident d’éclater ici ou là! Le tourisme intérieur, qui se déploie hors des zones dites touristiques, sera-t-il aussi sous surveillance? Va-t-on hypothéquer l’été et la vie des Tunisiens pour ne pas appliquer la loi contre les extrémistes qui leur empoisonnent la vie?
Le week-end dernier, «des employés de la BAD ont été attaqués à Sejnane. 3 voitures ont été agressées par des salafistes. Une des voitures a pu s’échapper, les deux autres ont été bloquées. Les passagers de l’une d’elles ont été forcés de quitter la voiture. Quelques uns ont été blessés superficiellement. Les policiers n’ont pas voulu intervenir de peur pour leurs familles. Ils auraient dit que s’ils intervenaient, les salafistes prendraient en otage leurs familles. Ce cauchemar s’est terminé grâce à l’intervention de certains habitants. Des vieux, d’après les agressés. Depuis ce drame, un e-mail a été envoyé a tous les employés de la BAD». A-t-on répondu à cela? N’est-ce pas déjà une énorme défaillance de la gestion de crise de ce gouvernement?
Le tourisme est un secteur très exposé aux crises en raison de la diversité de ses composantes, de la mutation de ses formes, de l’investissement émotionnel, et des rythmes saisonniers de consommation. Les spécialistes proposent diverses approches pour gérer une crise.
Les dix recommandations sont:
– recensez l’ensemble des crises potentielles;
– effectuez des simulations;
– vérifiez que votre réseau d’informations fonctionnera;
– cultivez vos alliés;
– constituez votre cellule de crise;
– parlez le premier;
– prenez vos responsabilités;
– jouez la transparence;
– renforcez vos relations avec les médias;
– et occupez le terrain.
A bon entendeur salut!