Le patron de la Bundesbank Jens Weidmann, le 18 novembre 2011 (Photo : Daniel Roland) |
[12/05/2012 12:26:03] FRANCFORT (AFP) Pacte fiscal européen, inflation, aides à la Grèce: le président de la Bundesbank Jens Weidmann a recadré fermement samedi ceux qui ont pu laisser penser à un infléchissement de sa doctrine d’orthodoxie, et lancé des mises en garde au président français élu François Hollande.
Plutôt discret depuis qu’il a pris la succession en mai dernier du bouillonnant Axel Weber, qui avait claqué la porte en raison de son désaccord sur la gestion de la crise dans la zone euro, M. Weidmann, à la réputation de pragmatisme, a tapé du poing sur la table face au tour que prend le débat en Europe.
Première visée dans un long entretien accordé au grand quotidien de Munich Süddeutsche Zeitung paru samedi, la Grèce, toujours en quête d’un gouvernement.
Ce pays, dont le surendettement a été à la fois le déclencheur et le révélateur d’une crise de la dette qui n’en finit pas de plomber la zone euro, ne recevra plus aucune aide financière si elle ne respecte pas ses engagements d’austérité, a averti celui qui fut un conseiller proche de la chancelière Angela Merkel.
Quant à la tentation d’une sortie de la monnaie unique, “les conséquences seraient beaucoup plus graves (pour Athènes) que pour le reste de la zone euro”, a-t-il aussi mis en garde, jugeant “simpliste” de penser que la Grèce pourrait résoudre ses problèmes de cette manière.
L’inflation ensuite. Alors que des économistes et même le ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, estiment que l’Allemagne peut se permettre une hausse des prix supérieure aux 2% que se doit de faire observer la Banque centrale européenne (BCE), afin d’aider ses voisins en difficulté à gagner en compétitivité et d’encourager leur croissance, M. Weidmann a répété le credo de son institution.
“C’est un chemin dangereux, nous ne devrions pas répéter les erreurs des années 1970. L’inflation est socialement injuste, (et) ne permet pas de sortir de la crise”, a-t-il dit.
La veille déjà il avait cru bon d’intervenir face à une surinterprétation par certains médias du rapport d’un économiste de ses services jugeant que le pays, dont l’économie continue de bien se porter malgré la morosité ambiante, pouvait tolérer un peu plus d’inflation.
“Si nous veillons, au conseil des gouverneurs de la BCE, que l’inflation moyenne ne dépasse pas les 2%, alors l’inflation ne sortira pas de ce cadre en Allemagne. Nos concitoyens peuvent se fier à la vigilance de la Bundesbank”, avait-il déclaré, toujours dans les colonnes du Süddeutsche Zeitung.
Enfin M. Weidmann attaque de front des propositions de François Hollande, qui prendra ses fonctions mardi et que Mme Merkel recevra le jour même à Berlin.
“Une modification des statuts (de la BCE) serait dangereuse”, met-il en garde, faisant allusion aux propositions de M. Hollande pendant sa campagne de laisser la BCE prendre des mesures de soutien à l’économie ou prêter directement aux Etats.
“Les emplois et la croissance économique sont le fruit des échanges commerciaux. La banque centrale est la mieux placée pour contribuer à la stabilité de la monnaie” européenne, a-t-il ajouté.
S'”il faut attendre le programme final du gouvernement” de M. Hollande, “il est clair qu’il faut refuser sa revendication de campagne, de détricoter le pacte budgétaire européen”, a-t-il ajouté.
Le président élu socialiste s’est engagé à “renégocier” le traité de discipline budgétaire signé début mars par 25 Etats de l’Union européenne, pour y ajouter un “volet croissance”, jugeant que la ligne d’austérité défendue par la chancelière conservatrice Angela Merkel conduisait la zone euro droit dans le mur. Ce qui, selon les analystes, ne signifie pas qu’il rejette le pacte budgétaire puisqu’il s’est engagé à équilibrer les comptes de la France en 2017.
“Le nouveau mot-clé est +croissance+ oui je sais”, a ajouté M. Weidmann. “Mais chacun comprend des choses différentes sous ce terme”, qui pour lui ne doit pas mener à relancer les dépenses et donc augmenter l’endettement. “Toutes les expériences prouvent qu’un endettement trop important handicape la croissance”.