énon à Athènes, le 22 août 2010 (Photo : Louisa Gouliamaki) |
[18/05/2012 12:10:46] ATHENES (AFP) Les réservations de touristes européens pour cet été en Grèce ont chuté depuis le 6 mai en raison des incertitudes pesant sur l’avenir du pays, mais Hellas reste une destination prisée et le spectre d’une hémorragie d’Allemands redoutée en début d’année semble s’éloigner.
Après une embellie en 2011, à la faveur du printemps arabe, qui s’est traduite par une augmentation de 9,46% de la fréquentation touristique en Grèce (16,4 millions de visiteurs) et une hausse de 9,5% du chiffre d’affaires à 10,5 milliards d’euros, la saison 2012 s’annonce plus sombre.
“A la suite des élections législatives du 6 mai, nous avons connu une baisse des réservations de 50%. La raison: l’instabilité politique”, explique pessimiste George Drakopoulos, directeur de la principale association des professionnels du secteur, le SETE, alors que le pays doit retourner aux urnes le 17 juin faute d’avoir pu constituer un gouvernement.
Considéré comme un fleuron de l’économie grecque, avec la marine marchande, le tourisme représente quelque 768.000 emplois directs et indirects et 15,7% des revenus du pays, selon le SETE.
“Beaucoup d’hôtels font des efforts considérables, mais il ne s’agit pas de cela. C’est une question de sécurité et de rapport qualité prix”, estime M. Drakopoulos.
A Nauplie, port du Péloponnèse, les réservations sont au point mort depuis les élections, après avoir dégringolé de 25 à 30% depuis janvier, selon Panagiotis Moriatis, professionnel du secteur, qui impute cette baisse non seulement à la crise dans laquelle le pays est engluée depuis 2010, mais aussi à la contre-publicité des grèves et manifestations en plein coeur historique d’Athènes, et aux images d’une capitale à feu et à sang.
“Les média étrangers n’ont présenté que les heurts autour de (la place centrale d’Athènes) Syntagma sans rien montrer du reste de la Grèce, où les conditions sont à l’exact opposé”, déplore-t-il.
Ainsi en France, les réservations d’été pour la Grèce ont baissé de 30%. “Il y a un impact psychologique du contexte global sur la clientèle, c’est certain”, dit René-Marc Chikli, président de l’association des tours-opérateurs français CETO.
John Kester, analyste des tendances touristiques pour l’organisation mondiale du tourisme, basée à Madrid, estime toutefois que “la Grèce jouit d’adeptes fidèles, qui connaissent le pays, et ce public n’est pas influencé par la couverture médiatique”. Le secrétaire général de l’Organisation onusienne, Taleb Rifai, prédit lui une “croissance positive, bien qu’inférieure à 2011” et voit dans la Grèce “une réelle mine d’or”.
La thèse selon laquelle les Allemands bouderaient en masse la Grèce par crainte de s’attirer la foudre des Grecs, courroucés par l’austérité administrée par la chancelière allemande Angela Merkel et l’UE, semble néanmoins se démentir.
Si les réservations venues d’Allemagne ont nettement marqué le pas en début d’année, “une véritable reprise est observable depuis quelques semaines”, selon Anja Braun, porte-parole du groupe de tourisme allemand TUI qui note une “évolution au-dessus de la moyenne” en Crète.
“Beaucoup sont des habitués, ils savent aussi que sur les îles, on n’est pas affecté. Au rythme où ça va, il y a de bonnes chances pour que le nombre de touristes allemands soit stable” par rapport à 2011, où ils étaient 2,5 millions, soit la principale manne de revenus du tourisme en Grèce, dit Sybille Zeuch, de la fédération allemande DRV.
En Autriche, aux Pays-Bas, où les réservations pour la Grèce ont baissé de 13%, et en Italie, les professionnels avancent aussi des difficultés économiques internes.
Sans donner de détails, certains voyagistes se préparent d’ailleurs à l’adoption d’une autre devise par une Grèce sortie de la zone euro, comme en Grande-Bretagne, où “la Grèce reste une destination en vogue”, selon un porte-parole de TUI. “Nous avons des plans de secours si le pays venait à sortir de l’eurozone et nous continuons à travailler avec nos fournisseurs grecs et nos hôtels partenaires”, indique-t-il.
“Les tours-opérateurs sont à l’écoute pour pouvoir renégocier très vite les contrats avec les hôteliers”, ajoute M. Chikli.
Pour Peter Voigt, professeur à la faculté de tourisme de Munich, un changement de monnaie “peut en théorie être très intéressant pour les voyagistes allemands, car ils pourraient réaliser de juteux gains de change”.
Pour les touristes, il voit “plus de risques, en particulier si la Grèce se met à connaître une inflation galopante. Au plus fort de la crise en Argentine, une tasse de café pouvait coûter 15 dollars”, dit-il.