Dans le cadre de la préparation de son Rapport sur le développement dans le monde pour l’année 2013, qui s’intéresse exclusivement cette fois-ci à la question de l’emploi, la Banque mondiale a commandité une série d’études de cas consacrée aux différents problèmes liés à l’emploi dans sept pays, dont la Tunisie.
D’où l’organisation, vendredi 18 mai 2012 à Tunis, d’une table ronde, en présence d’une équipe de chercheurs tunisiens responsable de cette étude afin de discuter le cas tunisien qui s’intéresse particulièrement au chômage des jeunes et les obstacles à la création de l’emploi adapté aux caractéristiques de la population tunisienne.
Lors des discussions, un intérêt particulier a été porté sur l’effet des conditions initiales, les politiques gouvernementales et le cadre institutionnel du secteur de l’emploi. «Il est clair qu’il faut maintenant changer l’idée qui voit la stratégie de croissance qui regarde la politique industrielle active, comme étant un mal. Il faut que la stratégie de croissance vise des secteurs à forte valeur ajoutée, pour que nous puissions dépasser les 5% qui ne suffisent réellement pas à absorber la main-d’œuvre additionnelle», a affirmé Fatma Moussa, directrice de l’Observatoire national de l’emploi et des qualifications, en ajoutant qu’«il faut aussi que la croissance ait une déclinaison régionale. Naturellement cela consistera en une politique active de l’Etat en termes d’infrastructures, de mesures ciblées et actives dans le sens de la transparence, … notamment dans les régions».
Neila Amara, enseignante universitaire, a pour sa part indiqué qu’il est grand temps de réconcilier l’approche macro-politique de l’Etat et celle micro-politique de l’entreprise, parce qu’«il ne faut pas oublier que le point de départ c’est l’entreprise, qui pourra croître si elle a les moyens bien évidemment. On doit se pencher sur nos échecs aujourd’hui. Il faut incontestablement remettre l’entreprise au cœur de la problématique de l’emploi».
Faut-il revoir notre politique d’incitations aux investissements ?
Cette partie consiste en fait à savoir s’il n’y a pas de contradiction entre une stratégie de création d’entreprises et de secteurs à forte valeur ajoutée, et en même temps créateurs d’emploi. Ainsi, Abderrahman Lagha, professeur universitaire, a proposé la création de mécanismes simples pour qu’un secteur à forte valeur ajoutée soit un grand créateur d’emplois. «D’ailleurs, quand l’entreprise paye ses impôts et ses taxes, le ministère des Finances a automatiquement une mesure de la valeur ajoutée. Changer la logique des incitations est donc fondamentale, si on veut réellement que ces incitations servent aux objectifs nationaux», ajoute-t-il.
A titre indicatif, le professeur a rappelé que l’emploi est taxé à hauteur de 25% (charges sociales), alors que l’importation de l’UE n’est pas taxée du tout. Quand on a le choix entre importer un produit et le faire fabriquer, la réponse est très simple, on va favoriser l’importation par rapport à la production donc par rapport à l’emploi. «Le fait de calculer les charges sociales par rapport à la masse salariale, c’est une mesure contre l’emploi», affirme M. Lagha.
Finalement, il convient de rappeler que le rapport de développement 2013, qui sera publié en octobre prochain, a pour but d’améliorer notre compréhension des connections qui existent entre l’emploi et les différentes dimensions de développement économique et social, ainsi que d’identifier les obstacles à la création soutenue des emplois.