ésident russe Vladimir Poutine le 17 mai 2012 à Moscou (Photo : Alexei Nikolsky) |
[19/05/2012 05:49:54] MOSCOU (AFP) Vladimir Poutine a fixé pour son retour au Kremlin des objectifs plus qu’ambitieux pour propulser la Russie aux premières places de l’économie mondiale, mais la possibilité de ce “grand bond” en avant suscite des doutes malgré des perspectives plutôt favorables à court terme.
La Russie observe avec hauteur la crise qui submerge les Etats endettés de la zone euro, soutenue par une croissance solide de 4,9% au premier trimestre. Sur l’ensemble de l’année, elle table sur un léger déficit budgétaire, de 0,3% du produit intérieur brut (PIB).
“Les chiffres du PIB au premier trimestre, meilleurs que prévu, montrent que la Russie, jusqu’à présent, reste relativement protégée de la crise en Europe”, a souligné Chris Weafer, stratégiste de la banque d’investissement moscovite Troïka Dialog.
Mais Vladimir Poutine est aussi bien conscient qu’une crise majeure en zone euro affecterait sévèrement les exportateurs russes et limiterait les recettes en pétrodollars. Une perspective dangereuse pour son pouvoir alors qu’il fait face à une vague de contestation dans la rue.
Le chef de la Banque centrale russe, Sergueï Ignatiev, s’est cependant dit cette semaine optimiste pour son pays.
“Mais nous sommes mieux préparés pour une prochaine crise économique qu’en 2008. Nous avons l’expérience, les instruments, que nous pouvons utiliser à n’importe quel moment”, a-t-il dit devant le Parlement russe.
Le vice-Premier ministre russe Igor Chouvalov, en charge de l’économie dans le gouvernement sortant, a toutefois reconnu cette semaine que douze ans après l’arrivée de Vladimir Poutine au pouvoir, et vingt ans après la chute du régime soviétique, “on ne peut pas dire aujourd’hui que la Russie est un pays moderne”.
“Nous avons un gros programme de mesures sociales, il manque une industrie innovante de grande ampleur, nos institutions sont sous-développées et notre système judiciaire doit pratiquement être recréé”, a-t-il dit dans une interview au journal Vedomosti.
“Il faut mettre l’économie et la sphère sociale aux standards modernes. Ce n’est pas un slogan rebattu, mais la réalisation des plans de modernisation”, a-t-il souligné.
Le 7 mai, quelques heures après avoir repris les fonctions de président abandonnées quatre ans pour le poste de Premier ministre pour des raisons constitutionnelles, M. Poutine a signé un décret sur la politique économique du pays.
Ce décret prévoit de créer et moderniser 25 millions d’emplois à haute productivité d’ici 2020, d’accroître les investissements pour qu’ils atteignent au moins 25% du PIB d’ici 2015, d’accroître la productivité du travail de 150%.
Il ambitionne de faire remonter la Russie de la 120ème à la 20ème position dans l’indice du climat des affaires de la Banque mondiale, et enfin d’accroître l’espérance de vie de 70 à 74 ans d’ici 2018.
“Ces objectifs rappellent le Grand bond en avant de la Chine”, lancé par Mao Zedong à la fin des années 1950, a relevé dans un rapport l’Institut de Développement de l’Ecole supérieure d’économie de Moscou.
“Certains de ces objectifs, qui dans les conditions russes ne peuvent être atteint que dans les 10-15 prochaines années, doivent être réalisés en six ans, contre les lois de la nature et du développement économique”, a jugé la directrice de l’Institut, Natalia Akindinova.
L’agence russe des Statistiques Rosstat estime ainsi que l’objectif en termes d’espérance de vie ne pourra être atteint qu’en 2023, dans le meilleur des cas.
Concernant l’indice du climat des affaires, “il n’y a pas d’exemple dans l’histoire de ce classement de pays important ayant fait un tel bond”, a souligné Mme Akindinova.