Les Anglais, c’est bien connu, n’aiment pas nager dans le brouillard. Faute de signaux forts, sur les nouvelles orientations économiques du gouvernement, ils ont dépêché une mission économique pour s’informer. Des contacts divers ont eu lieu. Ils ont été émaillés, toutefois, d’un «Media breakfast» modéré par Patrick MERIENNE, premier secrétaire, chargé du développement, en présence de quelques membres de la délégation. Ce fut un «nice ghathering», comme les sujets de Sa Majesté en ont le secret. Les échanges ont été intenses, même si le nombre de journalistes était restreint.
Avec quelle opinion sur la Tunisie, les visiteurs anglais sont-ils repartis?
La «Big Offer», versus…
Les Anglais ont été les premiers à applaudir la révolution tunisienne. William Hague, ministre des Affaires étrangères, était le premier officiel européen à faire le déplacement. Les Britanniques n’ont pas été officiellement invités à la cérémonie de célébration du premier anniversaire de la révolution au mois de janvier dernier. Et, ils n’en conçoivent pas d’amertume particulière. Ils continuent à porter un intérêt, à la fois ininterrompu mais toujours distant, à la Tunis. Leurs arguments pour justifier cette situation de «ni-ni» tombent un par un. L’excuse de la langue n’y est plus. Les milieux d’affaires tunisiens ont switché vers la langue de Shakespeare, et l’anglophonie est une chose, sinon acquise du moins largement répandue.
Les liaisons aériennes, il est vrai peu fréquentes pendant un certain temps, sont passées à la vitesse supérieure, à l’heure actuelle. Les échanges et contacts restent timides et les procédures de visas, rigides.
A la vérité, il faut dire que les actions d’éclat n’ont pas manqué. Chris O’Connor, ambassadeur de la Grande-Bretagne à Tunis, a déployé une énergie remarquable pour la mission «Bridging the gap» entre les deux pays. Il y a eu, notamment la visite du Prince Andrew, représentant pour le royaume de l’investissement et du commerce. Elle-même fut précédée de la visite du Lord Mayor de Londres, qui est en même temps président de la Bourse anglaise.
On déplore que les missions, commerciales et économiques, d’hommes d’affaires aient beaucoup baissé en 2011. Les Anglais ont fait la sourde oreille aux appels à dons de la Tunisie. Et, pour se dédouaner, nos amis anglais affirment avoir été à l’origine de la “Big Offer du G8“ en faveur du Plan Jasmin. Ils soutiennent avoir activement appuyé la Tunisie auprès des institutions dans lesquelles ils siègent. On connaît la suite. Pour la BM et la BAD, ce fut suivi d’effet. Is it enough? Shcoking! On ne pose pas la question de manière aussi frontale.
…La «Smart Offer»
La Tunisie a besoin de ses amis, en cette période précise, où elle veut mettre sur pied son nouveau modèle économique. Toutes les contributions sont les bienvenues. L’Amérique, qui n’est pas très prodigue, nous a bien prêté main forte. A l’opposé, les Anglais demeurent sur une attitude d’expectative. Les flux de touristes anglais n’ont, hélas pas repris!
Philippe Gauthier, maître expert, a bien audité le marché financier tunisien. Il nous a bien laissé sous-entendre qu’il existait un bon potentiel de coopération. Cela n’a pas été suivi d’effets. La Grande-Bretagne connaît les ambitions de la Tunisie pour promouvoir une place financière régionale avec «Tunis Finance Harbour». La City de Londres peut bien prendre le projet sous son aile. Or, à ce jour, on ne voit rien venir. «It is Time»!, serait-on tenté de dire. Mais ce serait si inélégant. On a fait miroiter la possibilité que HSBC s’installe à Tunis. Et toujours rien. L’installation de la banque sur la place de Tunis serait d’un effet remarquable. Peut-être est-ce une affaire remise, sait-on jamais?
D’un souvenir quelque peu éloigné lors d’un entretien avec le président de British Expertise, en visite parmi nous, certaines promesses avaient été faites pour engager des entreprises tunisiennes dans les travaux du chantier Olympique de Londres. Là encore, les promesses n’ont pas abouti. Il n’échappe à personne que les critères de sélection sont poussés. Mais, en retour, des références à ce chantier historique sont des sésames précieux pour les entreprises participantes. Quand bien même, sans raison apparente, les échanges entre les deux pays restent timides et discrets, alors que le champ est si vaste, l’espoir est permis.
Il est vrai que la Grande-Bretagne possède avec British Gas l’IDE le plus important en matière énergétique, dans notre pays. Du reste, la coopération dans le domaine énergétique est très avancée. Clarke Energy a accompli de belles réalisations en matière de cogénération avec des opérateurs tunisiens. D’un autre côté, Tu-Nur, projet d’électricité verte, représente une voie porteuse pour l’avenir.
La volonté politique y est
Avec quelle idée de la Tunisie de 2012 les experts anglais sont-ils repartis? Trait d’élégance, les Anglais, malgré un contact agréable, sont peu diserts et même assez secrets. Une chose est certaine, c’est que les Anglais peuvent beaucoup aider au redémarrage économique de la Tunisie post révolution. Il va de soi que ce sera un cas de figure de «win-win situation». Nous leur avons laissé sous-entendre que la balle est dans leur camp. Et on sait que s’ils veulent marquer, ils savent le faire. Auront-ils la volonté de monter au filet? Patrick Merienne, y est allé tout de go, affirmant que la volonté politique y est, en tout cas. Le cœur y sera-t-il?