Dr Adel Al Okbi est entrepreneur dans le secteur des hydrocarbures et à la tête de deux firmes pétrolières, l’une en Libye et l’autre en Roumanie. Il est aussi le conseiller économique de l’Union générale des Chambres de commerce et d’industrie libyennes et des autorités politiques aujourd’hui en place en Libye.
Il explique ci-après qu’en Libye tout est à construire et qu’à la base de tout, la formation des ressources humaines dans un pays où la population est composée à hauteur de 60% par des jeunes.
Entretien
WMC : Est-ce que le climat d’affaires en Libye s’apprête à l’encouragement des investissements, sachant la situation sécuritaire… ?
Dr Adel Al Okbi : Oui, j’estime que c’est le cas, mais nous estimons que le meilleur moment pour l’entrée en jeu des investisseurs dans notre pays serait après la tenue du congrès national pour l’élection d’une nouvelle équipe politique pour conduire le pays.
Concernant le problème sécuritaire, je pense que nous sommes sur la bonne voie. Mais le plus important est la mise en place de réglementations qui garantissent les droits des investisseurs et identifient leurs obligations. Je pense qu’après les élections, les réglementations élaborées seront définitives et pourront sécuriser l’investisseur.
Nous sommes en train de mettre en place un ensemble de lois dans lesquelles nous avons pris en considération les peurs des investisseurs et les réticences des Libyens, et nous voulons donner aux uns et aux autres les gages nécessaires pour leur permettre d’exercer leurs activités de la meilleure manière qui soit. Toutes ces lois seront effectives après la tenue du Conseil national avec le soutien du gouvernement et l’appui de l’Union nationale des chambres économiques de Libye.
Nous prévoyons, pour le mois d’octobre 2012, l’organisation d’un congrès sur les investissements en Libye, d’ici là, les cadres légaux seront prêts et effectifs.
Vous assurez que la situation sécuritaire est stable mais les informations disent que ce sont des factions armées qui gouvernent effectivement la Libye?
Entendons-nous bien, la Libye vient de sortir d’une guerre fratricide où les armes se vendaient comme des bonbons, vous pensez que du jour au lendemain cela allait disparaître sans même qu’il y ait un gouvernement élu légitimement et en l’absence de fortes institutions de l’Etat? Un Etat qui n’existait même pas du temps de Kadhafi.
Toutes les factions armées qui estiment aujourd’hui avoir pour mission de défendre la révolution remettront leurs armes au gouvernement qui sera très bientôt élu démocratiquement; elles en ont fait la promesse. Pour les récalcitrants, des mesures seront prises en temps voulu. Les contestataires pourront s’exprimer autrement et savent que sans la contrainte armée aux mains du pouvoir en place, il n’y aura pas d’Etat et nous avons fait une révolution pour créer un Etat par à cause de la pauvreté.
Quels sont les débouchés pour les investissements en Libye et avez-vous les ressources humaines qui pourront répondre au profil des activités, qu’elles soient industrielles ou de service?
Là, vous touchez un point essentiel pour nous. Car il ne s’agit pas d’investir dans la construction d’une usine, nous n’avons pas besoin d’argent mais d’expertise. Nous appelons tous les investisseurs à accorder à la formation des ressources humaines et au développement de leur savoir-faire dans notre pays l’importance qui se doit. Nous donnons des facilités et des incitations pour avoir de l’expertise, il s’agit de former nos jeunes et de développer leur compétences, et ce que ce soit au niveau des cadres et hauts cadres que de l’exécutif.
Nous avons d’ailleurs prévu des mesures spécifiques pour ceux qui investiraient dans les ressources humaines et dans la culture et le tourisme. 60% de la population libyenne est composée de jeunes qui ont besoin d’être formés; d’autre part, et pour ce qui est du tourisme culturel, 9 civilisations ont défilé sur la Libye mais personne ne connaît vraiment notre histoire.
Quelles sont les garanties que vous pouvez offrir aux investisseurs?
Les lois d’incitation à l’investissement existaient avant la révolution mais les réticences s’expliquaient par les caprices des autorités politiques à l’époque. Aujourd’hui, nous voulons construire des institutions qui veilleront à l’application et au respect des droits des uns et des autres. La loi serait au dessus de toutes et de tous et même au dessus du gouvernement.
Nous voulons des investisseurs dans des domaines à forte valeur ajoutée et dans le secteur agricole, mais pas des opérateurs dont le seul souci est de récolter le plus de gains possibles en un temps record. Nous donnerons la primauté à ceux qui investiront dans des secteurs solides et sur le moyen et le long termes.
Prenez l’exemple des activités pétrochimiques, elles ont été intégrées dans différents secteurs. Nous autorisons aujourd’hui l’exercice de ces activités dans notre pays, auparavant elles étaient interdites pour les non nationaux.
Et vos relations avec vos voisins immédiats, comptez-vous changer vos orientations pro-africaines?
Vous savez bien entendu que c’était un choix politique. Aujourd’hui, nos voisins immédiats avec lesquels nous partageons les mêmes soucis et les mêmes composantes socioéconomiques seront plus favorisés au niveau des échanges économiques. Nos problèmes avec nos voisins étaient d’ordre politique, plus jamais dans l’avenir, car nous comptons axer toutes nos actions sur l’économique, nous sommes conscients qu’à la base de tout choix politique, l’économique doit primer.