L’Union européenne dresse un bilan économique des pays du sud de la Méditerranée et propose une feuille de route destinée à ces partenaires.
Cette feuille de route, “comprenant des objectifs, des instruments et des actions pour la mise en œuvre des politiques de l’UE” est destinée à ces partenaires, suite à la requête du Conseil européen en mars 2012.
Elle tient compte de la révision majeure de la Politique Européenne de Voisinage (PEV) de l’Union européenne (UE) en mai 2011: “selon une politique plus pour plus, les pays d’Afrique du Nord bénéficient d’un soutien de l’UE plus large et plus important”. Ainsi, l’Union mettait à disposition une enveloppe supplémentaire d’un mrd € pour la période 2011-2013 allouée à de nouveaux programmes innovants, augmentait les plafonds de prêts de la Banque européenne d’investissement (BEI) de 1,15 mrd € et proposait l’extension du mandat de la Banque européenne de reconstruction et de développement (BERD).
En Tunisie, par exemple, l’Union a doublé son assistance financière de 80 à 160 M€ en 2011.
Globalement, selon le rapport, l’intégration économique serait déjà en nette amélioration. Des négociations pour des accords de libre-échange approfondis et globaux “vont probablement être lancées avant la fin de l’année avec la Jordanie, le Maroc et la Tunisie”. De plus, autre remarque majeure, des discussions ont été entamées sur la mobilité et la sécurité au Maroc et en Tunisie, “qui ouvriront la voie vers un partenariat pour la mobilité”.
Tour d’horizon du bilan économique des pays du sud méditerranéen et des préconisations de l’Union européenne dans le cadre du PEV.
Bilan de l’année 2011 en chiffres
Au Maroc, l’Union européenne précise qu’une enveloppe financière de 654 M€ a été octroyée par la Commission européenne pour la période 2007-2010 afin de soutenir la modernisation de l’économie. L’Union européenne remarque la solidité de l’économie marocaine “grâce aux politiques macro-économiques globalement prudentes mises en place”. Ainsi, en 2011, la croissance (4,7% du PIB) est supérieure à celle de 2010 et le niveau d’inflation est resté faible (1,5%). Cependant, l’UE note un fort taux de chômage “principalement parmi les jeunes, les diplômés et les femmes des grandes villes”. L’organisme européen regrette que l’allocation d’une partie importante du budget (41%) aux secteurs sociaux ne permette pas de combler les besoins réels du pays.
En Tunisie, l’UE admet que la révolution a bouleversé les perspectives économiques du pays. Apportant son soutien économique à celle-ci (en doublant son aide économique), l’Union européenne constate les dommages économiques engendrés par la révolution: “l’économie tunisienne a dû faire face à un effondrement des recettes touristiques (-40%) et à une forte diminution des IDE (2,8% du PIB en 2011 contre 3,4% en 2010)”. De plus, “la croissance du PIB a été fortement affectée en 2011 et le pays a connu en 2011 une croissance négative (…) et le taux de chômage a atteint 18,3%, touchant particulièrement les diplômés de l’enseignement supérieur et certaines régions les plus défavorisées”.
La situation économique en Jordanie est décortiquée par l’Union européenne, la croissance économique atteint 2,5% du PIB en 2011 contre 2,3% en 2010 et l’inflation retombe à 4,5% contre 5% en 2010. Cependant, le chômage reste important à 12,9% des forces de travail. En réaction, le pays a mis en place une action nationale pour l’emploi “même si les capacités et les ressources de ce plan restent insuffisantes”.
Quant à l’Égypte, l’UE constate que le pays “a dû faire face à de profonds changements et à de nouveaux défis politiques et économiques en 2011”. Le Conseil suprême des forces armées a pris les pouvoirs législatifs, exécutifs et présidentiels, mais l’Union européenne compte sur la mise en place de réformes structurelles permettant la liberté politique, le respect des droits de l’homme et de meilleures conditions économiques et sociales. Dans le contexte du printemps arabe et de la guerre voisine en Libye, le taux de chômage a fortement augmenté à 12,4% au quatrième trimestre 2011.
L’UE note qu’en Israël, un effort a été fait pour insuffler “un meilleur dynamisme des relations” avec l’organisme européen. La croissance économique en 2011 a été forte (+ 4,8%) et le taux de chômage est tombé à 5,5% (son plus bas taux depuis 50 ans). Mais malgré ces bons chiffres, le taux de pauvreté du pays est le plus élevé des pays de l’OCDE et l’UE note encore “de profonds clivages sociaux et économiques”.
L’Union européenne se félicite des avancées du dialogue au Liban suite à l’établissement du nouveau gouvernement. La préparation pour une politique européenne de voisinage a été lancée en fin 2011 ainsi qu’une procédure de ratification de la convention de l’Organisation internationale du travail (OIT).
Mais touchée par le printemps arabe, la croissance du pays n’atteignait que 1,5% du PIB (contre près de 7% en 2010). L’inflation s’est accélérée de 5,4% en 2011 contre 4,5% en 2010 et le taux de chômage avoisinait les 11% en 2011. Des mesures ont été prises afin de limiter la dette publique avec la création d’un Office de gestion de la dette au sein du ministère des Finances.
Les préconisations de l’UE pour la croissance et le renforcement de la Politique européenne de voisinage
Suite à l’annonce par le Roi du Maroc d’amorcer une “profonde réforme constitutionnelle”, l’Union européenne appelle le pays à “poursuivre les réformes en vue d’assurer une bonne gouvernance dans la gestion de l’État et lutter plus résolument contre la corruption (…) réformer le système de subventions généralisées afin de contenir, à terme, le niveau d’endettement du pays (…) et renforcer la lutte contre le chômage notamment des femmes et des jeunes”. L’Union européenne préconise enfin l’établissement d’un Accord de libre-échange approfondi et global, dont la négociation pourra être lancée suite à une “mission de cadrage” qui devrait intervenir en 2012.
L’organisme européen espère, en Tunisie, l’adoption en 2012 d’un nouveau plan d’action dans le cadre de la politique européenne de voisinage et appelle le pays à se préparer “à l’intégration au marché unique européen, notamment dans le cadre des négociations en vue de la conclusion de la Zone de Libre Échange Approfondie et Complète (ZLEAC)”.
La Jordanie, en vue d’une mise en place durable du partenariat européen, est invitée à intensifier son combat contre la corruption “qui affaiblit le développement économique, social et politique du pays”, à renforcer ses efforts pour promouvoir la bonne intégration des femmes dans le milieu professionnel, à poursuivre ses démarches pour augmenter ses exportations.
L’Union européenne appelle l’Égypte à concevoir un programme de réformes économiques qui assure une stabilité sur le plan macro-économique et qui renforce la gestion des finances publiques afin d’ouvrir la voie à une assistance financière internationale.
Israël devrait, selon l’organisme européen, continuer ses efforts pour minimiser la violence auprès des territoires occupés palestiniens, renforcer sa coopération avec l’Union européenne et prendre des mesures pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre dans la lignée d’un accord international.
L’organisme européen incite enfin le Liban à établir de nouvelles règles législatives sur des sujets clés économique et social, favoriser l’insertion des femmes dans le milieu professionnel et dans les institutions politiques, mieux gérer ses finances publiques, améliorer les performances énergétiques notamment dans les énergies renouvelables et envisager une libéralisation du secteur des télécommunications.
La Libye, la Syrie et l’Algérie dans le viseur du Plan européen de voisinage
La Libye ne fait pas partie du plan européen de voisinage, mais l’UE établit tout de même un bilan de sa situation économique et financière en 2011.
Les prix à la consommation flambent (+14%) et la diversification des secteurs économiques demeure, selon l’organisme, un “énorme challenge” pour un pays qui dépend à plus de 90% de sa production de pétrole et de gaz pour faire vivre son économie. L’Union européenne représente une part importante de son marché puisque 70% de ses échanges concernaient la zone européenne en 2011. L’Italie est le principal partenaire de la Libye après la reprise de sa production de gaz et de pétrole.
De même en Syrie, l’UE espère pouvoir un jour établir un plan de voisinage auprès du pays. Cependant, l’organisme note que la situation économique du pays se dégrade, le niveau des activités économiques du pays reste bas et devrait décliner en 2012 “si la situation continue à se détériorer”. L’organisme européen regrette “l’absence du gouvernement syrien” dans les questions économiques et sociales.
L’Union européenne annonce deux rounds de négociations informelles pour inclure l’Algérie dans la politique européenne de voisinage. Malgré que l’Algérie ne fasse pas partie de cette politique, l’UE analyse la situation économique du pays.
De nombreuses mesures sociales ont été mises en place, notamment l’augmentation des salaires, la stabilisation des prix pour les produits de bases et le renforcement des logements sociaux. Le taux de chômage devrait continuer de baisser pour atteindre 9,5% en 2012 (contre 10% en 2010). Les échanges économiques du pays atteignaient 131 mrds € à la fin de 2011 (contre 117 mrds € en 2010). Pour 2012, cependant, le FMI s’attendrait à un déclin de la situation économique du pays, avec une croissance de 3% et une inflation galopante (+4,3%).
Catherine Ashton, haute représentante pour les Affaires étrangères et la Politique de Sécurité et Vice Présidente de la Commission, déclare vouloir “poursuivre (son) appui à nos partenaires dans leurs efforts de consacrer les valeurs fondamentales et consolider les réformes économiques, nécessaires à la création de ce que j’appelle la démocratie profonde”…