Tous les discours sur la question de l’aménagement du territoire et du développement régional soulignent les limites du système actuel -notamment en termes d’inégalités territoriales- et mettent en exergue la nécessité de dépasser ce modèle tant au niveau des objectifs que des modalités et dispositifs de conduite et de mise en oeuvre.
1- Situation différenciée des territoires
Regardée par le prisme du développement, la situation des territoires et des villes en Tunisie suscite bon nombre d’observations liées aux différences spatiales:
–Différences… en termes d’accessibilité et d’accès aux équipements et services
L’examen effectué par Belhareth (2000) de la structure topologique des réseaux de transport de surface a montré des valeurs globales de connexité et de densité très satisfaisantes sur l’ensemble du territoire mais des niveaux d’accessibilité relativement variables où les valeurs les plus faibles sont dans les zones intérieures.
Le réseau de chemin de fer est jugé quant à lui comme «archaïque» (Belhareth 2000). Si on ajoute à cela le fait que les points les plus stratégiques (ports, aéroport, grandes villes) sont situés sur le littoral (qui concentre par ailleurs les trafics les plus importants), cela conduit à des différences plus notables entre régions en termes d’accès à ces lieux stratégiques.
La répartition des équipements socio-collectifs et des services est également déséquilibrée, parfois au sein d’une même région.
–Des inégalités territoriales aux problèmes urbains
Les inégalités territoriales et les différentiations socio-spatiales ont été parmi les dimensions importantes du déclenchement de la révolution tunisienne. Cette question des inégalités régionales n’est pas récente. Comme le rappelle Belhédi (1999), le développement du sud et du centre figurait parmi les premières revendications de l’Union Générale des Travailleurs lors de son congrès en 1956. Les coefficients globaux de développement régional et relatifs aux décennies 1970-1990 (Belhédi 1999) montraient également une forte inertie spatiale en faveur de la façade maritime.
Actuellement, les conditions difficiles d’accessibilité et le manque d’équipements socio-collectifs et de services urbains caractérisent certaines zones du pays mais peut aussi toucher des quartiers de grandes villes (généralement d’anciens et nouveaux quartiers d’habitat spontané urbain et périurbain).
Après le 14 janvier, le mode de gestion des territoires a été également derrière plusieurs agitations (Limogeage de force de gouverneurs, refus de la nomination de délégations spéciales municipales …) et la situation précaire de certaines zones sous intégrées a continué à susciter des troubles sociaux. Ces problèmes s’ajoutent au développement spectaculaire des constructions non réglementaires et du commerce informel qui a complètement défiguré les villes tunisiennes. Les grèves multiples dans les secteurs urbains (transport urbain, collecte et traitement des ordures…) et la diminution des ressources des communes n’ont fait qu’empirer la situation.
–Participations inégales aux processus de développement
Les différentes régions du pays n’ont pas participé de la même manière au développement socio-économique au niveau national. C’est en se basant sur ce constat que le Schéma National d’Aménagement du Territoire (MEAT 2002) a favorisé le développement des grandes villes littorales jugé comme «condition sine qua non de la réussite du projet économique du pays».
Le Schéma National d’Aménagement du Territoire a proposé de renforcer les zones susceptibles d’être compétitives à l’échelle internationale. La stratégie nationale propose cependant, en parallèle avec ces actions en faveur de la métropolisation, une démarche de compensation pour les régions intérieures. Ces régions souffraient déjà , comme le souligne Dlala (1997), d’une sorte de marginalisation à laquelle a contribué la politique de mise à niveau engagée au début des années 1990 à cause de leurs faibles avantages comparatifs. La manière de conduire cette dualité jugée parfois comme «hésitante et contradictoire» (Ben Letaif 2008) semble expliquer la situation fragilisée actuelle.
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Source : Etude IACE
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