és de Safran (Photo : Eric Cabanis) |
[31/05/2012 12:26:04] PARIS (AFP) Le gouvernement s’attaque aux rémunérations très élevées dans les grandes entreprises où l’Etat français possède des participations, une promesse électorale symbolique qui est aussi l’une des plus faciles à mettre en oeuvre.
Jeudi, le gouvernement a ainsi annoncé qu’il s’opposait à une confortable prime de départ pour le PDG de l’équipementier aéronautique et de défense Safran, dont il détient 30% des droits de vote. Le “parachute doré” de ce dirigeant, Jean-Paul Herteman, a dans la foulée été rejeté par l’Assemblée générale des actionnaires.
Dans la même veine, il a indiqué qu’au nom de la “décence salariale”, il voterait jeudi contre le versement d’une prime de non-concurrence de 400.000 euros à Pierre-Henri Gourgeon, l’ancien patron de la compagnie aérienne Air France/KLM, dont il est actionnaire minoritaire (15%).
Le président socialiste multiplie les mesures symboliques sur les salaires des dirigeants d’entreprises comme des responsables politiques, cherchant à marquer les esprits en début de mandat. Le maître-mot du nouvel exécutif est “l’exemplarité”.
Le nouveau pouvoir avait donné le ton le 17 mai, en annonçant une baisse de 30% du salaire du chef de l’Etat et des ministres. Face à la crise, il s’agissait de montrer que les efforts demandés à la population concernent aussi le plus haut niveau de l’Etat.
Même cure d’amaigrissement pour les salaires des entreprises du secteur public ou dans lesquelles l’Etat possède une participation.
“La réduction de la hiérarchie des salaires au sein des entreprises publiques, de 1 à 20, pour les mandataires sociaux sera faite et, comme l’a dit (le Premier ministre) Jean-Marc Ayrault, elle sera faite rapidement”, a martelé jeudi le ministre des Finances, Pierre Moscovici.
Selon ce calcul, la rémunération des patrons ne doit pas dépasser vingt fois le salaire le plus bas de ces entreprises. La question sera à l’ordre du jour du Conseil des ministres dans deux semaines.
“Cette moralisation des dirigeants des entreprises, elle doit intervenir maintenant, tout de suite, et il faut aussi que (l’écart des rémunérations) soit décent, surtout lorsqu’il y a des situations sociales et économiques difficiles”, a souligné Pierre Moscovici.
La limitation des salaires des grands patrons est une mesure très populaire, approuvée par quatre Français sur cinq selon un récent sondage. Elle intervient dans un contexte de crise et de rigueur budgétaire, qui empêche toute politique de redistribution des revenus et toute relance par les salaires.
Mais la mesure risque surtout d’avoir une portée très limitée, en se bornant à quelques patrons de groupes détenus à plus de la moitié par l’Etat.
“Partout où l’Etat est majoritaire, il imposera notre politique, c’est-à-dire une politique de limitation de l’échelle salariale. Là où il est minoritaire, il cherchera à convaincre”, avait d’ailleurs expliqué la semaine dernière le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg.
Six grands groupes sont contrôlés majoritairement par l’Etat: Aéroports de Paris, Areva (nucléaire), La Poste, la Française des Jeux, la SNCF (transport ferroviaire) et EDF (énergie).
Avec des situations très disparates: le salaire du président de la SNCF, Guillaume Pepy, serait au-dessous de la limite, selon une source proche du dossier. Mais celui d’EDF, Henri Proglio, déjà dans le collimateur pour sa proximité avec l’ancien président conservateur Nicolas Sarkozy, très largement au-dessus (64 fois le salaire de base).
Dans les conseils d’administration mixtes (associant Etat et privé), à l’instar de ceux de GDF Suez (énergie), Renault (automobile), EADS (aéronautique) ou Air France-KLM, tout sera histoire de négociations.
“Je crois au patriotisme des dirigeants, qui peuvent comprendre que la crise suppose l’exemplarité des élites politiques et économiques”, a déclaré M. Ayrault.