Air France-KLM : les actionnaires rejettent en masse la prime à l’ex-patron

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à Paris le 19 mai 2011 (Photo : Eric Piermont)

[31/05/2012 17:25:33] PARIS (AFP) Les actionnaires d’Air France-KLM ont largement invalidé jeudi la prime de 400.000 euros versée à Pierre-Henri Gourgeon, sans moyen autre de la récupérer que la pression du gouvernement, qui a appelé l’ancien patron du groupe à rembourser cette somme au nom de la” morale”.

Réunis en assemblée générale, les actionnaires ont rejeté en masse (78,8%) la résolution sur cette prime, versée après son éviction en octobre 2011 en échange d’une clause de non concurrence de trois ans. Seuls 19,44% ont voté pour et 1,76% se sont abstenus.

Jeudi matin, le ministre de l’Economie et des Finances, Pierre Moscovici, avait appelé M. Gourgeon à rembourser “de lui-même” cette somme, au nom de la “morale”.

Le ministre avait réaffirmé qu’aux yeux du gouvernement, cette prime n’allait “pas dans le sens de la décence” et que l’Etat, actionnaire à 15,8% d’Air France-KLM, s’opposerait à sa validation.

Dès l’ouverture de l’assemblée des actionnaires, le président du groupe, Jean-Cyril Spinetta, avait anticipé leur veto, “compte tenu de la position exprimée par l’actionnaire étatique”.

L’insistance de Bercy s’inscrit dans le contexte de la restructuration difficile d’Air France, qui pourrait se solder par plusieurs milliers de suppressions de postes, et de l’offensive du gouvernement pour limiter les rémunérations des dirigeants d’entreprises dont l’Etat est actionnaire.

L’appel de M. Moscovici s’explique aussi par le manque de moyens d’action des pouvoirs publics pour revenir effectivement sur la prime de M. Gourgeon.

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ée générale des actionnaires, le 31 mai 2012 à Paris (Photo : Eric Piermont)

“Le code du commerce est d’une très grande clarté”, a souligné M. Spinetta, et le vote de jeudi n’a pas de “conséquence directe sur cette indemnité”.

Il a défendu le principe de la clause négociée avec M. Gourgeon, estimant qu’elle avait “été décidée de façon raisonnable, de bon droit et qu’elle a protégé l’entreprise”. Il a indiqué que l’ancien directeur général, âgé de 66 ans, avait déjà dû s’y conformer, alors qu’il avait été “approché par une compagnie du Golfe”.

Spinetta hué

M. Spinetta a toutefois essuyé des huées lorsqu’il a expliqué que le paquet de 1,5 million d’euros, incluant les 400.000 euros, avait été accordé pour “compenser le caractère imprévisible” du départ de M. Gourgeon.

“Je suis choqué qu’on soit obligé de donner une telle somme pour qu’un ancien dirigeant accepte de ne pas faire de tort à une entreprise qu’il quitte (…) Comment peut-on accepter de telles sommes pour se conduire tout simplement en honnête homme?” a interpellé un actionnaire devant l’assemblée.

M. Spinetta a campé sur ses positions, rétorquant que les clauses de non concurrence existaient dans d’autres entreprises. Devant l’hostilité exprimée, il a en revanche pris l'”engagement formel” de ne demander lui-même aucune rémunération exceptionnelle en cas de départ.

Le président d’Air France-KLM a enfin mis en avant la politique actuelle de rémunération des dirigeants du groupe: son salaire fixe de 200.000 euros annuels n’a pas évolué depuis 2009, malgré son retour à des fonctions opérationnelles. Et le nouveau PDG d’Air France, Alexandre de Juniac, a réduit de 17% le salaire de 58 cadres.

La prime touchée par M. Gourgeon fait polémique depuis sa dénonciation la semaine passée par le syndicat Unsa-aérien. La patronne des patrons, Laurence Parisot, a elle-même jugé qu’elle n’était “pas conforme au code” éthique du Medef, au regard de la situation du groupe.

Air France-KLM, dont l’action en Bourse a perdu 12,26% depuis le 1er janvier et plus de 70% sur un an, a lancé en janvier un plan d’économies de deux milliards d’euros à l’horizon 2015, qui s’est déjà traduit par le gel des salaires, des embauches et des investissements.

Les mesures structurelles doivent être arrêtées en juin pour une mise en oeuvre dès cet été.