L’Espagne vient en aide à ses régions, boudées par les marchés financiers

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Le drapeau de Catalogne (Photo : Josep Lago)

[01/06/2012 09:47:23] MADRID (AFP) Après les banques, l’autre talon d’Achille financier de l’Espagne, ses régions, revient vendredi sur le devant de la scène avec la publication de leurs comptes trimestriels, avant l’approbation par le gouvernement d’un mécanisme pour les aider à emprunter sur les marchés.

Emblèmes de la diversité culturelle du pays, les 17 régions espagnoles, qui jouissent d’une grande autonomie, sont désormais synonymes, aux yeux des investisseurs, de manque de rigueur budgétaire.

Dernière sanction en date, celle de l’agence de notation financière Fitch Ratings, qui a dégradé jeudi les notes de huit d’entre elles, dont Madrid et la Catalogne, critiquant leurs “déficits budgétaires structurels”.

Le 17 mai, Moody’s Investors Service avait pris la même décision pour quatre régions, dont la Catalogne et l’Andalousie, en raison de leurs “mauvaises performances budgétaires en 2011”, ajoutant qu’il existe une “faible probabilité” de redressement en 2012.

Difficile d’oublier, en effet, que les régions ont été coupables en 2011 de trois quarts du dérapage budgétaire de l’Espagne: ayant bien profité, pendant des années, de la bulle immobilière, elles n’ont pas su freiner à temps leurs dépenses quand elle a éclaté en 2008, trompées aussi par des prévisions de recettes, par l’Etat, exagérément optimistes.

Le pays a enregistré un déficit de 8,9% du PIB, au lieu des 6% promis, et les régions, qui devaient atteindre 1,3%, ont cumulé un déficit de 2,94%.

Le marché sera donc très attentif à la publication, par le gouvernement central, du déficit de chaque région au premier trimestre. Des chiffres prévus jeudi, mais que le ministère du Budget a retardés d’un jour.

Cette année, les régions doivent ramener leur déficit à 1,5% et l’Etat, autrefois peu regardant sur leurs finances, a menacé de prendre en main le budget de celles qui ne respecteraient pas la trajectoire fixée.

Fitch a aussi évoqué, jeudi, “les difficultés d’accès au financement à long terme” pour les régions.

Ces dernières affrontent en 2012 des échéances de dette pour près de 36 milliards, somme à laquelle il faut ajouter, selon les calculs des médias espagnols, 15 à 16 milliards pour financer leurs déficits.

Le gouvernement devait justement approuver vendredi la mutualisation des émissions de dette des régions, sous forme d'”hispanobons”, avait annoncé à l’AFP la porte-parole du ministère de l’Economie.

Mais ce mécanisme pourrait finalement être reporté d’au moins une semaine, le temps d’en finaliser les détails, c’est ce qu’affirment vendredi les journaux El Mundo et Cinco Dias.

“L’objectif c’est de réduire la pression sur les régions, qui est souvent plus forte que sur l’Etat en général”, selon la porte-parole du ministère: “il y a même des régions qui ne peuvent pas aller sur le marché” pour emprunter.

Ce sera la deuxième fois que le gouvernement vole au secours des régions, après avoir déjà dû, mi-mai, souscrire un prêt de 30 milliards d’euros pour aider villes et régions à régler les factures de leurs fournisseurs.

Mais “au final, l’argent sort de la même caisse, donc cela va se financer très cher”, alors que le pays vit un moment d’extrême tension sur les marchés, note Javier Santoma, professeur à l’IESE Business School de Madrid.

“Au fond, ils (l’Etat et les régions, ndlr) feront appel, plus ou moins, au même groupe d’investisseurs, mais avec plus de dette à placer, donc ils auront moins de capacité de négociation”, estime-t-il, même s’il admet que “c’est une manière d’ordonner le processus, de clarifier qui prête et qui paie”.

Cela augmentera les besoins de financement pour le gouvernement central, souligne Royal Bank of Scotland dans une note, citée par l’agence Dow Jones Newswires, et “ne fera qu’augmenter la probabilité que l’Espagne ait besoin bientôt d’assistance” extérieure.

Madrid a encore démenti jeudi toute demande de plan de sauvetage, confortée par le FMI qui a assuré n’avoir aucun projet en ce sens.