éfilé le 2 mars 2012 à Paris de la griffe Sonia Rykiel, rachetée par le groupe chinois Fung (Photo : Pierre Verdy) |
[01/06/2012 16:16:47] PARIS (AFP) Les pays émergents offrent certes de formidables débouchés aux géants du luxe mondial, mais ils constituent aussi “une menace potentielle à moyen terme” étant donnée la puissance qu’ils acquièrent eux-mêmes dans ce secteur, met en garde une étude du cabinet Xerfi-Precepta.
Des opérateurs étrangers affichent une politique offensive pour s’introduire dans le monde du luxe, comme le montre par exemple le chinois Fung qui a pris le contrôle du chausseur Robert Clergerie (avril 2011), de la maroquinerie Delvaux (septembre 2011) ou de la griffe de prêt-à-porter haut de gamme Sonia Rykiel (février 2012), souligne cette nouvelle étude, intitulée “Les Stratégies des groupes de luxe”, dont l’AFP a eu connaissance vendredi.
Le Qatar, par exemple, montre lui aussi ses ambitions: il a repris Le Tanneur en mai 2011, acquis une participation de 1,03% dans LVMH fin 2011 et de 5,19% dans Tiffany en avril 2012.
Par ailleurs, “les pays émergents ont d’ores et déjà déjà lancé des marques très puissantes” et les fleurons du marché doivent désormais se positionner “sur des marchés où les acteurs locaux ont déjà acquis une solide notoriété”, dit l’auteure de l’étude, Laure-Anne Warlin.
“Le chinois Chow Tai Fook est ainsi le leader mondial en matière de joaillerie grâce au puissant réseau de distribution qu’il a construit en Asie”, s’appuyant sur 1.500 points de vente dans plus de 320 villes, “quand un acteur comme Tiffany ne compte “que” 230 magasins au niveau mondial.
à New York, le 29 novembre 2011 (Photo : Spencer Platt) |
En outre, les pays émergents compensent peu à peu “leur moindre maîtrise de la chaîne de valeur”, relève l’étude. “Ils déploient des stratégies innovantes pour monter en puissance rapidement: certains acteurs délocalisent par exemple leur production dans les berceaux du luxe pour bénéficier de l’attractivité de leurs savoir-faire”.
Et de citer l’exemple du joailler chinois Qeelin, qui s’appuie sur le savoir-faire français. Ou celui de She Ji Sorgere, qui “a l’ambition de produire la première griffe chinoise de luxe en délocalisant sa production en Italie et en faisant appel au service d’un styliste italien reconnu”. Ou encore dans le domaine de l’horlogerie, la marque chinoise Sea-Gull, qui a recours à des designers suisses ayant travaillé pour Tissot.
“Cette stratégie de +made with+ participera à une redistribution des cartes du marché du luxe dans les prochaines années”, affirme l’étude.
Elle met par ailleurs en garde contre certaines menaces qui planent sur le marché du luxe, qui a affiché en 2011 mais aussi début 2012 des croissances exceptionnelles, de LVMH à Swatch en passant par PPR, Hermès ou Prada: la crise économique en Europe, une croissance en Asie et en Amérique latine qui devrait être moins bonne qu’en 2010, des dynamiques de croissance dans le luxe qui varient nettement selon les segments…
Ces éléments “invitent à la prudence”, estime l’auteure de l’étude, qui met en garde contre “un climat d’euphorie”.
Selon l’étude de Xerfi-Precepta, “les groupes de luxe doivent plus que jamais miser sur une internationalisation équilibrée de leurs activités”.
Et ce, sans sous-estimer les marchés matures (Europe, Etats-Unis, Japon) qui génèrent toujours l’essentiel des ventes du marché, et en diversifiant les implantations dans les pays émergents. Il ne faut pas “idéaliser la Chine”, rappelle encore l’étude: c’est une terre d’expansion mais aussi le principal lieu de fabrication des contrefaçons de luxe.