Le choc subi cette semaine par beaucoup d’entre nous concerne l’arrestation de 5 hauts fonctionnaires de l’Etat âgés de plus de 65 ans ayant démarré vers les années 70 et dont certains sont connus pour être des serviteurs intègres de l’Etat avec un grand “E“.
Parmi eux, il y a des gens qui ont géré des milliards de dinars et qui vivent modestement dans une villa acquise dans des conditions normales pour tout fonctionnaire: circuit SNIT ou AFH, ensuite CNEL, etc. Certains ont quitté leur bureau à la retraite à pied, n’ayant pas eu les moyens de s’acheter un véhicule, et ces gens-là sont plus nombreux qu’on ne le pense; ils ont à leur honneur d’avoir créé l’ossature de l’administration. C’est aujourd’hui ce qui permet à ce pays de tourner encore malgré tous les coups de boutoir du sort.
Leur tort c’est d avoir été des fonctionnaires modèles et d’avoir obéi aux ordres, sans plus. J’avoue avec amertume que sortir des sexagénaires de leur retraite paisible pour les enfermer parce qu’un emploi fictif a été créé par un esprit maléfique proche du pouvoir, c’est comme utiliser un marteau pour tuer une mouche alors que les cailloux s’amoncellent sur notre chemin. Est-ce le plus urgent cet exemple?
Cet emploi fictif a eu le culot de continuer de percevoir ses émoluments jusqu’au jour où une âme charitable a jugé utile de vendre la mèche, un calcul rapide a monté que cette dame a coûté à l’Etat plus d’un million de dinars, et pour un million de dinars que personne d’autre que cette dame n’a perçu. Fallait-il enfermer des gens irréprochables, avec toutes les conséquences que cela peut avoir?
Cette initiative on ne peut malheureuse crée un fâcheux précédent, et la boîte de Pandore, quand elle s’ouvre, laissera s’échapper n’importe quoi, n’importe comment, visant n’importe qui. Comme disait si bien Fouché, le fameux ministre de l’Intérieur qui servit aussi bien le roi que la République, «chacun a quelque chose à se reprocher, l’important est de savoir l’utiliser au bon moment». Donc chacun d’entre nous a un pied dehors et un pied dedans ……
Car comme je l’ai dit dès le 14 janvier dans un de mes papiers (“Tunisie : Coupables ou capables?“), nous sommes tous coupables, les uns par mutisme, les autres par indifférence, les autres encore par calcul et par complicité. Alors que faire: relancer la chasse aux sorcières? Depuis toujours elle n’a jamais rien donné; se relancer dans l’arbitraire? Saddam en a fait les frais, lui qui arrêtait qui bon lui semble …
Messieurs, du bon sens, notre pays semble sortir lentement du doute et que la sagesse prime car si la vengeance est un plat qui se mange froid, son indigestion est mortelle …