Lors du colloque sur l’enrichissement illicite, Abdelkader Zgolli, président de la Cour des Comptes a, pour la première fois, dressé un état des lieux de l’application de la déclaration sur l’honneur des biens des membres du gouvernement et de certaines catégories d’agents publics, et mis sur la table une série de propositions destinées à améliorer la loi y afférente.
Théoriquement, la Tunisie a rejoint, d’une certaine façon, le groupe des pays développés lorsque, le 10 avril 1987, elle s’est dotée d’une loi de déclaration sur l’honneur des biens des membres du gouvernement et de certaines catégories d’agents publics. L’arrimage aux pays les plus avancés semblait fortement confirmé avec la ratification, le 23 septembre 2008, de la Convention des Nations unies contre la corruption (CNUCC). Après le 14 janvier 2011, on a su avec certitude –parce que le soupçon de corruption était là depuis plusieurs années- qu’il n’en était absolument rien. Et on en a eu la confirmation lors du colloque sur l’enrichissement illicite organisé mercredi 6 juin 2012 par la présidence de la République et le PNUD (Programme des Nations unies pour le développement). Car le président de la Cour des Comptes, Abdelkader Zgolli -laquelle Cour est chargés de réceptionner les déclarations-, a, «pour la première fois», selon lui, en 25 ans d’existence de ce texte, pu en présenter les caractéristiques et, surtout, les faiblesses.
La plus importante d’entre celles-ci est que la loi ne s’applique pas aux plus importantes personnalités –président de la République, députés, présidents de partis politiques, du Conseil de la concurrence, de l’Instance Nationale des Télécommunications, du Conseil du Marché Financier, etc.
De même, sont exclus de la déclaration les biens se trouvant à l’étranger et les enfants majeurs de la personne concernée par la déclaration. En outre, alors qu’ailleurs des organismes –toutefois d’un rang moins élevé que la Cour des comptes, précise M. Zgolli- ont été chargés de contrôler le respect de cette procédure, en Tunisie un arrêté du Premier ministre a confié cette tâche à chaque ministre pour le secteur relevant de sa compétence. Or, outre que ce suivi n’est devenu effectif qu’à partir de 2004, les listes des personnes concernées «n’étaient pas actualisées», critique le président de la Cour des comptes.
Plus grave encore, la loi n’a chargé personne de vérifier le contenu des déclarations.
Donc, il est aujourd’hui «nécessaire de mettre en place un nouveau régime de déclaration des biens qui renforce la transparence et soit un outil efficient de lutte contre l’enrichissement illicite», recommande M. Zgolli.
Le président de la Cour des Comptes propose à cet effet d’étendre l’obligation de la déclaration aux plus importantes personnalités (chef de l’Etat, présidents des partis politiques, etc.), de mettre en place un mécanisme efficient de contrôle de l’accomplissement de la formalité et du contenu de la déclaration, d’actualiser la liste des biens devant être déclarés, d’instaurer des pénalités plus lourdes pour les contrevenants, etc.
Quelle que soit l’instance chargée d’effectuer ce travail –la Cour des Comptes ou une nouvelle entité à créer-, M. Zgolli appelle à la doter d’importants moyens humains –une centaine d’employés, estime le président de la Cour des comptes.