Zone euro : le marché de la dette sous tension malgré la victoire de la droite en Grèce

photo_1340019064101-1-1.jpg
à la bourse de Madrid (Photo : Javier Soriano)

[18/06/2012 11:31:59] PARIS (AFP) La victoire de la droite pro-européenne aux élections législatives grecques n’a pas réussi lundi à rétablir l’accalmie escomptée sur le marché de la dette où les taux espagnols à 10 ans franchissaient un nouveau record au-delà des 7% et les rendements italiens s’envolaient.

Vers 12H30 (10H30 GMT), le rendement de l’emprunt espagnol de référence, qui évolue en sens inverse de la demande, montait à 7,073% contre 6,838% vendredi soir, une première depuis la création de la zone euro.

En outre, la prime de risque –surcoût payé par l’Espagne pour emprunter par rapport à l’Allemagne– a atteint le niveau historique de 559 points (5,59 points de pourcentage).

Dans la foulée, le taux de l’Italie s’inscrivait en forte hausse, à 6,027% contre 5,912% vendredi. Les difficultés financières du pays font en effet craindre qu’il ait un jour besoin d’être lui aussi sauvé par l’Europe.

Le marché de la dette s’était pourtant nettement détendu en début de séance, bénéficiant d’un bref répit après la victoire de la droite pro-européenne en Grèce.

“En tout début de journée, les taux ont été aidés par ces résultats”, mais la tendance s’est très rapidement retournée, indique Patrick Jacq, stratégiste obligataire chez BNP Paribas.

La droite a remporté de justesse les élections législatives dimanche devant la gauche radicale anti-austérité. Les tractations vont s’engager pour former une coalition avec les socialistes du Pasok, arrivés en troisième position, et un parti de gauche modérée.

Le gouvernement à venir devra convaincre ses créanciers internationaux de poursuivre le versement de l’aide internationale, conditionnée à des mesures d’austérité.

Pour René Defossez, analyste chez Natixis, “le plus dur reste à venir pour le pays confronté à une situation économique catastrophique, à une administration fiscale qui n’arrive plus à lever l’impôt et à des retraits massifs de ses établissements bancaires”.

Le résultat des législatives en France inquiète aussi les investisseurs.

“Le fait que le Parti socialiste ait obtenu la majorité absolue renforce la position de François Hollande sur la croissance et devrait, dans un premier temps au moins, accroître les tensions au sein du couple franco-allemand”, estime M. Defossez.

Autre point de tension, les risques qui pèsent sur Madrid et notamment sur son secteur bancaire sont loin d’avoir disparu.

“L’attention se replace sur l’Espagne où les derniers développements continuent de nous inquiéter fortement”, indique Ciaran O’Hagan chez Société Générale, alors que l’annonce du prêt européen qui sera accordé aux établissements bancaires de la péninsule n’a pas réussi à calmer les marchés.

Madrid devra demander entre 60 et 65 milliards d’euros à ses partenaires européens pour renflouer ses banques, selon le rapport préliminaire des deux cabinets d’audit chargés d’inspecter leurs comptes, auquel a eu accès le quotidien espagnol ABC. Mais, d’après certaines rumeurs, les besoins en recapitalisation pourraient être bien supérieurs.

En attendant, le taux de créances douteuses des banques ibériques, indice de leur vulnérabilité, a encore progressé en avril, atteignant un nouveau record depuis 1994 à 8,72%. Ces créances sont principalement des crédits immobiliers susceptibles de ne pas être remboursés.

La tension sur le marché de la dette n’épargnait pas Paris et Berlin.

Le taux de l’obligation française à 10 ans progressait à 2,582% contre 2,576% vendredi et celui du Bund allemand à 1,442% contre 1,436%.

“Depuis l’annonce du prêt aux banques espagnoles, les investisseurs ont tendance à considérer que toutes les dettes de la zone euro sont dans le même panier et celle de l’Allemagne est beaucoup moins perçue comme une valeur-refuge”, souligne M. Defossez.