Espagne : pas de répit pour Madrid au lendemain des élections grecques

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La Bourse de Madrid, le 18 juin 2012 (Photo : Javier Soriano)

[18/06/2012 16:45:30] MADRID (AFP) L’Espagne était de nouveau lundi au coeur de la tempête dans la zone euro, malgré la victoire de la droite pro européenne aux élections grecques qui n’a pas empêché les marchés de repartir à l’attaque, les taux d’emprunt espagnols atteignant des niveaux alarmants.

S’il éloigne le spectre d’une sortie de la Grèce de l’euro, le résultat des élections n’a laissé aucun répit aux pays considérés comme les plus vulnérables de l’union monétaire, l’Espagne, dans l’attente d’un plan d’aide européen pour ses banques, mais aussi l’Italie.

Lundi, les taux que devait payer l’Espagne pour se financer à dix ans ont atteint un niveau record, à plus de 7%, jugé insoutenable sur la durée.

La prime de risque, soit le surcoût que doit payer l’Espagne par rapport à l’Allemagne pour se financer, affichait elle un nouveau seuil historique à 589 points de base (5,89 points de pourcentage).

Quant à la Bourse de Madrid, elle a plongé dans le rouge après une brève embellie et terminé la séance en chute de 2,96%.

Le parti de droite de la Nouvelle Démocratie, vainqueur à l’arraché des élections grecques, tentait pendant ce temps de former au plus vite une coalition, afin d’ancrer le maintien du pays dans la zone euro.

“Le résultat des élections dissipe les inquiétudes à court terme. Nous avons gagné du temps, l’Union européenne a laissé ses problèmes derrière elle”, juge Federico Steinberg, chercheur de l’Institut elCano à Madrid.

Pression des marchés

Mais une fois écarté le scénario du pire, qui faisait redouter un possible effet domino à l’Espagne de la crise grecque, la quatrième économie de la zone euro, en pleine récession, n’en reste pas moins plongée dans de dangereuses turbulences.

“L’économie espagnole connaît des problèmes importants, en particulier le manque d’accès au crédit et le chômage élevé” à 24,44%, souligne Federico Steinberg.

“De plus, elle subit l’impact de facteurs externes, avec l’incertitude en Grèce et de manière générale l’imprécision dans l’Union européenne sur l’avenir de l’euro. Les élections en Grèce dissipent l’un de ces doutes mais ne le résolvent pas”, ajoute-t-il. “Il reste maintenant à voir ce qui se passe au niveau européen”.

Confrontée à une pression extrême des marchés comme de ses partenaires européens, l’Espagne a été contrainte de lancer le 9 juin un appel à l’aide pour ses banques, asphyxiées par leur exposition à l’immobilier.

Mais l’annonce d’un plan de sauvetage, sous forme d’un prêt pouvant atteindre cent milliards d’euros, n’a pas apaisé les esprits.

Ses contours restent flous, son montant reste à chiffrer, et Madrid se retrouvera de fait sous étroite surveillance de l’Europe et du FMI, contrainte de respecter scrupuleusement ses engagements en matière de réformes structurelles.

“Le résultat des élections grecques permet d’éliminer le scénario extrême, celui d’une sortie désordonnée de la Grèce de la zone euro, celui qui a soulevé tant de craintes”, remarquait Natalia Aguirre, analyste chez Renta 4.

Mais si la question de la recapitalisation des banques espagnoles reste en suspens, les marchés, surtout, ne semblent plus se contenter de solutions partielles à la crise de la zone euro.

Créances des banques

“Les doutes du marché sur l’avenir de l’euro continuent de peser, ainsi que leur lassitude face aux solutions partielles proposées par l’Europe pour régler ses problèmes”, estimait Daniel Pingarron, analyste de la maison de courtage IG Markets.

Pour l’Espagne, la prochaine échéance sera dès mardi une émission obligataire au cours de laquelle elle tentera d’emprunter deux à trois milliards d’euros.

Pour chiffrer sa demande d’aide, Madrid attend de connaître, d’ici à jeudi, les résultats d’un audit indépendant de son secteur bancaire: les besoins pourraient être évalués entre 60 et 70 milliards d’euros, ce qui creusera la dette publique du pays.

Autre signe inquiétant, les créances douteuses des banques espagnoles, principalement des crédits immobiliers susceptibles de ne pas être remboursés, ont atteint en avril un nouveau record de 152,740 milliards d’euros, soit 8,72%.

Ce chiffre a d’ailleurs “ravivé les doutes sur le sauvetage du secteur bancaire, son montant et l’impact qu’il aura sur les finances publiques”, remarquait Daniel Pingarron.