L’Union européenne progresse vers le fédéralisme à petits pas et sans le dire

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UE, Herman Van Rompuy le 18 juin 2012 lors du sommet du G20 au Mexique (Photo : Bertrand Langlois)

[22/06/2012 09:09:47] BRUXELLES (AFP) La crise de la dette souveraine impose aux Etats de l’Union européenne de se montrer plus solidaires dans le partage du fardeau, mais les abandons de souveraineté exigés en contrepartie inquiètent, et le saut vers une Europe fédérale se fait dans la discrétion

“Nous devons aller vers davantage d’intégration financière, budgétaire et économique. Nous aurons une union économique pour la fin de l’année”, avait annoncé le président de l’UE, Herman Van Rompuy lors du sommet du G20 au Mexique.

A ce stade, il ne s’agit pas de proposer une union politique, mais le rapport que M. Van Rompuy a été chargé de préparer pour le sommet européen des 28 et 29 juin avec les présidents de la Commission européenne, de la Banque centrale européenne (BCE) et de l’Eurogroupe “est très ambitieux pour l’intégration, avec des idées concrètes”, a confié à l’AFP un responsable européen.

“Il fonde cette intégration sur une union économique, une union bancaire, une union budgétaire et une union politique”, a-t-il souligné.

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à Berlin (Photo : John Macdougall)

Dans un entretien publié vendredi par cinq journaux européens, le chef de la diplomatie allemande, Guido Westerwelle a souligné que “la crise a montré la nécessité d’accélérer l’intégrattion européenne”. Il s’agit, a-t-il expliqué, de “renforcer l’Europe pour la rendre plus efficace et capable d’agir”.

Le chef du gouvernement italien Mario Monti, de sensibilité fédéraliste, soutient cette démarche. “Il faut rendre l’euro plus crédible”, insiste-t-il.

“Avec une Europe fédérale, nous n’aurons plus cette discontinuité dans les processus décisionnels”, affirme son ministre en charge des Affaire européennes Enzo Moavero.

Les chefs de file des Libéraux et des Verts européens vont réunir un “sommet alternatif” le 28 juin à Bruxelles pour réclamer un engagement en ce sens.

Mais le fédéralisme est “un concept très sensible dans certains pays”, car il signifie céder des pans de souveraineté nationale à des instances supérieures européennes, explique un responsable européen.

Le Royaume-Uni ne veut pas en entendre parler. La France est pour sa part très rétive à toute perte de sa souveraineté. Les décisions doivent revenir aux chefs d’Etat et de gouvernement européens, soutient Paris.

Ces réserves sont prises en compte. “Le mot fédéralisme n’est pas utilisé dans le document que présentera Herman Van Rompuy, car il ne faut pas réveiller les vieux démons”, a expliqué un responsable européen.

“Le président François Hollande ne veut pas raviver” les plaies ouvertes en France après l’échec du référendum sur la constitution européenne en 2005, a-t-il ajouté.

Aux Pays-Bas où les électeurs avaient également rejeté le projet de constitution européenne des élections législatives anticipées sont prévue le 12 septembre “et il ne faut pas braquer les débats” sur l’avenir institutionnel de l’UE, a insisté ce responsable européen.

“La construction européenne est une suite de compromis”, rappelle-t-il. Elle comporte déjà des éléments de fédéralisme, comme la BCE et la Cour européenne de Justice (CEJ), a-t-il souligné.

Le président français François Hollande préconise en effet d’avancer “étape par étape”.

Dans un mémoire adressé à Herman Van Rompuy, le président français a recommandé “d’établir une feuille de route pour 10 ans afin de permettre d’examiner les conditions d’intégration, notamment budgétaire, et le cadre institutionnel et politique permettant de parvenir à ces objectifs en assurant la nature démocratique des décisions”.

Cette politique des étapes va s’appliquer aux euro-obligations réclamées par Paris. “Une communautarisation des dettes exige nécessairement une plus forte intégration politique, et nécessitera certainement plusieurs années”, a expliqué le Premier ministre français Jean-Marc Ayrault à l’hebdomadaire allemand Die Zeit.