Terres rares : faute d’accord avec Pékin l’UE veut “un groupe spécial” à l’OMC

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à Pékin, le 14 février 2012. (Photo : How Hwee Young)

[27/06/2012 12:10:58] BRUXELLES (AFP) Faute d’accord avec la Chine sur ses exportations de terres rares, des minerais indispensables à l’industrie, l’UE a demandé mercredi à l’OMC d’établir un “groupe spécial” pour examiner le différend avec Pékin, a annoncé la Commission européenne.

“L’Union européenne a demandé aujourd’hui la création d’un groupe spécial de règlement des différends à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) concernant les restrictions à l’exportation de la Chine sur les terres rares, tungstène et molybdène”, a indiqué Bruxelles dans un communiqué.

Les Etats-Unis, l’Union européenne et le Japon s’étaient associés en mars dernier pour déposer une plainte devant l’OMC contre la Chine alors que Pékin impose de nouvelles restrictions aux exportations de terres rares utilisées dans la haute technologie.

Malgré “les efforts pour trouver une solution avec la Chine”, l’UE et ses partenaires américains et japonais ont décidé de passer “à l’étape suivante” dans les litiges de l’OMC, a indiqué le communiqué de la Commission.

La constitution d’un “groupe spécial” (panel) survient en cas d’échec de solution amiable.

Le groupe spécial est en général constitué de trois personnes, proposées par le secrétariat de l’OMC. Il a pour mission d’examiner, à la lumière des accords de l’OMC, la question portée devant l’Organe de règlement des différends (ORD) et d’aider l’ORD à formuler des recommandations.

Le “groupe spécial” établit lui-même le calendrier de ses travaux et choisit de faire ou non appel à des experts. Il doit rendre, en principe, son rapport dans un délai de six mois à compter de la date de formation du panel. Ce délai peut être prolongé mais ne doit pas dépasser neuf mois. Un accord à l’amiable est encore possible pendant les travaux du groupe spécial.

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éen chargé du Commerce, Karel De Gucht, le 22 février 2012 à Bruxelles (Photo : Georges Gobet)

“Les restrictions de la Chine sur les terres rares et d’autres produits violent ses engagements envers l’OMC et continuent de fausser considérablement les marchés mondiaux au détriment de nos entreprises”, a estimé le commissaire européen chargé du Commerce, Karel De Gucht.

“Pékin n’a pas pris des mesures pour supprimer ces restrictions à l’exportation. Nous regrettons de ne pas avoir d’autre choix que de résoudre ce litige de cette façon”, a-t-il ajouté.

La Chine est aujourd’hui en situation de quasi-monopole avec plus d’un tiers (35%) des réserves accessibles et 97% du marché des terres rares, comme le cérium ou le lithium. Les propriétés chimiques et électromagnétiques de ces éléments sont mises à profit pour fabriquer éoliennes ou téléphones portables.

Cette affaire illustre les frictions entre Pékin, qui espère faire de ces ressources stratégiques un atout pour son développement, et les vieilles puissances industrielles qui comptent sur ces minerais extraits à bas prix en Chine pour nourrir leurs technologies de pointe (électronique, production d’énergie, motorisations hybrides, etc.).

La Chine a fixé des quotas d’exportation de 30.000 tonnes pour 2012, autant qu’en 2011. Mais en 2011, ses exportations de terres rares ont à peine atteint la moitié des quotas.

Le conflit pose aussi des questions environnementales. Les conditions d’extraction de certains de ces minerais sont régulièrement dénoncées comme catastrophiques, entre rejets de déchets toxiques, pollution des nappes phréatiques, gâchis de terres arables et manque de protection pour les ouvriers.

Un premier différend avec la Chine avait été porté devant l’OMC concernant les exportations de matières premières. Ce dossier concernait la bauxite, le charbon à coke, la fluorite, le magnésium, le manganèse, le silicium métallurgique, le carbure de silicium, le phosphore jaune et le zinc, autant de minerais où la Chine est en position dominante.

Saisie en 2009 d’un recours de l’UE, des Etats-Unis et du Mexique, l’OMC avait jugé illégales à l’été 2011 la série de restrictions qu’imposait la Chine sur les exportations de ces neuf matières premières cruciales pour l’industrie européenne.