En 2011, la vie de cet homme d’affaires allemand vivant en Tunisie depuis une trentaine d’années a totalement basculé. D’abord, sur le plan personnel. Comme la plupart des Tunisiens –et il l’est en partie puisqu’il s’est marié à une Tunisienne-, Thomas Seindensticker s’est passionné pour la Tunisie d’après le 14 janvier 2011. A telle enseigne qu’il s’est investi à fond dans un effort visant à encourager une partie des Tunisiens, en l’occurrence ses employés, à «consommer» l’un des fruits les plus précieux de la révolution de la citoyenneté, absolument bafouée sous l’ancien régime, et dont l’un des attributs est l’exercice du droit de vote, à la fois droit et devoir. D’ailleurs, c’est à cette occasion que l’homme d’affaires s’est révélé au public, grâce à un article du quotidien «Le Temps».
S’inquiétant du manque d’intérêt initial pour les élections du 23 octobre 2011, Thomas Seidensticker a décidé d’accorder à ses employés une journée de repos pour leur permettre d’aller s’inscrire sur les listes électorales. Pour ceux qui ont prouvé l’accomplissement de cette formalité, document de la municipalité à l’appui, ce fut une journée de repos payée. Puis une autre demi-journée –payée pour tous- a été dédiée à un séminaire organisé avec une association en vue d’initier les employés de M. Seidensticke aux ABC d’une vie politique démocratique.
Mais la vie de l’homme d’affaires germano-tunisien a également basculé professionnellement. En se lançant dans de nouvelles activités, après avoir abandonné le textile dans lequel il avait débuté et bien gagné sa vie avec son partenaire italien, Luciano Fragola.
Entamée dans les années 80, l’aventure de Thomas Seidensticker dans le textile s’est achevée lorsque, raconte l’intéressé, «HM pour lequel nous avons produit plus de 4 millions de Jeans en Tunisie nous a proposé d’aller en Chine en nous promettant un contrat d’exclusivité pour deux ans. Ce qui, s’agissant de la Chine, est énorme».
L’associé italien de Thomas Seidensticker tique. Agé de près de 70 ans, il se voyait mal repartir à zéro dans un autre pays. Car, expliqua-t-il à son partenaire, «on aura besoin de trois à quatre ans pour construire quelque chose en Chine. Il nous faudra ensuite six à sept ans pour le retour sur investissement. Je n’ai plus l’âge de faire cela. Donc, la Chine je ne veux pas y aller».
Thomas Seidensticker n’étant lui-même, à vrai dire, guère enthousiaste à l’idée de laisser sa famille en Tunisie ou de lui imposer de s’expatrier avec lui en Chine, les deux amis décident en 2007 de vendre à un industriel indien la totalité de leur activité dans le textile, en Tunisie et en Italie.
Et, bien que «j’adore cette activité, souligne-t-il, j’ai commencé à investir dans un tout autre domaine: l’investment banking». En fait, Thomas Seidensticker est venu à cette activité par le plus grand des hasards. Un jour, ses amis, les deux frères Kilani –aux commandes d’un groupe actif dans l’industrie pharmaceutique, les cosmétiques (chaîne de boutiques Fatales) et dans la céramique (MTC), lui demandent de leur trouver un partenaire pour développer leur activité dans ce secteur.
Thomas Seindensticker reprend alors contact avec la banque d’affaires allemande -IEG Investment Banking- (ayant réalisé la cession de ses entreprises textiles), pour faciliter l’entrée de Duravit au capital de la Manufacture Tunisienne de Céramique (MTC) et en profitera pour y prendre une participation.
Cette expérience ayant été un succès, Thomas Seidensticker et IEG Investment Banking décident de poursuivre leur collaboration sur la Tunisie en créant un cabinet -IEG Corporate Finance- ayant pour objet la recherche de partenaires étrangers pour des sociétés tunisiennes, et des partenaires tunisiens pour des investisseurs qui voudraient s’implanter en Tunisie.