“Mettre en place un audit de la dette de la Tunisie” est l’une des principales demandes de l’appel “pour audit de la dette de la Tunisie”, lancé par l’association RAID (Rassemblement pour une alternative internationale de développement), qui organise les 9, 10 et 11 juillet 2012, à Tunis, la deuxième session de formation sur le thème “dette, processus constituant et souveraineté” aspire à constituer une coalition nationale (syndicats, associations et partis) en vue d’une plus grande sensibilisation à cette question.
Fathi Chamkhi, porte-parole de RAID, a déclaré, à la TAP, que cet appel, lancé en mai 2012, a été adressé à tous les partis et associations sans exception, et a reçu la signature 25 associations et 4 partis.
La mise en place de cet audit devra associer des représentants de la société civile et des experts internationaux indépendants. L’objectif est de permettre de faire la lumière sur la destination des fonds empruntés, les circonstances qui entourent la conclusion des contrats de prêts, la contrepartie de ces prêts (les conditionalités) ainsi que leurs impacts environnementaux, sociaux et économiques.
L’association RAID ajoute que les dettes contractées par le président déchu sont considérées comme des ‘dettes odieuses”. Elle se réfère dans cet appel à la doctrine de la dette odieuse, formulée par le juriste Alexander Sack en 1927, affirmant que “si un pouvoir despotique contracte une dette non pas pour les besoins et dans les intérêts de l’Etat, mais pour fortifier son régime despotique, réprimer la population qui le combat…cette dette est odieuse pour la population de l’Etat entier et n’est pas obligatoire pour la nation: c’est une dette de régime, dette personnelle du pouvoir qui l’a contractée, par conséquent elle tombe avec la chute de ce pouvoir”.
RAID dénonce l’attachement des autorités tunisiennes à rembourser les dettes du dictateur à travers l’adoption du budget complémentaire de l’Etat pour 2012 qui indique dans sa page 6 que “l’Etat continuera à respecter ses engagements et ses obligations en payant le service de la dette publique dans les délais”, selon le dossier de presse de l’association relatif à deuxième session de formation précitée.
Les signataires de l’appel demandent à l’Assemblée nationale constituante (ANC), au président de la République et au gouvernement de décider “la suspension immédiate du remboursement de la dette extérieure publique accumulée sous le régime de la dictature (avec gel des interêts) et l’annulation de la dette odieuse que déterminera l’audit de la dette”.
La Tunisie a besoin, aujourd’hui, selon l’association, de mobiliser toutes ses ressources financières pour faire face aux multiples besoins qu’exige la situation exceptionnelle que le pays traverse (réduction de la pauvreté, résorption du chômage…).
Les demandes de RAID s’appuient également sur l’appel des 120 parlementaires européens et nationaux de Grèce, d’Allemagne, de Belgique et de France pour “un audit des créances européennes à l’égard de la Tunisie”. L’association se réfère, par ailleurs, à la résolution du Parlement européen du 10 mai 2012 sur le commerce pour le changement:stratégie de l’Union européenne en matière de commerce et d’investissement pour le sud de la Méditerrannée après les révolutions du Printemps arabe, notamment le point 6 qui “juge odieuse la dette publique extérieure des pays d’Afrique du Nord et du Proche Orient, sachant qu’elle a été accumulée par les régimes dictatoriaux par le biais principalement de l’enrichissement personnel des élites politiques et économiques…”.
La deuxième session de formation, qui se tient dans le cadre de l’université populaire de Tunisie (UPT), met l’accent sur l’approche économique de la souveraineté populaire qui est “trop souvent négligée dans les débats et réflexions actuels”, toujours selon le RAID. Elle est organisée avec le concours du réseau CADTM Afrique (Comité pour l’annulation de la dette du Tiers Monde), le collectif Auditions des créances européennes de la Tunisie (ACET), et le soutien de l’UGTT et de la fondation Frederich Ebert.
Plusieurs conférences et ateliers de formation sont programmés dans le cadre de cette session. Ils traiteront de questions ayant trait au cadre du processus révolutionnaire, plus particulièrement celles en rapport avec endettement extérieur public, la protection des richesses naturelles, la souveraineté économique, la Banque centrale et la souveraineté monétaire, la démocratie, le processus constituant et le libre-échange.
Des experts tunisiens et étrangers mais également des représentants du monde arabe, de l’Afrique et d’Europe venus de 18 pays contribueront aux différentes actions prévues dans le cadre de cette session.
Créé en 1999, RAID est une organisation non gouvernementale qui oeuvre à identifier une alternative mondiale au développement. Il est membre des réseaux internationaux Attac (organisation altermondialiste) et Cadtm. Il se donne pour mission de renforcer le processus de la révolution tunisienne à travers la création d’un espace libre de réflexion et d’analyses avec pour objectif de promouvoir les différentes formes de lutte contre la mondialisation, le capitalisme et l’hégémonie. RAID s’attèle également à instaurer les droits politiques, sociaux, culturels et environnementaux de tous les citoyens et une égalité effective entre les genres.
WMC/TAP