Tunisie : Le centre Carter appelle à hâter la création de l’instance électorale indépendante

elections-100712-220.jpg«Après six mois de la mise en place du gouvernement actuel, on voit que rien n’est fait au niveau du processus électoral. Aucun projet de loi gouvernemental n’a été soumis au vote de l’Assemblée nationale constituante. Il y a plusieurs initiatives éparses dans ce sens, mais aucune concrétisée», indique Sabina Vigani, directrice du bureau du Centre Carter pour la Tunisie, lors de la conférence de presse du 10 juillet 2012.

La dernière annonce en date concernant la création d’une instance électorale permanente et indépendante remonte à deux mois. Un groupe d’experts a été désigné par le gouvernement pour rédiger un projet de loi, qui a fait enfin objet d’une fuite sur les réseaux sociaux. Cette fuite n’a pas manqué de provoquer de vives réactions, de part et d’autre. Les modalités de candidatures proposées et les mécanismes de nomination des futurs membres ont été perçus comme une tentative par la Troïka de contrôler l’instance électorale. Il semblerait que ce projet soit actuellement en cours de révision.

Du conditionnel…

Un second projet a été proposé par l’Association tunisienne pour l’intégrité et la démocratie des élections (ATIDE). Un troisième a été préparé par l’Union générale des travailleurs tunisiennes (UGTT), la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme (LTDH) et l’Ordre des avocats tunisiens. Selon le Centre Carter, le groupe d’experts du gouvernement s’est réuni avec l’UGTT et aurait préparé un projet commun.

«On emploie le conditionnel parce qu’aucune annonce officielle n’a été faite sur le déroulement du processus. Tout se passe en catimini. D’ailleurs, on déplore l’absence de transparence et de communication à ce niveau qui engendre toutes sortes de spéculations», affirme Mme Vigani.

Dans sa déclaration sur le sujet, le Centre Carter indique que les trois projets ont plusieurs points en commun. Mais le principal point de divergence concerne les mécanismes de sélection et de nomination des membres de l’instance électorale, avec des options allant d’un processus de sélection mené par les partis politiques à un processus conduit par des corps professionnels.

Le Centre estime que le gouvernement tunisien et l’ANC devraient s’appuyer sur les initiatives existantes pour lancer sans plus tarder, un processus de consultation inclusif et transparent. «C’est un pas très important. Il ne s’agit pas de faire un projet de loi sur mesure comme il a été le cas pour l’ISIE. Ce sera un mauvais signe», explique Mme Vigani.

Consultation…

Le Centre Carter appelle le gouvernement à lancer un processus de consultation transparent et inclusif avec les acteurs concernés, afin d’aboutir à un consensus autour du projet de loi qui sera présenté à la Constituante. Cette consultation devrait impliquer les partis politiques, les organisations de la société civile et les associations tunisiennes d’observateurs électoraux.

Le Centre recommande aussi que les candidats au membership de l’instance électorale permanente soient recrutés en fonction de leurs mérites et éventuellement suite à des audiences publiques afin de promouvoir la transparence du processus de sélection et renforcer la légitimité de la future instance. Leur nomination devrait faire l’objet d’un vote à la Constituante, qui devrait, à son tour, exiger une majorité qualifiée afin que les membres bénéficient d’un large soutien politique.

La troisième recommandation concerne la détermination du mandat de l’instance électorale. Les domaines de compétence pour lesquels l’instance a seule et entière responsabilité doivent être distingués de ceux où elle a des rôles de supervision et de consultation. Cela permettrait, selon le centre américain, à l’instance de se concentrer sur son activité première et de mettre à profit l’expertise de l’administration publique et des institutions gouvernementales spécialisées par d’autres activités.

Transparence…

D’un autre côté, le Centre Carter estime que les rôles et responsabilités de l’organe de direction et de l’organe de gestion devraient être définis sans ambiguïté. Le premier doit avoir un pouvoir de prise de décision tandis que le second devrait avoir des responsabilités exécutives administratives, opérationnelles et financières.

Un autre point assez important sur lequel ont insisté les responsables du Centre, c’est la transparence, l’impartialité et l’indépendance de l’instance. «La transparence implique que l’accès à l’information soit facilité, une communication proactive, régulière et en temps utile sur les décisions, les activités et les aspects techniques du processus électoral, ainsi que des consultations régulières avec les parties prenantes afin de promouvoir la compréhension et l’acceptation des décisions. Un principe général de transparence devrait être inscrit dans la loi», indique la déclaration.

Enfin, le Centre recommande le respect du principe de parité parmi les membres de la future instance électorale. Selon le centre, la loi devrait contenir des mesures destinées à garantir ce principe.