Biocarburants : dans la Marne, la France tente de passer la deuxième

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éthanol (à g) issu de déchets agricoles (à d), à Pomacle-Bazancourt en octobre 2011 (Photo : Francois Nascimbeni)

[11/07/2012 10:48:00] POMACLE-BAZANCOURT (Marne) (AFP) Derrière une immense usine de sucre et d’éthanol, qui avale chaque année des centaines de milliers de tonnes de betteraves et de blé, se cachent les locaux du projet Futurol, dont la mission est de produire des biocarburants sans ingrédients comestibles.

Numéro 4 mondiale des biocarburants, la France est en course pour développer une deuxième génération de produits n’entrant pas en concurrence avec la production de céréales ou d’oléagineux. Mais le modèle économique reste un grand point d’interrogation.

Inauguré il y a neuf mois à Pomacle-Bazancourt (Marne), le bâtiment moderne de Futurol, atelier parcouru de tuyaux et de grandes cuves encore étincelantes, baigne dans une odeur douçâtre voisine du pruneau. C’est la première usine pilote en son genre –et pour l’heure la seule– de l’Hexagone.

Branches, pailles, herbes folles : ici, on transforme tout ce qu’on peut en carburant, à la condition que ça ne se mange pas ou presque. Broyés, cuits à la vapeur et à l’acide à 250 degrés, rongés par les enzymes et dopés par les levures, les végétaux crachent leur cellulose, transformée en sucre, puis en éthanol, c’est-à-dire en alcool.

Ce dernier est en tout point identique à l’éthanol dit de première génération qui sort de la vaste usine voisine du groupe Cristal Union. Sauf qu’il répond à une des principales critiques adressées aux biocarburants (elle-même sujette à débat): celle d’affamer les plus pauvres en faisant bondir les prix du blé, du maïs et des terres arables en général.

Des projets existent aussi pour des biodiesels “2G” afin d’utiliser bois et plantes à la place du colza.

Mais n’attendez pas la deuxième génération de carburants renouvelables en sauveur, prévient-on jusque dans les rangs de ses promoteurs.

“Je n’ai aucune prétention à remplacer la première génération, parce qu’on y arrivera pas”, tranche Frédéric Martel, le pilote du projet. “Mais j’y crois vraiment en complément”. Par exemple lorsque les cours des céréales flambent.

Encore trop cher

L’an prochain, les onze actionnaires de Futurol, parmi lesquels figurent le sucrier Téréos (Beghin Say) et Total, doivent décider si l’expérience s’arrête ou pas. Si le projet est validé, un prototype à la capacité 100 fois plus grande verrait le jour vers 2016.

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ée pour faire du bioéthanol, en octobre 2011 à Pomacle-Bazancourt (Photo : Francois Nascimbeni)

Mais les obstacles ne manquent pas: extirper de l’alcool de bois ou de la paille est un défi techniquement plus complexe qu’avec le grain ou de la betterave. Il faut trouver les approvisionnements importants des végétaux nécessaires. Conséquence: avec un prix de revient d’un euro le litre, l’éthanol 2G reste encore plus de deux fois plus cher que son aîné et presque trois fois plus que l’essence.

“L’objectif, c’est de les rattraper. On part de loin : en 2006, on était à 4 euros le litre”, se souvient M. Martel.

En France, environ 6,5% des carburants consommés sont des biocarburants, selon le Syndicat National des Producteurs d’Alcool Agricole (SNPAA). Une présence quasi-invisible, biodiesel et éthanol étant pour l’immense majorité vendus mélangés à l’essence ou au diesel ” classiques “.

La filière bénéficie d’un mécanisme de réduction fiscale (de 14 centimes le litre pour l’éthanol et 8 centimes pour le biodiesel) censé favoriser le leadership européen en biodiesel et permettre de résister aux deux géants de l’éthanol: le Brésil et sa canne à sucre, qui produit quatre fois plus que l’Europe et surtout les Etats-Unis et son maïs: dix fois plus.

En attendant, une troisième génération se profile déjà à l’horizon: du côté de Cristal Union, qui n’est pas associée à Futurol et dont le directeur de la branche éthanol Jérôme Bignon dit croire davantage aux technologies encore balbutiantes utilisant les algues et les bactéries.