élégué CGT de PSA porte un badge contre la fermeture du site le 13 juillet 2012 à Aulnay-sous-Bois (Photo : Thomas Samson) |
[13/07/2012 10:31:16] PARIS (AFP) Confronté à une multitude de plans sociaux sortis récemment du placard, l’Etat veut s’afficher comme pompier, sauvant les salariés français de patrons et d’actionnaires sans scrupules, mais ses marges de manoeuvre sont limitées face aux volontés de groupes privés dans un contexte de crise.
“Nous n’acceptons pas en l’état le plan” de restructuration de PSA Peugeot Citroën, a asséné jeudi au Sénat le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg.
Le verdict est clair, mais Peugeot est un groupe entièrement privé qui n’a pas de comptes à rendre à l’Etat.
“Les marges de manoeuvre sont effectivement très minces, surtout dans un contexte de retour à l’équilibre des finances publiques”, estime Eric Heyer, directeur adjoint du département analyse et prévision de l’Observatoire français des conjonctures économiques.
“A très court terme l’Etat peut simplement essayer d’obtenir des garanties sur le reclassement et la reconversion des salariés”, comme pour l’aciérie de Gandrange il y a quelques années, explique E. M. Mouhoud, professeur à l’Université Paris-Dauphine. “Mais à moyen terme il peut agir en faveur d’une relance de la demande car il s’agit moins d’un problème de coût du travail que de l’extrême faiblesse de la demande en Europe”, ajoute-t-il.
Dans les groupes où l’Etat est principal actionnaire, il est évidemment plus facile de changer les orientations. Quand fin 2011, un plan de restructuration d’Areva est révélé, concernant plus d’un millier d’emplois en France, le gouvernement de l’époque avait convoqué le patron du groupe nucléaire et finalement, le plan de départs volontaires prévu s’était transformé en simple gel des embauches.
Face à un groupe privé indépendant, la première arme du gouvernement – et souvent la seule – est de jeter l’opprobre publiquement et donc médiatiquement.
– réalité économique –
és de Sanofi le 12 juillet 2012 à Toulouse (Photo : Remy Gabalda) |
Arnaud Montebourg a ainsi clamé que le plan de réorganisation envisagé par Sanofi, qui pourrait supprimer un millier d’emplois, était “abusif”.
Le patron, Chris Viehbacher, a été convoqué début juillet à Bercy et le message délivré clair : “vous ne pouvez pas licencier alors que vous faites des bénéfices”. Au cabinet de Montebourg, on est certain d’avoir été “écouté”. Verdict en septembre quand Sanofi détaillera son plan.
Au-delà des convocations de patrons, le nouveau gouvernement reste encore assez flou sur ses moyens.
“Nous sommes d’abord dans une préoccupation de vérifier la réalité économique de ce qui se passe”, a affirmé M. Montebourg.
Des experts ont ainsi été mandatés pour aller voir chez PSA et ArcelorMittal.
à Paris (Photo : Kenzo Tribouillard) |
Concédant qu’il y aura des échecs, le ministre du Redressement productif estime devoir faire de “la médecine d’urgence”. Doux, Fralib, Technicolor… l’Etat veut mettre autour de la table patronat et syndicats et intervenir dans la recherche de repreneurs. “Dossier après dossier, nous rechercherons les solutions, à la fois économiques et sociales”, a promis le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault.
Si le gouvernement veut réfléchir à la rentrée sur l’encadrement des plans sociaux “abusifs”, il opte aussi pour une “méthode de sauvetage en temps réel”, avec l’installation de commissaires régionaux au redressement productif.
Pour limiter la casse sociale, l’Etat peut évidemment subventionner le chômage partiel. “C’est son seul moyen à court terme, mais cela coûte cher et si c’est une crise structurelle, on ne fait que déplacer le problème”, estime M. Heyer. Selon lui, l’Etat doit surtout “être un Etat stratège”, définissant précisément les secteurs d’avenir, méritant d’être soutenus, et ceux qui n’ont plus de perspective en France. “Auquel cas, il faut qu’il organise une transition pour les salariés.”
“L’Etat doit être de temps en temps dans la peau d’un investisseur et d’un stratège”, considère Eric Heyer, d’après qui les sureffectifs sont encore importants dans l’Union européenne. “Une croissance proche de zéro depuis 20 ans en Europe, cela se paie”, avertit M. Mouhoud.