Laurent Fabius, ministre français des Affaires étrangères, est en visite à Alger (dimanche 15 et lundi 16 juillet 2012). Au menu, la «décrispation» des relations franco-algériennes. Mais aussi l’Union Pour la Méditerranée (UPM), la situation en Syrie et au Nord du Mali.
On l’aura compris, lors de cette visite, M. Fabius abordera avec ses hôtes algériens plusieurs questions bilatérales mais aussi des dossiers chauds engageant l’avenir de la région.
Elle intervient quelques jours après la célébration du cinquantième anniversaire de l’indépendance de l’Algérie qui a été colonisée pendant 132 ans par la France (1830-1962), soit la plus grande colonisation dans la région avec en prime une intégration dans la République française: l’Algérie était considérée autant que les Bouches-du-Rhône (Marseille) un département français.
La mission «civilisatrice» de la colonisation
C’est dire le passif des relations franco-algériennes qui est resté vif malgré le temps qui est passé: l’Algérie est indépendante depuis 50 ans. Un passif fait, ici et là, de drames humaines: 1 million de morts algériens pendant la guerre d’indépendance (1954-1962), départ de pas moins de 700.000 français (les fameux Pieds-noirs) d’Algérie pour rejoindre la France et massacre de quelque 60.000 harkis (Algériens qui se sont battus contre leurs frères).
Un passif qui a été quelquefois ravivé par des responsables français au travers de quelques déclarations peu diplomatiques, le moins que l’on puisse dire. Comme celles relatives à la mission «civilisatrice» de la colonisation.
Aujourd’hui, l’heure semble à l’apaisement, sinon à la réconciliation du côté français. Le président François Hollande a déjà envoyé beaucoup de signaux tout le long de sa campagne électorale. Il avait adressé, en outre, le 5 juillet 2012, une lettre à son homologue, le président Abdelaziz Bouteflika, dans laquelle il estimait qu’il y «a place désormais pour un regard lucide et responsable» de la France sur son passé colonial. En ajoutant que «Français et Algériens partagent une même responsabilité, celle de se dire la vérité».
Apaisement aussi du côté algérien où les responsables apprécient à juste titre que la première visite du ministère français des AE pour un pays arabe soit pour l’Algérie.
La France pousse pour une intervention militaire
Dans une période aussi difficile que celle que traverse, par ailleurs, la France, cette dernière sait qu’elle se doit d’améliorer ses relations avec l’un de ses plus importants partenaires économiques dans la région euro-méditerranéenne. La France est le premier fournisseur de l’Algérie avec 7,03 milliards de dollars (environ 11,450 milliards de dinars) et son quatrième client avec 6,61 milliards de dollars (environ 10,766 milliards de dinars).
De la région euro-méditerranéenne, il en sera question. Le projet quasiment mort-né de l’UPM (Union Pour la Méditerranée), qui avait nourri, en 2008, l’espoir de revigorer le Processus, né à Barcelone, en 1995, traîne les pieds. Et l’on dit le président Hollande avoir un projet en ce sens qu’il aurait discuté notamment avec la chancelière Angela Merkel au cours des entretiens qu’il a eus avec elle, en juin dernier.
Cette question est abordée par Laurent Fabius avec son homologue Mourad Medelci. Mais aussi avec le président Bouteflika qui le reçoit également à déjeuner. Il en sera aussi au cours de ces entretiens de la situation en Syrie. La France cherche à connaître davantage le point de vue algérien.
Autre question pour laquelle le point de vue algérien est important pour la France: la question de l’installation au Nord du Mali des islamistes jihadistes de l’AQMI (Al Qaïda pour le Maghreb Islamique) d’Ansar Dine (Défenseurs de l’islam) et du MUJAO (Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest). D’autant plus que l’Algérie est largement préoccupée de la situation dans ce pays avec lequel elle a des frontières longues de 1.371 kilomètres.
La visite de Laurent Fabius intervient au moment où des informations faisaient état de la libération des sept diplomates algériens enlevés le 5 avril 2012 au Nord du Mali.
Préoccupée par le fait que les islamistes aient pu prendre le dessus sur les combattants du Front de Libération (touareg) des Azawad et des dangers qu’ils peuvent occasionner notamment après la destructions de quelques mausolées inscrits au patrimoine de l’humanité, la France pousse en direction d’une intervention militaire dans la région.