Madrid paie le prix de la mauvaise santé de ses banques et ses régions

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La Bourse de Madrid, le 20 juillet 2012 (Photo : Pierre-Philippe Marcou)

[24/07/2012 11:55:49] MADRID (AFP) L’Espagne a encore dû payer cher mardi pour se financer à court terme, face à des marchés très fébriles qui mettent en doute la solvabilité du pays, fragilisé par la mauvaise santé financière de ses banques et de ses régions.

La clé est désormais d'”éviter un effondrement financier imminent”, souligne le journal El Economista, tandis que la plupart des analystes fixent octobre comme date limite.

Le Trésor espagnol a certes rempli son objectif, en empruntant 3,05 milliards d’euros, mais les taux ont monté, passant de 2,362% à 2,434% pour les bons à trois mois et de 3,237% à 3,691% pour ceux à six mois, par rapport à la dernière émission similaire, le 26 juin, où ils s’étaient déjà envolés.

Et le pays reste fortement chahuté par les investisseurs: à 10H55 GMT, la Bourse cédait 2,17% à 11H00 GMT.

Pas d’accalmie non plus sur le front obligataire, où le taux d’emprunt à 10 ans de l’Espagne évoluait vers 10H00 GMT à un nouveau plus haut depuis la création de la zone euro, à 7,552%, effaçant son record de la veille.

Avec des taux d’interêt aussi élevés, “c’est impossible de se financer” et Madrid peut tenir “deux mois”, pronostique Daniel Pingarron, analyste de la maison de courtage IG Markets.

“Actuellement le Trésor a encore environ 30 milliards d’euros dans ses caisses: avec ça il peut couvrir les échéances de dette qui restent en juillet, celles d’août et peut-être celles de septembre”, “mais en octobre il y a une échéance très importante”, prévient-il.

L’Espagne envisage d’ailleurs de recourir à un “plan de sauvetage global assoupli” avec une ligne de crédit, pour faire face à cette échéance de quelque 28 milliards d’euros en octobre, affirme El Economista.

“Il est évident que la situation reste insoutenable” et “l’Etat ne peut pas tenir plus longtemps, donc octobre paraît se dessiner comme la date limite”, renchérit Alberto Roldan, directeur du département d’analyse boursière à la maison de courtage Inversis.

Les deux problèmes fondamentaux du pays restent ses banques et ses régions, très fragilisées depuis l’éclatement en 2008 de la bulle immobilière, dont elles avaient largement profité.

L’Espagne a gagné un peu de temps grâce à l’approbation vendredi par l’Eurogroupe d’une aide financière d’un maximum de 100 milliards d’euros pour son secteur bancaire.

Mais celle-ci a été “éclipsée par la demande d’aide de la région de Valence, rapidement suivie de celle de Murcie”, souligne dans une note Cyril Regnat, analyste chez Natixis.

“La situation des régions, qui paraissait sous contrôle en début d’année, s’est donc dégradée” et “sur les 17 régions espagnoles, près de 6 demanderaient l’aide de l’Etat”, ajoute-t-il.

“Au final, se rajoutent au risque étatique espagnol le risque régional et le risque bancaire, d’où une réaction particulièrement violente sur les marchés obligataires”, résume-t-il, jugeant “souhaitable que les autorités européennes apportent une réponse suffisante pour calmer les tensions sur le marché”.

“A court terme, l’unique solution passe par une action de la Banque centrale européenne (BCE) pour voir un relâchement des taux”, notamment par un achat de dette espagnole, affirme aussi la maison de courtage Renta4.

“Tant que cela ne se produit pas, la visibilité du financement de l’Espagne se réduit et avec elle les rumeurs sur un possible sauvetage augmentent”, ajoute-t-il.

“Actuellement, nous n’avons pas de possibilité de retrouver la confiance des marchés par nous-mêmes”, surtout dans un pays promis à la récession jusqu’en 2013 au moins, insiste Daniel Pingarron.