Marchés agricoles : des moyens limités face à la flambée des prix

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Illinois (Photo : Scott Olson)

[01/08/2012 12:33:59] PARIS (AFP) L’été brûlant sur les marchés agricoles pose la question de l’efficacité des outils du G20, qui avait fait de la lutte contre la volatilité des prix des matières premières son cheval de bataille en 2011.

Les vingt économies les plus puissantes de la planète ont mis sur pied des instances d’information et de concertation, destinées à donner une réponse coordonnée si la situation sur les marchés devenait hors de contrôle.

L’objectif était surtout d’éviter que les Etats ne prennent des décisions unilatérales pouvant accélérer l’emballement, comme ce fut le cas en 2010 lorsque la Russie a interrompu ses exportations de céréales à cause de la sécheresse.

Or, la tension actuelle sur les marchés s’explique essentiellement par de graves sécheresses touchant simultanément les Etats-Unis et la Russie. Elles font craindre de mauvaises récoltes et pèsent sur les prix, avec notamment des conséquences sur l’alimentation animale et donc l’élevage.

De plus, sur le plan politique, “jusqu’à présent, aucun pays n’a mis en place des restrictions à l’exportation” donc “à moins de nous asseoir tous et prier pour la pluie, il n’y a pas grand chose que l’on puisse faire” pour l’instant, reconnaît Abdolreza Abbassian, secrétaire de l’AMIS, le système d’information sur les marchés agricoles mis en place à l’issue du G20 agricole de 2011.

L'”AMIS ne peut pas réduire les prix” ou lutter directement contre la spéculation, explique M. Abbassian. Mais il peut “aider à stabiliser les prix, en minimisant les surprises” en améliorant par exemple la transparence sur les marchés.

Toutefois, si le blé et le riz – deux denrées essentielles à la sécurité alimentaire humaine – étaient prises dans la spirale, il serait alors “très important” que les instances se réunissent, a souligné M. Abbassian, également économiste auprès de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).

La France, qui a saisi samedi le secrétariat de l’AMIS en raison de la tension grandissante sur les prix des céréales, a d’ailleurs prévenu qu’elle réunirait le “Forum de réaction rapide” si la situation devait empirer. Ce forum est une instance de concertation, issue du G20 de 2011, qu’elle préside jusqu’à l’automne.

Des limites au système d’alerte

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Indiana (Photo : Scott Olson)

Mais aucune décision sur une éventuelle réunion n’est envisagée avant “fin août, début septembre”, dans l’attente de plus d’information sur les cultures, indique une source au ministère de l’Agriculture. Un calendrier confirmé par M. Abbassian.

Pour l’instant, les instances du G20 ne semblent pas “avoir porté tout à fait leur fruit”, juge Bernard Valluis, membre d’un groupe consultatif sur les marchés des matières premières auprès de l’Autorité de régulation financière européenne (ESMA).

De plus, “en attendant la mise en oeuvre des grandes réformes (sur les marchés financiers), on a quand même le moyen éventuellement d’intervenir, mais on ne l’a pas fait”, déplore-t-il dans un entretien avec l’AFP.

“Le système d’alerte au niveau mondial montre ses limites”, affirme de son côté Philippe Chalmin, consultant et professeur à l’Université Paris-Dauphine. La raison en est simple: “on ne peut pas anticiper les problèmes météo”, ajoute-t-il.

“Nous avons besoin de restreindre les consommations”, relève de son côté Benoît Labouille, directeur général de la société Offre et demande agricole (ODA). Avec, par exemple, une réduction momentanée de la consommation américaine de céréales pour les biocarburants.

Selon des informations rapportées dans une note de la maison de courtage Allendale, “plusieurs gouverneurs américains devraient signer et remettre une pétition cette semaine à l’EPA (Agence américaine de protection de l’environnement) pour lever” les quotas exigeant qu’une certaine quantité d’éthanol soit incorporée à l’essence.

Une piste qui pourrait être évoquée par le Forum de réaction rapide s’il venait à se réunir, a convenu M. Abbassian.