ée de la boutique Yves Saint-Laurent à Paris (Photo : Bertrand Langlois) |
[04/08/2012 09:24:17] PARIS (AFP) Après avoir longtemps négligé internet, les géants du luxe intègrent désormais le e-commerce dans leur stratégie, certains en faisant même une priorité, à l’image de PPR qui vient de sceller son alliance avec l’un des leaders du luxe en ligne, l’italien Yoox.
“C’est aujourd’hui un élément que plus aucune maison ne peut évincer de sa stratégie”, estime Serge Carreira, spécialiste du luxe et professeur à Sciences Po, “un canal de distribution à part entière où la conception des sites est réfléchie de la même manière que l’ouverture d’une boutique”.
“Pendant assez longtemps l’e-commerce a été redouté, méprisé ou même rejeté de façon un peu idéologue, les marques estimant que par définition, une distribution par internet était incompatible avec le luxe”, poursuit-il. “Mais ces positions ont évolué car les usages sont très différents et le rapport à l’achat en ligne a changé”.
Le e-commerce du luxe est encore marginal, pesant environ 4% des ventes totales du secteur l’an dernier, mais il connaît une croissance exponentielle, selon une étude récente du cabinet Xerfi.
La Fondation Altagamma, qui regroupe les grands noms du luxe italien, avait estimé de son côté fin 2011 que les ventes en ligne du secteur devraient bondir de 20% par an pour atteindre 11 milliards d’euros en 2015.
PPR espère franchir la barre du milliard d’euros de ventes sur internet d’ici 2020 (pour ses divisions luxe et sport lifestyle) et a défini le e-commerce comme l’une de ses priorités stratégiques.
“La question n’est plus de savoir +quand+, mais plutôt +comment+ nous allons investir le monde digital, avec des solutions innovantes et originales capables de créer une vraie expérience de luxe en ligne”, a déclaré Federico Barbieri, directeur e-commerce de PPR, dans le communiqué annonçant vendredi la création d’une co-entreprise avec Yoox.
Une clientèle plus jeune et plus large
Le groupe français détiendra 51% de cette entité “dédiée à la gestion, en collaboration avec celles-ci, des boutiques en ligne monomarques de plusieurs marques de luxe de PPR” (Yves Saint Laurent, Alexander McQueen, Balenciaga, Bottega Veneta et Sergio Rossi).
Le logo de Louis Vuitton, enseigne du groupe de luxe LVMH (Photo : Miguel Medina) |
Les boutiques en ligne doivent être opérationnelles à l’échelle mondiale, y compris en Chine, d’ici fin 2013.
Contrairement aux boutiques, internet permet aux géants du luxe de couvrir toutes les zones géographiques, aussi bien sur les nouveaux marchés moteurs comme la Chine, que dans les zones provinciales des marchés traditionnels.
Louis Vuitton (LVMH) a ouvert sa boutique en ligne dès 2005 et Hermès, l’un des premiers à s’être lancé dans l’expérience, en 2002. Le groupe suisse Richemont (Chloé) a racheté en 2010 le site spécialisé Net-a-Porter, considéré comme un modèle en matière de vente de vêtements de luxe.
“Ce mode de distribution n’est plus perçu comme un élément de banalisation par le consommateur”, juge Serge Carreira, même s’il permet un rapport décomplexé au produit, alors qu’il peut y avoir un certain frein à rentrer dans une boutique de luxe traditionnelle.
Internet permet également d’atteindre une clientèle plus jeune. Les griffes ont d’ailleurs investi assez tôt les réseaux sociaux. Burberry, par exemple, a distribué en exclusivité les échantillons d’un nouveau parfum aux fans de sa page Facebook.
Si les opportunités digitales sont bien réelles, elles doivent toutefois être relativisées car internet implique de nombreux défis, prévient Xerfi Precepta dans une étude sur les stratégies des groupes de luxe.
Pour le cabinet, les groupes de luxe devront notamment faire attention aux risques de contrefaçon et surtout faire face à la concurrence sérieuse des sites marchands multi-marques.