3.3 Recommandations en matière de politiques (2)
Recommandations de politiques structurelles et à long terme :
• Promouvoir une culture de l’entreprenariat : L’OCDE a identifié les mesures suivantes comme étant favorables à l’innovation: faciliter les entreprises nouvelles et jeunes (qui ont souvent des comportements innovants); réduire les barrières à l’entrée et à la sortie (telles que pour les start-up); concevoir une politique flexible d’allocation des facteurs; développer un système fiscal attractif; et soutenir les PME existantes. Une plus grande flexibilité institutionnelle pour encourager une culture entrepreneuriale à travers ces mesures pourrait créer un environnement favorable à l’innovation.
En outre, l’adoption de mesures d’incitation et des cadres spécifiques pour les sociétés entrepreneuriales, les co-entreprises, et de large éventail de possibilités flexibles de partenariats transfrontaliers rendra la Tunisie plus attrayante pour les entrepreneurs et les IDE axés sur l’innovation.
• Privilégier les incitations pour les activités liées à l’innovation: Dans les PRI en rapide croissance d’Asie de l’Est, les incitations fiscales deviennent de plus en plus sélectives. En Thaïlande, les incitations fiscales sont accordées pour le développement des CTI (compétence, technologie et innovation), tandis qu’en Malaisie, elles le sont pour le rehaussement du niveau (upgrading) des industries existantes. Singapour a mis en place un cadre institutionnel visant à faciliter la création de co-entreprises et l’octroi de brevets (tel que dans le domaine pharmaceutique), qui a attiré des chercheurs internationaux. Le système d’incitation fiscale tunisien était axé sur les exportations et l’emploi, mais l’accent qui a été placé sur le potentiel de création d’emplois tend à favoriser les industries intensives en main-d’œuvre. Il est en effet reconnu qu’en raison du taux élevé de chômage, la création d’emplois restera l’objectif central à court terme.
Néanmoins, à moyen terme, une approche différenciée des régimes d’incitation pourrait être introduite, afin d’attirer des IDE axés sur les innovations et les technologies. Cette approche devrait distinguer les industries intensives en main-d’œuvre d’une part, et celles axées sur les innovations et d’étape supérieur d’autre part.
• Promouvoir des activités de R&D pilotées par le secteur privé : L’accroissement du nombre d’activités et de mécanismes de soutien à la recherche et à l’innovation, et leur gestion par une pléthore d’administrations sans la coordination, ont provoqué un chevauchement des mandats et des mesures. Les dépenses en R&D sont ventilées sous une multitude de thèmes et de structures, et il n’existe pas d’articulation claire, ni entre les dépenses et l’objectif stratégique, ni entre le coût et la performance.
Ainsi, l’alignement de la politique de R&D sur l’objectif de l’innovation industrielle, l’établissement d’une coordination entre les ministères et les structures, la rationalisation des mécanismes de soutien à la recherche et à l’innovation, l’évaluation de la performance par rapport aux coûts et la promotion d’une gestion axée sur les résultats devraient accroître l’efficacité des dépenses et du soutien des pouvoirs publics.
La complexité des procédures administratives a également entravé la collaboration entre le secteur public et le secteur privé en matière de R&D. La simplification des procédures et la promotion d’activités de recherche axées sur le secteur privé encourageront la mise en œuvre d’activités de R&D plus adaptées aux besoins de l’économie.
• Exposer l’économie onshore à la concurrence mondiale: Un environnement compétitif et ouvert favorable à l’entreprenariat est de nature à stimuler l’innovation et l’attractivité de la R&D en haute technologie. Les investissements R&D aux Etats-Unis sont plus intensifs en haute technologie (69%) qu’en Europe (35%) où la moitié des investissements R&D sont allouées aux technologies moyennes. Si l’environnement du secteur offshore tunisien jouit d’un environnement relativement ouvert et compétitif, le secteur privé national est quant à lui peu exposé à la concurrence mondiale et bénéficie peu des externalités de la compétitivité du secteur offshore. Une plus grande mobilité entre les deux secteurs, par l’assouplissement des règles sur l’acquisition et la détention de capitaux par les étrangers, sur la mobilité de main-d’œuvre, ainsi sur le contrôle du compte de capital pourrait faciliter l’intégration de l’économie tunisienne onshore aux réseaux d’entreprises internationales.
• Libéraliser les secteurs de services ciblés: La libéralisation progressive des secteurs de services dotés d’avantages comparatifs au niveau international et d’effets d’entraînement technologiques potentiels, pourrait stimuler l’exportation et la compétitivité des services, et attirer des investissements et des technologies. Comme montré par l’expérience du secteur des TIC, il existe une forte synergie entre acceptance des IDE dans le secteur (Mode 3) et les exportations des services sans déplacement (Mode 1). Le développement de ces exportations de services pourrait générer des effets importants sur la croissance et l’emploi. De même, la libéralisation du secteur du transport et de la logistique, à travers notamment la conclusion de négociations «open-sky» avec l’UE et une participation accrue des opérateurs étrangers aux services logistiques dans les ports (Radès) et aéroports internationaux, pourraient favoriser le développement de ces services et accroître l’attrait et la compétitivité des sites tunisiens en réduisant les coûts de transaction. De plus, l’ouverture du secteur de la distribution aux investissements étrangers permettra, d’une part, de réduire les prix aux consommateurs, ce qui aura un impact social important et, d’autre part, de stimuler l’économie intérieure et d’accroître les opportunités au secteur privé local, en l’exposant plus directement au marché mondial.
• Promouvoir un tourisme à plus forte valeur ajoutée : A court terme, la Tunisie a besoin de rassurer les touristes potentiels que le pays a renoué avec la stabilité politique. La conclusion de l’accord « open-sky » avec l’UE pourrait également stimuler le marché touristique en Tunisie.
Les efforts à moyen terme pourraient être axés sur l’amélioration de la qualité des services touristiques par une personnalisation des services et l’exploration de niches telles que le tourisme médical et de bien-être ou le tourisme d’affaires. De nombreux clients des pays développés sont en quête d’un tourisme personnalisé plutôt qu’un tourisme de masse, alors que la Tunisie est restée spécialisée à un tourisme de masse. De plus, le tourisme individuel a généralement plus de retombées directes sur l’économie locale que le tourisme de masse qui offre habituellement des paquets complets de séjour.
En outre, malgré l’augmentation récente du nombre de visiteurs en provenance du Maghreb et aussi de tunisiens se déplaçant à l’intérieur de leur pays, le tourisme tunisien reste essentiellement tourné vers le marché européen.
Comme démontré par l’importance des recettes touristiques des visiteurs Maghrébins ces dernières années et, en 2011, des «réfugiés» aisés libyens, la diversification des marchés pourrait atténuer le risque de dépendance au marché européen.
Source : BAD