érim à Paris (Photo : Loic Venance) |
[14/08/2012 13:22:06] PARIS (AFP) Avec près de 60.000 emplois rayés de la carte en un an, le secteur de l’intérim a atteint en juin son plus bas niveau depuis mai 2010, une dégringolade de mauvais augure pour un marché du travail déjà sinistré, qui traduit aussi une flexibilité et une précarisation accrues.
Le travail temporaire, auquel a notamment recours l’industrie (45% des effectifs), est réputé précurseur des évolutions du marché de l’emploi.
Selon Pôle emploi, le secteur accusait en juin un repli de 9% sur un an, recensant 605.200 emplois, soit 59.600 de moins qu’un an plus tôt. Et les chiffres provisoires de l’Insee publiés mardi parlent de près de 20.000 emplois détruits pour le seul 2e trimestre.
“L’intérim conserve une légère avance sur le cycle économique, mais cet effet s’est atténué. L’emploi est devenu plus flexible, les contrats plus temporaires et, de ce fait, il réagit beaucoup plus vite aux inflexions de l’activité”, analyse Philippe Waechter, directeur de recherche chez Natixis Asset Management.
“L’ajustement se fait en premier lieu sur les emplois les plus précaires, intérim et CDD”, renchérit Eric Heyer, de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), qui souligne que “les destructions d’emplois dans l’industrie tapent d’abord dans l’intérim”.
Thèse accréditée par l’emblématique cas PSA Peugeot Citroën, où les intérimaires figurent au premier rang des salariés menacés par le plan social annoncé avec fracas en juillet.
Les syndicats redoutent ainsi la disparition de 1.500 postes à Poissy (Yvelines), alors que 300 intérimaires seront congédiés de l’usine de Sochaux (Doubs) en octobre, emboîtant le pas à 300 de leurs collègues remerciés en juin.
Des contrats à la semaine –
Après l’effondrement lié à la crise de 2008, l’emploi intérimaire avait connu un rebond, avant de se replier de façon quasi-continue depuis l’été 2011.
Entre mai 2011 et mai 2012, la baisse des effectifs serait, selon Le Prisme, qui regroupe 600 entreprises du secteur, de 11,7% dans le BTP, 11,5% dans l’industrie et 10,8% dans les services.
“L’absence de visibilité peut être un facteur déclencheur de l’intérim. Mais là, ce n’est pas le cas, il n’y a pas de visibilité et… pas de commandes. L’attentisme pré-élections se perpétue dans la période post-élections”, déplore François Roux, délégué général du Prisme.
“Jusque dans les années 1990, il y avait peu d’intérimaires, dans les 200.000. Très vite, le volume est devenu très important, s’approchant des 700.000, faisant de l’intérim non plus un élément précurseur, mais bien un élément central du marché du travail”, remarque Eric Heyer.
Pour l’économiste, cette évolution témoigne d’une “flexibilisation et d’une précarisation” concentrées sur une population, dessinant un marché du travail dual.
“Sur 20 millions d’embauches en 2011, deux tiers concernent des contrats de moins d’un mois”, souligne ainsi M. Heyer.
“Ces trois dernières années, nous avons noté une progression très importante de nouveaux intérimaires, âgés de plus de 45 ans, en provenance d’entreprises ayant fermé, surtout de PME liquidées dans la construction navale, l’automobile, l’agro-alimentaire…”, relate André Fadda, de l’Union syndicale de l’intérim CGT.
“La grande majorité ont des contrats à la semaine et les périodes de chômage entre deux missions, de plus en plus longues, ne font qu’aggraver la situation”, raconte le syndicaliste.
Compte tenu du contexte économique difficile ces derniers mois, “l’intérim n’a pu jouer pleinement son rôle de tremplin vers l’emploi durable”, admet Le Prisme.
Bien au contraire, la part des intérimaires n’a fait qu’augmenter parmi les nouveaux inscrits chez Pôle emploi, progressant de 10,2% entre juin 2011 et juin 2012.