Régression de 2,6% de l’investissement déclaré dans l’industrie durant les 07 mois 2012 dont -13,9% dans les zones de développement régional. Dans le secteur des services, l’Est reste toujours la zone de prédilection pour les investissements, l’ouest affiche un recul de 28,6%. Les messages réconfortants quant à la croissance des IDE de 2,8%, pour les 6 premiers mois de l’année, comparativement à 2010, ne peuvent être réellement rassurants car les investissements sont axés principalement sur le secteur énergétique (640 MDT) et accessoirement manufacturier (233,2 MDT).
Pendant ce temps, nombreux sont les ministres de la Troïka qui concentrent leurs énergies sur la chasse à la corruption. Sur les stratégies de développement et d’un management plus efficient de leurs départements respectifs, une seule réponse: la lutte contre la corruption. Est-ce l’échappatoire rêvée pour des questions beaucoup plus épineuses, tels la relance de l’investissement domestique, la sécurité, la précarité, le chômage et les nominations à outrance des alliés du parti Ennahdha tout récemment décriées par Moncef Marzouki, président provisoire de la République?
Est-ce une manière de camoufler les aberrations et les flous juridiques menaçant les libertés qui truffent «délibérément» la Constitution?
Le débat national reste aujourd’hui plus axé sur les faits divers, y compris perpétrés régulièrement par les salafistes, jouissant d’une impunité presque totale, que sur les questions socio-économiques ou politiques qui peuvent éclaircir les horizons des Tunisiens et les tranquilliser quant à l’avenir du pays et celui de la République.
La corruption, thème de prédilection
Pas un jour ne passe sans que l’on entende une source officielle dénoncer la corruption, les malversations et déclarer une lutte sans merci contre ses artisans. Le ministre des Affaires étrangères, lui-même, ne s’en est pas privé. Lui, qui aurait parfaitement réussi «la mission de repositionner la Tunisie sur l’orbite international», a récemment annoncé le transfert de 14 dossiers de corruption administrative et financière au ministère de la Justice. Y seraient impliqués 2 anciens ministres, 2 secrétaires généraux, 17 présidents de missions diplomatiques (ambassadeurs et consuls généraux) ainsi que des directeurs, des comptables et des fonctionnaires. Effrayant!
Le ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle, a, lui aussi, pris sur lui de faire le ménage dans son ministère et affirmé que le gouvernement intensifiera ses efforts pour combattre toute forme de corruption administrative et réaliser les objectifs de la révolution. Comme si les objectifs de la révolution se résumaient à seulement lutter contre la corruption…
Celui des Domaines de l’Etat, Salim Ben Hamidane, promet pour sa part la publication de la liste de ceux qui ont bénéficié des bontés de Ben Ali, oubliant dans l’intervalle que nombreux sont ceux qui bénéficient aujourd’hui du laxisme de son ministère transformant les anciennes cellules du RCD en des clubs coraniques et occupant le Club Elyssa qui appartenait à Leila Ben Ali sans autre forme de procès…
Le ministre de l’Agriculture est le champion de la lutte contre la corruption et presqu’aucune conférence de presse ne se fait sans qu’il n’y cite une ou deux affaires de malversation. D’ailleurs, il a fait vite de trancher: 34 dossiers sur 40 dossiers de corruption administrative et financière, ouverts depuis le 1er janvier jusqu’au 20 de ce mois d’août 2012.
Le ministre ne s’attarde toutefois pas sur les programmes mis en place par ses départements pour relancer le secteur agricole, améliorer la situation des petits agriculteurs, gérer les dossier difficiles d’un secteur dans l’embarras aussi bien sur le plan humain que financier, et ce depuis des décennies. La seule information positive concernerait le projet, actuellement en négociation, de construction de deux barrages à Boussalem; un situé au niveau de “Oued Mallègue”, l’autre au niveau de “Tessa”. Mieux que rien!
Au lieu de donner de l’espoir, les faits divers priment et dépriment…
Au lieu d’axer le discours gouvernemental sur la relance du dialogue social, la mise en place de nouveaux plans pour une transformation structurelle de l’économie tunisienne, laquelle, selon le FMI, a atteint ses limites, on s’arrête à des affaires qui devraient, 2 ans après le soulèvement, être du ressort du contentieux des ministères et de l’Etat. Faute de pouvoir assumer correctement ses responsabilités dans l’édification de la nouvelle Tunisie, la Troïka n’arrête pas de s’en prendre à ses prédécesseurs du gouvernement Ben Ali. On aurait préféré qu’il montre ce dont il est capable de faire pour sortir le pays de l’ornière dans laquelle il se débat…
Il oublie qu’il doit assumer et assurer en matière de sécurité et de gestion des affaires du pays. Ceci aussi bien concernant la visibilité de l’agenda politique et socioéconomique que de la préservation des compétences au sein des institutions et des établissements étatiques et passant par l’incitation des investisseurs locaux et étrangers à redonner leur confiance à la Tunisie au travers d’une communication efficiente et rassurante.
Quels sont à ce jour les processus de réforme, de relance des investissements, et de sécurisation engagés par le gouvernement de la Troïka? Le plan de réforme que Mohamed Abbou, alors ministre de la Réforme administrative, a voulu lancer, a été bloqué net à son départ, ce qui laisse peser d’énormes doutes quant à la volonté du gouvernement de s’engager dans des réformes profondes de l’administration ou encore de l’économie. En a-t-il seulement la volonté et les moyens?
Dix projets de réforme prioritaires pour relancer l’économie tunisienne ont été annoncés au mois de juillet dernier, ils concernent l’assouplissement des procédures administratives, le renforcement des transactions électroniques, la révision des mécanismes de l’emploi, le renforcement des mécanismes d’évaluation et de qualité dans les secteurs de la santé et de l’éducation et d’audit et de contrôle de la gestion au sein des banques publiques.
Dix projets qui pourraient, si l’on constate un semblant de concrétisation sur le terrain, calmer les esprits. Si ce n’est les troubles qui persistent dans les régions, les débordements salafistes, les perturbations sociales, la régression de la productivité et les déclarations de certains hauts responsables nahdhaouis comme celle de Rafik Abdessalem qui a décidé que le gouvernement actuel restera au pouvoir pendant plusieurs années, et celle de Lotfi Zitoun qui invite les journaliste à mieux s’adapter à la nouvelle situation…
Des déclarations qui ne rassurent pas quant à une transition démocratique garante de la stabilité socioéconomique ou des libertés individuelles. Non, cela ne sera décidément pas pour rassurer les investisseurs!