ût 2012 à Francfort (Photo : Daniel Roland) |
[04/09/2012 14:10:43] PARIS (AFP) L’espoir d’une intervention ciblée de la Banque centrale européenne (BCE) a fait chuter les taux d’emprunt de court terme des pays les plus vulnérables de la zone euro, une aubaine passagère pour ces Etats mais qui ne règle pas sur le fond leurs problèmes financiers
Le mouvement est spectaculaire: le taux à échéance 2 ans de l’Espagne chutait mardi à 3%, alors qu’il était encore au-dessus de 7% fin juillet. De son côté, le taux de même échéance de l’Italie était à 2%, contre 5% il y a un peu plus d’un mois.
Ce recul est tout aussi marqué pour les échéances les plus courtes (plusieurs mois) et s’étend même à des pays comme la Grèce, l’Irlande et le Portugal.
“C’est l’effet Draghi”, résume Frédérik Ducrozet, économiste chez Crédit Agricole CIB. Cette détente est le signe que les investisseurs ont placé beaucoup d’espoirs dans la Banque centrale européenne avant une réunion très attendue jeudi.
Lors de la dernière réunion début août, son président Mario Draghi avait indiqué qu’en cas de rachats de dette publique, une mesure qu’il entend relancer pour apaiser les tensions en zone euro, l’institution se concentrerait sur les échéances de court terme.
Lundi soir, devant le Parlement européen, Mario Draghi est allé plus loin, en évoquant une échéance maximum de 3 ans, considérée pourtant comme du moyen terme.
“Il veut montrer que cela reste du domaine de la politique monétaire et que ce n’est pas du financement d’Etats. L’échéance 3 ans est calée sur les LTRO (prêts exceptionnels aux banques à 3 ans) annoncés ces derniers mois”, explique M. Ducrozet.
Une des priorités de la BCE est en effet de résoudre les déséquilibres du marché obligataire qui sont criants depuis quelques mois.
Là où des pays comme l’Espagne et l’Italie s’endettent à des taux prohibitifs, d’autres comme l’Allemagne et la France bénéficient de taux négatifs, signe que les investisseurs préfèrent perdre de l’argent tout en étant sûrs de retrouver le gros de leur capital.
Pour les pays fragiles, une détente des taux de court terme représente une bouffée d’air frais. Cela peut même aider l’économie en rendant moins cher le coût des crédits bancaires, qui dépendent pour certains des taux d’emprunt du pays.
Par ailleurs, si la BCE confirme qu’elle se concentrera sur les taux courts, “cela permettra à ces pays d’augmenter un peu le programme d’emprunt sur ces échéances”, explique Patrick Jacq, chez BNP Paribas, avec néanmoins le risque d’avoir des remboursements conséquents à effectuer dans deux ou trois ans.
Le problème pour ces pays est qu’ils sont en proportion très endettés à plus long terme, en moyenne à 7 ans pour l’Espagne et 8 ans pour l’Italie.
Surtout le déséquilibre est encore immense avec les taux de long terme. Le taux à 10 ans de l’Espagne atteint encore près de 7% et celui de l’Italie 6%.
“Le marché croit que la BCE va agir mais n’est pas convaincu que ça suffira à faire baisser les taux longs”, résume M. Ducrozet.
Une action de la BCE pourrait donc permettre aux pays fragiles de gagner du temps, mais ne résoudra pas leurs problèmes, d’autant qu’elle se fera après une demande d’aide et en échange de conditions.
Le rachat de dette publique de court terme “n’est pas l’outil miracle”, prévient René Défossez, stratégiste chez Natixis, face à une crise de défiance en zone euro et de lourds problèmes structurels dans de nombreux pays.
“Les causes de la crise sont bien plus importantes. On va traiter une toute petite partie du problème mais ce n’est pas ça qui aidera la zone euro à s’en sortir”, conclut-il.