De
nouvelles mesures ont été prises par le ministère de l’Enseignement supérieur
afin de réorganiser l’enseignement supérieur privé, en concertation avec les
professionnels du secteur, qui connaissaient des difficultés de développement. A
souligner que les professionnels se plaignaient, jusqu’à présent, d’une méfiance
des autorités de tutelle vis-à-vis du secteur privé.
Ceci se répercutait évidemment sur le rendement du secteur et sur sa visibilité
sur le marché. Le poids du secteur reste encore faible, soit 3% de l’effectif
global des étudiants. Alors qu’on visait à atteindre 50 mille étudiants inscrits
dans le privé en 2010, ils ne sont que 15 mille, selon les chiffres de la même
année.
Marginalisation…
Rappelons qu’une étude réalisée par l’Agence française de développement (AFD) en
avril 2010 a montré la marginalisation du secteur de l’enseignement privé en
Tunisie. Elle indique notamment que «l’université privée est une composante
marginale du système universitaire national. Même dans une perspective de
développement soutenu, l’université privée ne s’inscrira pas dans une logique de
substitution à l’enseignement public (contrairement aux pays du Moyen-Orient où
les universités privées captent de 30 à 50% des étudiants)».
L’étude conclut que «trois facteurs ont entravé le développement de
l’enseignement privé: l’attachement de l’Etat à l’enseignement public -considéré
comme un fondement du modèle tunisien de développement-, un couple
réglementation/régulation peu incitatif -traduisant la méfiance du ministère de
l’Enseignement supérieur et des forces syndicales (…)- et la perception négative
de l’université privée, dont l’expérience récente reste associée à une qualité
médiocre et vécue comme alternative à une situation d’échec dans l’université
publique».
Actuellement, il semble que la donne ait changé. Selon Wahdi Gdoura, directeur
général de l’enseignement supérieur, on vise à offrir un accompagnement et une
assistance plus ciblées pour l’enseignement supérieur privé, au niveau de la
gestion et la gouvernance. «Notre objectif est d’encourager et de renforcer le
secteur. Dans les années qui viennent, il y aura de fortes demandes et il est
primordial de préparer convenablement le terrain», explique-t-il.
Statut spécial…
Le responsable au ministère de l’Enseignement supérieur affirme que des
dispositions ont été prises pour l’organisation de concours spécial pour le
recrutement des enseignants universitaires dans les institutions privées, d’où
le recours à ceux qui exercent dans le public. On souligne que les enseignants
bénéficieront d’un statut spécial qui leur permettra d’avoir un plan de carrière
dans le privé. Ce qui n’était pas le cas auparavant.
D’ailleurs, les universités privées ne pouvaient pas recruter des enseignants
permanents et la loi sur l’enseignement supérieur privé (n°2008-59 du 4 août
2008) ne prévoyaient pas la gestion de carrière (passage de grade) pour eux.
Conséquence: les doctorants sont restés réticents à exercer dans le privé et se
dirigent généralement vers le public.
Les nouvelles dispositions devraient permettre, selon M. Gdoura, de booster la
qualité de la formation et d’amorcer la recherche scientifique dans les
institutions privées, qui reste «le maillon faible» de l’enseignement supérieur
en Tunisie.
Il estime que le secteur privé connaîtra une rude concurrence au cours des
prochaines années. «Plusieurs universités étrangères, européennes et américaines
essentiellement, ont déjà manifesté leur intérêt à s’installer en Tunisie. Ceci
nous permettra aussi d’être une destination privilégiée des étudiants arabes et
particulièrement des pays du Golfe», pense-t-il.