à quai au port de Toulon, le 17 février 2012 (Photo : Anne-Christine Poujoulat) |
[11/09/2012 16:36:48] MARSEILLE (AFP) La remise en cause par la justice européenne des aides passées de la France à la SNCM, qui pourrait avoir à les rembourser, sont un nouvel écueil pour la compagnie maritime, déjà confrontée à des pertes, à une rude concurrence et aux incertitudes de la desserte publique de la Corse.
Le tribunal de l’Union européenne a annulé mardi une décision de la Commission de Bruxelles qui avait validé des aides accordées par la France à la Société nationale Corse Méditerranée (SNCM).
Deux séries de mesures sont visées, les unes relatives à un plan de restructuration de la SNCM en 2002, les autres à sa privatisation en 2006.
Dans le premier cas, un montant de 22,52 millions d’euros est concerné sur un total de 76 millions perçu par la compagnie de la CGMF (Compagnie générale maritime et financière, propriété de l’Etat français), qui la détenait à 80% à l’époque, avec la SNCF (20%).
Dans le second cas, trois aides sont dans le collimateur : une recapitalisation de la SNCM pour 158 millions d’euros, un apport supplémentaire en capital par la CGMF de 8,75 millions et une avance en compte courant pour 38,5 millions visant à financer un éventuel plan social.
“La Commission a commis des erreurs manifestes d’appréciation en constatant, d’une part, que certaines mesures du plan de restructuration de 2002 constituaient des aides d’Etat compatibles avec le marché commun et, d’autre part, que les mesures du plan de privatisation de 2006 ne constituaient pas des aides d’Etat”, a souligné le tribunal dans un communiqué.
Il a notamment estimé que l’exécutif européen n’avait pas correctement apprécié ce qu’aurait fait un investisseur privé dans des circonstances similaires.
A l’origine du recours, Corsica Ferries, principal concurrent de la SNCM, a salué cet arrêt. “Petit à petit, nous parvenons à faire avancer et reconnaître une certaine logique dans ces dossiers où l’argent public coule à flot et où l’intervention de l’Etat a trop souvent distordu le marché au détriment d’une saine concurrence entre les compagnies maritimes”, a commenté son directeur général, Pierre Mattei, dans un communiqué.
De son côté, la Commission a fait savoir qu’elle “étudierait avec attention ce jugement et prendrait les mesures appropriées”. Selon une source proche du dossier, il est difficile d’évaluer le montant des sommes que l’entreprise sera peut-être amenée à rembourser. Car même si ces aides sont effectivement des aides d’Etat, il se peut qu’elles soient compatibles avec les règles de l’UE.
La SNCM, qui compte de 2.500 à 3.000 salariés, a ainsi souligné qu'”à ce stade, il n’y a pas d’impact financier direct” de cette décision, dont elle va faire appel.
A terme cependant, elle complique indéniablement la donne pour l’ancienne compagnie publique, dont le principal actionnaire Veolia (66%), aux côtés de l’Etat (25%), veut se désengager. La direction avait même proposé en mars sa vente à la Collectivité territoriale de Corse (CTC) pour “un euro symbolique”, provoquant un tollé.
En plein marasme financier (perte d’exploitation de 12 millions d’euros en 2011, pour un chiffre d’affaires stable à 285 millions), la SNCM est confrontée à une âpre concurrence de Corsica Ferries qui, avec ses navires battant pavillon italien, domine le transport de passagers entre le continent et la Corse (60,6% de parts de marché au premier semestre).
Et si elle a bénéficié d’un répit avec la décision, en juillet, du Conseil d’Etat de maintenir sa délégation de service public (DSP) pour la desserte de l’île jusqu’à fin 2013, la SNCM reste sous la menace d’un durcissement du cahier des charges par l’Office des transports de Corse, désireux de ne plus être “pris en otage” par les grévistes de la compagnie.
Dernière incertitude pesant sur l’avenir de la SNCM, l’ouverture fin juin par Bruxelles d’une enquête sur les compensations qu’elle a reçues dans le cadre de cette DSP.