ée suisse Julius Baer en août 2012 à Genève (Photo : Fabrice Coffrini) |
[13/09/2012 13:34:01] GENEVE (AFP) Le système du forfait fiscal, dont bénéficient quelque 5.000 millionnaires étrangers, exilés fiscaux en Suisse, va être maintenu mais son barème va être relevé, selon un texte adopté par le parlement à Berne.
Le Conseil National (Chambre basse) s’est ainsi rallié mercredi à une décision en ce sens du Conseil des Etats, la chambre haute.
Ce système attire de nombreux riches étrangers et subit un regain d’intérêt en France depuis l’arrivée de la gauche au pouvoir et des nouveaux régimes fiscaux visant les grandes fortunes.
“J’ai délocalisé 12 riches Français entre janvier et avril, et 3 depuis les législatives”, a déclaré à l’AFP Me Philippe Kenel, un avocat genevois spécialisé dans les forfaits fiscaux. “Les riches Français partent pour deux raisons, a-t-il ajouté, parce qu’ils paient trop d’impôts, et parce que le climat en France leur est devenu franchement hostile, comme le montrent les derniers titres d’une certaine presse”, a ajouté Me Kenel, par ailleurs président de la LICRA (Ligue contre le racisme et l’antisémitisme) à Genève.
Le texte n’est cependant pas encore complètement bouclé. Il reste notamment à déterminer la date d’entrée en vigueur des nouvelles dispositions, au plus tôt 5 ans après le vote définitif du texte.
Le forfait fiscal est un système d’imposition basé sur le train de vie et les dépenses du contribuable et non sur ses revenus réels.
Certains cantons suisses, frontaliers avec la France, comme le canton du Jura, ont déjà fait part de manifestations d’intérêt venues de Français, séduits par la liaison TGV avec Paris en deux heures.
De la pub sur internet pour vanter le forfait fiscal
Par ailleurs, des sociétés immobilières suisses n’hésitent pas à faire de la publicité sur internet pour vanter les charmes du forfait fiscal, avec calcul à l’appui.
Selon la société Sovalco, établie à Sion (canton du Valais), un couple de Français avec une fortune de 20 millions CHF (16 M euros) et des revenus de 900.000 CHF (750.000 euros) ne paierait que 48.466 CHF (40.400 euros) d’impôts en Suisse, contre une estimation de 600.000 CHF (500.000 euros) en France, soit dix fois moins.
Les partis du centre et de droite ont voté pour le texte, alors que la gauche a critiqué cette imposition, estimant qu’il n’est pas admissible que des contribuables soient taxés différemment, les Suisses ne pouvant pas bénéficier du forfait fiscal.
De leur côté, les Verts se sont déclarés “choqués par ces privilèges injustes accordés à de riches étrangers”, a indiqué Louis Schelbert, député Vert de Lucerne.
Quelque 5.445 personnes bénéficient de forfaits fiscaux, selon des chiffres datant de fin 2010.
Le système a été supprimé dans trois cantons, et le 23 septembre prochain, les cantons de Berne et Bâle-Campagne doivent se prononcer sur son éventuelle abolition. 230 étrangers bénéficiant de forfaits fiscaux résident dans le canton de Berne, et la plupart d’entre eux habitent à Gstaad, une station de l’Oberland bernois. Parmi eux figure le chanteur français Johnny Hallyday.
Les forfaits fiscaux représentent près de 700 millions de francs suisses (583 M euros) de recettes annuelles, que se partagent la Confédération, les cantons et les communes.
Le durcissement de la loi n’a pas calmé les ardeurs des opposants au système, qui sont en train de collecter des signatures pour organiser un référendum. “Nous avons jusqu’au 17 octobre prochain pour déposer les 100.000 signatures” requises a déclaré à l’AFP un porte-parole du mouvement suisse La Gauche.
Après le dépôt et la validation des signatures, il faut compter entre 2 et 3 ans pour la tenue du vote.
La moitié des millionnaires étrangers bénéficiant du forfait fiscal sont domiciliés en Suisse romande. Le plus riche d’entre eux est le milliardaire suédois Ingwar Kamprad, fondateur d’IKEA et première fortune de Suisse.
Parmi les Français résidant en Suisse et bénéficiant du forfait fiscal figurent des sportifs tels que les coureurs automobiles Sébastien Loeb ou Jean Alesi, et l’actrice Isabelle Adjani.
D’anciens hommes d’affaires, comme Paul Dubrule, co-fondateur du groupe Accor, ont aussi choisi de prendre leur retraite en Suisse.