Au moment où notre pays vit une rupture sociale sans précédent, matérialisée par une forte attente en matière de droits fondamentaux ainsi qu’une aspiration à plus de justice sociale, égalité des chances pour l’ensemble des citoyens, l’entreprise tunisienne apparait comme un enjeu principal de la transition vers la Démocratie, et le premier acte de la refonte du modèle de développement social et économique en Tunisie. L’entreprise, objet des tractations entre plusieurs parties prenantes internes et externes, suscite plus que tout temps auparavant, de vifs débats qui débordent souvent du simple champ socio-économique. Ceci amène la communauté de ‘personnes morales’ à prendre position dans ce mouvement de l’histoire, et à contribuer à construire une nouvelle vision des rapports entre dirigeants et employés, l’entreprise et son environnement, voire même avec l’Etat.
Le Forum de l’ATUGE, dans sa 21ème édition à Tunis, a été une occasion de présenter et débattre des moyens et conditions d’émergence d’une nouvelle approche du contrat social, dans une tentative d’en finir avec le clivage entre syndicats patronaux et ouvriers, et sortir de la logique manichéenne qui réduisait le dialogue social à une balance entre la rémunération d’un côté et la productivité de l’autre.
Des décideurs, experts, acteurs économiques et représentants de la société civile ont pris part aux travaux des différents ateliers, et ont permis d’explorer des approches plus globales impliquant un spectre de parties prenantes plus large, mettant en avant notamment, la logique de Responsabilité Sociétale d’Entreprise (RSE), qui devrait constituer un des piliers de la refondation du contrat social. A la table ronde consacré sur ce sujet, nous apprenons de M. Hichem Elloumi, PDG de Chakira, que son groupe fait partie des quelques 8000 entreprises dans le monde qui sont certifiées Global Impact par les Nations Unis, en plus des certifications ISO en matière d’environnement et développement durable. Les référentiels et les normes qui tournent autour de la RSE peuvent même constituer, selon M. Elloumi, des barrières non tarifaires à l’entrée pour certains marchés à l’international.
Nous apprenons par ailleurs que la STEG a entamé une démarche RSE en intégrant en plus des valeurs du service publique, des préceptes tels que la ‘redevabilité’, la transparence, la gouvernance, l’éthique et les droits de l’Homme. La STEG, selon son PDG, M. Ridha Ben Mosbeh cherche à mieux communiquer son engagement citoyen, en mettant plus d’emphase sur son engagement en faveur de la communauté, notamment en matière d’énergie renouvelable ou d’encouragement à l’essaimage des jeunes pousses en Tunisie.
La raison d’être d’une société est par essence sociale. C’est ce qu’a rappelé M. Cyril Grislain, écrivain et business angel engagé. Il affirme que certaines grandes tendances mondiales, comme le rééquilibrage des forces du marché, l’impulsion des marchés d’Etats, la raréfaction des ressources naturelles, vont poser avec acuité la question de la responsabilité envers les générations futures. Ce qui revient à reposer la question, quelle planète, ou quel pays on voudrait pour nos enfants.
Enfin, pour M. Naoufel Aïssa, DG de Vivo Energy, l’entreprise, pour s’intégrer dans son environnement ne peut se contenter du strict respect du code du travail, de la convention collective ou même des lois en vigueur. Vivo Energy a inscrit dans sa stratégie une éthique des affaires qui renforce la proposition de valeur vis-à-vis des clients, des employés, des actionnaires et plus globalement les fournisseurs et autres partie-prenantes de l’environnement de l’entreprise. Ainsi, la RSE, selon M. Aïssa a aussi soulevé la question du risque, qui exige de remettre l’Homme au cœur de l’entreprise et de considérer les investissements tangibles et intangibles, qui permettent de renforcer la valeur proposée aux différentes prenantes. Le bon sens conjugué à la générosité demeure les principes actifs de la RSE.