Experts et politiques s’accordent pour dire que le 23 octobre, la légitimité électorale prend fin. Pour éviter un vide politique, BCE propose, à son tour, de switcher vers une légitimité consensuelle. Le gouvernement actuel doit, par voie de conséquence, dialoguer avec l’ensemble des parti(e)s qui composent le paysage politique national. Ce faisant, BCE fait revenir le peuple dans la partie. Cette réhabilitation de souveraineté est une garantie réelle. Mais sauvera-t-elle la transition démocratique?
Il y a une “sebssimania“ qui lève dans le pays. BCE prend la vague avec maestria. Il entend chevaucher cette ola pour porter un coût d’arrêt à l’entreprise malveillante de “détricotage“ de l’Etat et de noyautage de son administration. La transition démocratique est à l’arrêt et la coalition au pouvoir est moribonde, assène-t-il, sans hésiter. A l’épreuve des faits, le gouvernement s’est révélé impuissant. Le 23 octobre, sa légitimité électorale prendra fin. Causa fare?
Le pays est en panne
BCE fait recette. A l’annonce de son meeting, la presse locale et internationale a répondu présente à l’appel. Il n’a jamais voulu jouer au père de la nation, et en fidèle disciple de Bourguiba, il ne cherche pas à le détrôner. Toutefois, avec BCE le pays tient son Churchill. La lucidité politique est manifeste. Le parler vrai est à l’œuvre et le franc parler est de service. Le juste propos et la formule qui fait tilt. Le sang, les larmes et la sueur ne sont pas loin. Ajouter à cela le sens des enjeux du moment. La patrie est en danger de dénaturation. Elle est sous menace d’évaporation. Un contre-modèle est en mouvement. Il faut arrêter le massacre!
BCE a renoncé à présenter le programme de son parti, et par-delà l’auditoire, il s’adressera au peuple tunisien, sous la pression des événements dangereux du moment. Nida Tounès a le vent en poupe. Il a la main, en ce moment. Et, dit-on, du beau jeu. Il en dévoilera l’esprit dans le cours de son intervention. Nida Tounès suscite une véritable lame de fond patriotique qui rallie toutes les principales formations politiques qui ont pour repères la patrie, le besoin de sa stabilité politique et la nécessité de sa pérennité.
Halte au travail de sape de l’Etat tunisien, dit BCE en substance. Ce travail malveillant a commencé à prendre forme par l’irruption sur la scène politique de la phalange salafiste. C’est elle qui réalise en sous-mains ce dessein inavouable. Ce projet est contre nature. Et d’ailleurs il fait fausse route.
Ne pas se tromper de guerre
Le pic de violence à l’encontre de l’ambassade américaine est bien la preuve de la cécité politique, de la phalange. Il est vrai que le film «l’innocence des musulmans» est calomnieux et haineux. Mais il n’était pas dirigé contre les Arabes musulmans. Son réalisateur participe d’une cabale contre le candidat Obama, à cause de son ascendance musulmane. Il entendait chahuter sa campagne électorale et tenter d’empêcher sa réélection, au mois de novembre prochain.
Qu’il ait offensé, la conscience musulmane, c’est un dommage collatéral. Ce n’était pas l’objectif de cette manipulation, il est vrai diabolique. Donc s’en prendre, sans discernement à l’Amérique avec un déluge de violences, c’est se tromper de guerre. Les élus américains ont, dans une «standing ovation», a rappelé BCE, salué la révolution du 14 janvier. Et le président Obama a fait applaudir nommément Mohamed Bouazizi. Il s’est comporté en véritable ami de la Tunisie, en nous accordant la garantie de son gouvernement pour nos sorties sur le marché financier!
Le gouvernement américain aurait suppléé notre défaut de paiement. Ce privilège était jusque-là exclusivement réservé à l’Etat d’Israël! C’est dire si l’Amérique s’est solidarisée avec la Tunisie et qu’elle ne méritait pas cette image de Satan où la phalange salafiste l’a rangée. Le film est coupable de sentiment de haine, mais l’Amérique nous a couverts de son amitié.
La conclusion de BCE était sans appel. La phalange violente n’a pas châtié l’Amérique, coupable de rien, dans les circonstances actuelles, mais elle a jeté un discrédit sur l’Etat tunisien, qui se trouve bafoué, foulé par terre et expressément mis en état de faiblesse.
La responsabilité du ministère de l’Intérieur ne fait pas de doute. Mais le forfait engage la responsabilité de l’ensemble du gouvernement. L’accusation est sans appel. BCE appelle l’attention sur le fait que cette minorité remuante ne croit pas en l’Etat tunisien. D’ailleurs, elle a froissé son fanion et rejette son hymne national. Par voie de conséquence, elle rejette ses valeurs! Elle entend, en éclaboussant son lustre et son rang dans le monde, le faire voler en éclats. Halte là, dira BCE, grave et déterminé. Quelle sera la nouvelle donne?
Quo va dis?
Le 23 octobre cessera la légitimité électorale, dixit les experts de droit constitutionnel. Bon gré mal gré, le gouvernement devra venir à Canossa, mettre genou à terre et dialoguer avec les formations politiques, au nombre de onze, qui ont paraphé l’accord du 15 septembre 2011 par lequel, en prenant le peuple à témoin, ils s’engagent à rendre le tablier le 23 octobre 2012.
Ne s’étant pas encore acquitté de la tâche de la finalisation du texte de la Constitution, ils doivent, en intelligence avec leur engagement solennel et historique, se mettre sous les feux du contrôle populaire, dira en substance BCE. Cette solution redonne la main au peuple et le remet en selle pour exercer sa souveraineté et faire contrepoids à l’ascendant salafiste et neutraliser sa dérive programmée.
On a dit Churchill de BCE mais il est à la fois Garibaldi, car il se veut l’architecte de l’œuvre de ré-agglomération de l’Etat, issue des entrailles de la lutte nationale pour l’indépendance. Il salue cette œuvre historique du peuple, menée sous l’impulsion destourienne. Chercher à éliminer la composante, maître d’oeuvre de l’Etat tunisien, en lui accolant l’épouvantail RCDiste, de la contre-révolution, c’est une cause perdue.
BCE est, aussi, par ses conjectures, Gaullien, parce qu’en faisant tomber le couperet du 23 octobre, il oblige le peuple à prendre date et ne pas rater ce rendez-vous salutaire avec l’histoire.
Mais BCE confirme essentiellement sa foi musulmane, en véritable descendant du Prophète, Paix et Salut sur Lui, il place sa vie entre les mains du Tout Puissant. Il se fiche des rumeurs d’attentat comme d’une guigne. La mort, il l’a frôlée dans une expédition dirigée contre les forces coloniales. Une mission réalisée par un groupe de 15 militants. Trois d’entre eux, dont lui-même, ont survécu. De ces trois, un seul continue à se battre pour sauver la patrie. Dieu a voulu qu’il soit celui-là. Il ne se dérobera à cette volonté divine, fût-elle, au prix de sa vie.
Et BCE d’aller jusqu’au bout de sa logique. Obliger le gouvernement à composer ne veut pas dire l’intégrer mais le contraindre par une feuille de route claire et acceptée de tous. Le 23, on mettrait donc fin à notre errance démocratique?
A suivre.